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| | Le Capital - Livre premier Le développement de la production capitaliste Karl MARX IV° section : la production de la plus-value relative Chapitre XIV : Division du travail et manufacture | |
02.29.2016
IV. Division du travail dans la manufacture et dans la sociétéNous avons vu comment la manufacture est sortie de la coopération; nous avons étudié ensuite ses éléments simples, l'ouvrier parcellaire et son outil, et en dernier lieu son mécanisme d'ensemble. Examinons maintenant le rapport entre la division manufacturière du travail et sa divisionsociale, laquelle forme la base générale de toute production marchande. Si l'on se borne à considérer le travail lui-même, on peut désigner la séparation de la production sociale en ses grandes branches, industrie, agriculture, etc., sous le nom de division du travail en général, la séparation de ces genres de production en espèces et variétés sous celui de division du travail en particulier, et enfin la division dans l'atelier sous le nom du travail en détail [1]. La division du travail dans la société et la limitation correspondante des individus à une sphère ou à une vocation particulière, se développent, comme la division du travail dans la manufacture, en partant de points opposés. Dans une famille, et dans la famille élargie, la tribu, une division spontanée de travail s'ente sur les différences d'âge et de sexe, c'est à dire sur une base purement physiologique. Elle gagne plus de terrain avec l'extension de la communauté, l'accroissement de la population et surtout le conflit entre les diverses tribus et la soumission de l'une par l'autre. D'autre part, ainsi que nous l'avons déjà remarqué, l'échange des marchandises prend d'abord naissance sur les points où diverses familles, tribus, communautés entrent en contact; car ce sont des collectivités et non des individus qui, à l'origine de la civilisation, s'abordent et traitent les uns avec les autres en pleine indépendance. Diverses communautés trouvent dans leur entourage naturel des moyens de production et des moyens de subsistance différents. De là une différence dans leur mode de production, leur genre de vie et leurs produits. Des relations entre des communautés diverses une fois établies, l'échange de leurs produits réciproques se développe bientôt et les convertit peu à peu en marchandises. L'échange ne crée pas la différence des sphères de production; il ne fait que les mettre en rapport entre elles et les transforme ainsi en branches plus ou moins dépendantes de l'ensemble de la production sociale. Ici la division sociale du travail provient de l'échange entre sphères de production différentes et indépendantes les unes des autres. Là où la division physiologique du travail forme le point de départ, ce sont au contraire les organes particuliers d'un tout compact qui se détachent les uns des autres, se décomposent, principalement en vertu de l'impulsion donnée par l'échange avec des communautés étrangères, et s'isolent jusqu'au point où le lien entre les différents travaux n'est plus maintenu que par l'échange de leurs produits. Toute division du travail développée qui s'entretient par l'intermédiaire de l'échange des marchandises a pour base fondamentale la séparation de la ville et de la campagne [2]. On peut dire que l'histoire économique de la société roule sur le mouvement de cette antithèse, à laquelle cependant nous ne nous arrêterons pas ici. De même que la division du travail dans la manufacture suppose comme base matérielle un certain nombre d'ouvriers occupés en même temps, de même la division du travail dans la société suppose une certaine grandeur de la population, accompagnée d'une certaine densité, laquelle remplace l'agglomération dans l'atelier [3]. Cette densité cependant est quelque chose de relatif. Un pays dont la population est proportionnellement clairsemée, possède néanmoins, si ses voies de communication sont développées, une population plus dense qu'un pays plus peuplé, dont les moyens de communication sont moins faciles. Dans ce sens, les États du nord de l'Union américaine possèdent une population bien plus dense que les Indes [4]. La division manufacturière du travail ne prend racine que là où sa division sociale est déjà parvenue à un certain degré de développement, division que par contrecoup elle développe et multiplie. A mesure que se différencient les instruments de travail, leur fabrication va se divisant en différents métiers [5]. L'industrie manufacturière prend elle possession d'un métier qui jusque là était connexe avec d'autres comme occupation principale ou accessoire, tous étant exercés par le même artisan, immédiatement ces métiers se séparent et deviennent indépendants; s'introduit elle dans une phase particulière de la production d'une marchandise, aussitôt les autres phases constituent autant d'industries différentes. Nous avons déjà remarqué que là où le produit final n'est qu'une simple composition de produits partiels et hétérogènes, les différents travaux parcellés dont ils proviennent peuvent se désagréger et se transformer en métiers indépendants. Pour perfectionner la division