فدوى فريق العمـــــل *****
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الموقع : رئيسة ومنسقة القسم الانكليزي تاريخ التسجيل : 07/12/2010 وســــــــــام النشــــــــــــــاط : 7
| | DÉMIURGE | |
DÉMIURGELa notion de démiurge revient à penser la réalité comme une création, puis de réduire celle-ci à une fabrication. L'histoire des civilisations et la continuité des traditions culturelles montrent que le thème du démiurge est largement réparti et singulièrement constant au cours de l'histoire humaine. Comment expliquer cette insistance et cette universalité ? Pour y répondre, il serait nécessaire d'inventorier au moins deux domaines où joue l'idée d'une œuvre démiurgique. Le démiurge constitue un mythème foisonnant en aspects symboliques tout à la fois différents et complémentaires. Il semble que toute civilisation ait mis en avant au moins un « geste » démiurgique. La démiurgie implique une séparation, préalable à toute autofécondation divine, procréatrice du Cosmos — démiurgie majeure dont les autres vont résulter. Séparation des Eaux d'en haut et des Eaux d'en bas (Veda, Bible, Enluma-Enlish, monde-de-Rê - monde-de-la-Douat), séparation de la lumière et des ténèbres. De là procède tout un ensemble de séries d'actes démiurgiques seconds. Un premier groupe comprend une série d'actes-archétypes exemplaires quant à la possession de l'espace et du temps. Répartition de parcelles de terre (ce qu'indique le mot démos compris dans le terme grec démiourgos), arpentage (Yu le Grand), défrichage (fête du Premier Sillon), bornage et repérage (instauration d'un témènos), déploiement et mesure de l'espace-temps (les Trois Pas de Vishnu, les Sept Pas de Bouddha), mise en ordre (les travaux d'Hercule sont un parcours initiatique des Quatre Horizons). Un deuxième groupe est lié aux techniques des constructeurs et bâtisseurs. Le démiurge est architecte ou artisan — maçon, tailleur de pierre, charpentier. Ses outils sont l'équerre (principe mâle) et le compas (principe femelle), dont les symboles démiurgiques se retrouvent de la Chine (Fuxi et Nügua) à l'Occident (franc-maçonnerie). Un troisième groupe symbolique est constitué par l'art du tisserand. L'œuvre démiurgique joue alors sur tous les outils de cet art : tissu, fil, métier, fuseau, quenouille, ciseaux, aiguille, nœud, navette. Le démiurge est un « dieu lieur » (son œuvre est filet, réseau, tapisserie, toile), il croise la chaîne et la trame (Shruti-Smriti), il possède la clé de l'ornemental (tresse, torsade, entrelacs, etc.), il est le maître du fil de la parole (Dogon), des bornes temporelles (Zervan, moires, fées), par la navette il alterne, expire et inspire (taoïsme, Platon)... Un autre groupe a trait au travail de la matière. Par la salive, le sperme, le lait, le sang, les larmes, l'urine, l'excrément, le démiurge refaçonne, redonne vie, métamorphose, régénère, recycle. Ses ustensiles sont ceux de la cuisine : chaudron, cratère, coupe, pilon, mortier, pressoir, jarre à liqueur, alambic, etc. Le démiurge a le secret de l'ivresse et de la boisson d'immortalité. Il est magicien et possède le savoir des philtres les plus puissants. Plus universel encore est un cinquième groupe. Le travail du feu représente l'activité démiurgique la plus secrète, la plus dangereuse, la plus ambiguë. Creuset, four, fourneau, soufflet, forge sont les attributs du démiurge. Il est maître du feu et du souffle, et par là il maîtrise les transformations de la matière. Il conjoint dans un tout l'ensemble des forces des éléments : feu, eau, air, terre, métal. Potier, le démiurge fabrique les soufflets nécessaires à l'entretien du feu et à la concentration de la chaleur. Forgeron, il fond le métal et forge les armes du dieu suprême (faisceau de foudre, hache biface, huit vents). Cette connaissance de l'arme omnipuissante, le démiurge la paie de sa personne : il en reste boiteux, borgne, difforme, estropié, mutilé. Le démiurge est aussi un thème philosophique extrêmement riche. Née dans les milieux pythagoriciens, la notion de cosmos comme parure implique une démiurgie, une répartition, une mise en ordre qui tout à la fois donne beauté et intelligibilité. Le démiurge possède la science des sons, des proportions, des formes idéales et des nombres idéaux. C'est par cette science du suprasensible qu'il peut contempler l'archétype divin, le principe organisateur. Tout le Timée de Platon, fortement influencé par le pythagorisme, est une démiurgie qui, par bien des points, lie à une arithmosophie et à une géométrie symbolique de nombreux aspects du mythème qui vient d'être évoqué. Dans le Timée, le cercle de la création relie l'Arché suprême ou modèle de toute création, la mimésis démiurgique, la chôra-réceptacle, et les puissances daïmoniques. Ce texte expose une véritable procession qui hiérarchise le principe absolu de perfection, le démiurge suprême, ses servants démiurgiques, les puissances des astres et leur hiérarchie céleste, les « daïmons », les âmes humaines, les âmes inférieures. Les alexandrins ont parlé ainsi d'une « théologie de Platon ». Les commentateurs modernes ont souvent du mal à cerner cette démiurgie parce qu'ils restent prisonniers d'une lecture trop intellectualiste (Zeller, Brochard, Robin). Tout au contraire, A. J. Festugière souligne la dimension mystique et contemplative de ce mythe platonicien ; M. de Gandillac pour Plotin et J. Trouillard pourProclus ont montré, de leur côté, comment une tradition authentiquement platonicienne a approfondi le thème de la démiurgie dans le cadre d'une philosophie de l'Un.
Alain DELAUNAY | |
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