Georges Scelle (1878-1961).
§ 1 - La vie et l'oeuvre
Né à Avranches (Manche, France) en 1878 Georges Scelle a fait ses études supérieures à la Faculté de droit de Paris et à l"Ecole libre des sciences politiques".
Après l'agrégation en 1912 il enseigne le droit international et le droit des relations industrielles à la Faculté de droit de Dijon, poste qu'il retrouve après la guerre.
En 1933 Georges Scelle est nommé à Paris où il enseigne le droit international à la Faculté de droit, jusqu'à sa retraite en 1948.
Il a représenté la France dans les organismes internationaux et a participé à des cabinets ministériels.
Son oeuvre comprend essentiellement :
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Précis de droit des gens, 2 vol. Paris 1932 et 1934
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Règles générales du droit de la Paix, R.C.A.D.I. 1933, IV, pp.331-697
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Manuel de droit international public, Paris 1948
§ 2 - La philosophie du droit international de Georges Scelle
La théorie de
Léon Duguit a été reprise et développée par Georges Scelle en droit international.
Georges Scelle, comme Léon Duguit, un disciple d'
Emile Durkheim, fonde le droit sur la solidarité, la solidarité par similitude et la solidarité par division du travail, qui entraîne les échanges sociaux.
Selon nos auteurs le droit naît des nécessités biologiques, il est secrété par le groupe social parce qu'il est nécessaire à la survie du groupe social. Il est donc "naturel" dans le sens d'ojectif, car il s'agit d'un impératif social traduisant une nécessité vitale.
Ce droit objectif s'oppose au droit positif qui est l'ensemble des règles sociales en vigueur dans un groupe social déterminé, à une époque déterminée.
Le droit positif n'est que la traduction du droit objectif, une traduction plus ou moins fidèle,mais une traduction qui se doit d'être la plus fidèle possible car le respect du droit objectif est la condition fondamentale de la survie du groupe.
Le fondement biologique du droit est applicable au droit international comme au droit interne.
De même que l'Etat n'est qu'un groupement social de superposition la société internationale est la composante de groupes plus restreints. Les groupes sociaux sont composés d'individus ayant des rapports de solidarité.
Il n'existe pas de différences fondamentales entre les groupes sociaux composés d'individus ayant la même nationalité et les groupes sociaux internationaux comprenant des individus de nationalité différente.
Tous les groupements sociaux secrètent leur droit objectif.
La société universelle, la communauté humaine globale, secrète également son droit objectif qui est le droit des "gens", c'est-à-dire le droit des individus, le droit des membres du groupe social mondial.
De même que le droit objectif de la société étatique qui inclut des groupes sociaux plus restreints est supérieur au droit objectif de ces groupes restreints, de même le droit objectif de la société universelle, le droit des "gens" est supérieur au droit objectif des Etats, des groupes sociaux territoriaux.
C'est la loi de la hiérarchie des normes. La norme étatique est subordonnée à la norme internationale. Le droit international est un ordre juridique de superposition.
Certes la société universelle ne comporte pas encore d'organes pouvant constater l'existence du droit objectif et le transformer ainsi en droit positif dont il faudrait assurer l'exécution.
En attendant la formation d'un groupe social universel aussi élaboré que le groupe social étatique ce sont les Etats qui, en vertu de
la loi du dédoublement fonctionnel, agissent à la fois pour leur compte et au nom de la société universelle en participant à la formation du droit international, droit positif, et en assurent son exécution.