du travail dans une manufacture on est bientôt amené à subdiviser une branche de production suivant la variété de ses matières premières, ou suivant les diverses formes que la même matière première peut obtenir, en manufactures différentes et pour une bonne part entièrement nouvelles. C'est ainsi que déjà dans la première moitié du XVIII° siècle on tissait en France plus de cent espèces d'étoffes de soie, et qu'à Avignon par exemple une loi ordonna que « chaque apprenti ne devait se consacrer qu'à un seul genre de fabrication et n'apprendre jamais à tisser qu'un seul genre d'étoffes ». La division territoriale du travail qui assigne certaines branches de production à certains districts d'un pays reçoit également une nouvelle impulsion de l'industrie manufacturière qui exploite partout les spécialités [6]. Enfin l'expansion du marché universel et le système colonial qui font partie des conditions d'existence générales de la période manufacturière lui fournissent de riches matériaux pour la division du travail dans la société. Ce n'est pas ici le lieu de montrer comment cette division infesta non seulement la sphère économique mais encore toutes les autres sphères sociales, introduisant partout ce développement des spécialités, ce morcellement de l'homme qui arracha au maître d'Adam Smith, à A. Ferguson, ce cri : « Nous sommes des nations entières d'ilotes et nous n'avons plus de citoyens libres [7]. » Malgré les nombreuses analogies et les rapports qui existent entre la division du travail dans la société et la division du travail dans l'atelier, il y a cependant entre elles une différence non pas de degré mais d'essence. L'analogie apparaît incontestablement de la manière la plus frappante là où un lien intime entrelace diverses branches d'industrie. L'éleveur de bétail par exemple produit des peaux; le tanneur les transforme en cuir; le cordonnier du cuir fait des bottes. Chacun fournit ici un produit gradué et la forme dernière et définitive est le produit collectif de leurs travaux spéciaux. Joignons à cela les diverses branches de travail qui fournissent des instruments, etc., à l'éleveur de bétail, au tanneur et au cordonnier. On peut facilement se figurer avec Adam Smith que cette division sociale du travail ne se distingue de la division manufacturière que subjectivement,c'est à dire que l'observateur voit ici d'un coup d’œil les différents travaux partiels à la fois, tandis que là leur dispersion sur un vaste espace et le grand nombre des ouvriers occupés à chaque travail particulier ne lui permettent pas de saisir leurs rapports d'ensemble [8]. Mais qu'est ce qui constitue le rapport entre les travaux indépendants de l'éleveur de bétail, du tanneur et du cordonnier ? C'est que leurs produits respectifs sont des marchandises. Et qu'est ce qui caractérise au contraire la division manufacturière du travail ? C'est que les travailleurs parcellaires ne produisent pas de marchandises [9]. Ce n'est que leur produit collectif qui devient marchandise [10] . L'intermédiaire des travaux indépendants dans la société c'est l'achat et la vente de leurs produits; le rapport d'ensemble des travaux partiels de la manufacture a pour condition la vente de différentes forces de travail à un même capitaliste qui les emploie comme force de travail collective. La division manufacturière du travail suppose une concentration de moyens de production dans la main d'un capitaliste; la division sociale du travail suppose leur dissémination entre un grand nombre de producteurs marchands indépendants les uns des autres. Tandis que dans la manufacture la loi de fer de la proportionnalité soumet des nombres déterminés d'ouvriers à des fonctions déterminées, le hasard et l'arbitraire jouent leur jeu déréglé dans la distribution des producteurs et de leurs moyens de production entre les diverses branches du travail social. Les différentes sphères de production tendent, il est vrai, à se mettre constamment en équilibre. D'une part, chaque producteur marchand doit produire une valeur d'usage, c'est à dire satisfaire un besoin social déterminé; or, l'étendue de ces besoins diffère quantitativement et un lien intime les enchaîne tous en un système qui développe spontanément leurs proportions réciproques; d'autre part la loi de la valeur détermine combien de son temps disponible la société peut dépenser à la production de chaque espèce de marchandise. Mais cette tendance constante des diverses sphères de la production à s'équilibrer n'est qu'une réaction contre la destruction continuelle de cet équilibre. Dans la division manufacturière de l'atelier le nombre proportionnel donné d'abord par la pratique, puis par la réflexion, gouverne a priori à titre de règle la masse d'ouvriers attachée à chaque fonction particulière; dans la division sociale du travail il n'agit qu'a posteriori, comme nécessité fatale, cachée, muette, saisissable seulement dans les variations barométriques des prix du marché, s'imposant et dominant par des catastrophes l'arbitraire déréglé des producteurs marchands. La division manufacturière du travail suppose l'autorité absolue du capitaliste sur des hommes transformés en simples membres d'un mécanisme qui lui appartient. La division sociale du travail met en face les uns des autres des producteurs indépendants qui ne reconnaissent en fait d'autorité que celle de la concurrence, d'autre force que la pression exercée sur eux par leurs intérêts réciproques, de même que dans le règne animal la guerre de tous contre tous, bellum omnium contra omnes, entretient plus ou moins les conditions d'existence de toutes les espèces. Et cette conscience bourgeoise qui exalte la division manufacturière du travail, la condamnation à perpétuité du travailleur à une opération de détail et sa subordination passive au capitaliste, elle pousse des hauts cris et se pâme quand on parle de contrôle, de réglementation sociale du procès de production ! Elle dénonce toute tentative de ce genre comme une attaque contre les droits de la Propriété, de la Liberté, du Génie du capitaliste. « Voulez vous donc transformer la société en une fabrique ? » glapissent alors ces enthousiastes apologistes du système de fabrique. Le régime des fabriques n'est bon que pour les prolétaires ! Si l'anarchie dans la division sociale et le despotisme dans la division manufacturière du travail caractérisent la société bourgeoise, des sociétés plus anciennes où la séparation des métiers s'est développée spontanément, puis s'est cristallisée et enfin a été sanctionnée légalement, nous offrent par contre l'image d'une organisation sociale du travail régulière et autoritaire tandis que la division manufacturière y est complètement exclue, ou ne se présente que sur une échelle minime, ou ne se développe que sporadiquement et accidentellement [11]. Ces petites communautés indiennes, dont on peut suivre les traces jusqu'aux temps les plus reculés, et qui existent encore en partie, sont fondées sur la possession commune du sol, sur l'union immédiate de l'agriculture et du métier et sur une division du travail invariable, laquelle sert de plan et de modèle toutes les fois qu'il se forme des communautés nouvelles. Etablies sur un terrain qui comprend de cent à quelques milles acres, elles constituent des organismes de production complets se suffisant à elles-mêmes. La plus grande masse du produit est destinée à la consommation immédiate de la communauté; elle ne devient point marchandise, de manière que la production est indépendante de la division du travail occasionnée par l'échange dans l'ensemble de la société indienne. L'excédant seul des produits se transforme en marchandise, et va tout d'abord entre les mains de l'État auquel, depuis les temps les plus reculés, en revient une certaine partie à titre de rente en nature. Ces communautés revêtent diverses formes dans différentes parties de l'Inde. Sous sa forme la plus simple, la communauté cultive le sol en commun et partage les produits entre ses membres, tandis que chaque famille s'occupe chez elle de travaux domestiques, tels que filage, tissage, etc. A côté de cette masse occupée d'une manière uniforme nous trouvons « l'habitant principal » juge, chef de police et receveur d'impôts, le tout en une seule personne; le teneur de livres qui règle les comptes de l'agriculture et du cadastre et enregistre tout ce qui s'y rapporte; un troisième employé qui poursuit les criminels et protège les voyageurs étrangers qu'il accompagne d'un village à l'autre, l'homme frontière qui empêche les empiètements des communautés voisines; l'inspecteur des eaux qui fait distribuer pour les besoins de l'agriculture l'eau dérivée des réservoirs communs; le bramine qui remplit les fonctions du culte; le maître d'école qui enseigne aux enfants de la communauté à lire et à écrire sur le sable; le bramine calendrier qui en qualité d'astrologue indique les époques des semailles et de la moisson ainsi que les heures favorables ou funestes aux divers travaux agricoles; un forgeron et un charpentier qui fabriquent et réparent tous les instruments d'agriculture; le potier qui fait toute la vaisselle du village; le barbier, le blanchisseur, l'orfèvre et çà et là le poète qui dans quelques communautés remplace l'orfèvre et dans d'autres, le maître d'école. Cette douzaine de personnages est entretenue aux frais de la communauté entière. Quand la population augmente, une communauté nouvelle est fondée sur le modèle des anciennes et s'établit dans un terrain non cultivé. L'ensemble de la communauté repose donc sur une division du travail régulière, mais la division dans le sens manufacturier est impossible puisque le marché reste immuable pour le forgeron, le charpentier, etc., et que tout au plus, selon l'importance des villages, il s'y trouve deux forgerons ou deux potiers au lieu d'un [12]. La loi qui règle la division du travail de la communauté agit ici avec l'autorité inviolable d'une loi physique, tandis que chaque artisan exécute chez lui, dans son atelier, d'après le mode traditionnel, mais avec indépendance et sans reconnaître aucune autorité, toutes les opérations qui sont de son ressort. La simplicité de l'organisme productif de ces communautés qui se suffisent à elles mêmes, se reproduisent constamment sous la même forme, et une fois détruites accidentellement se reconstituent au même lieu et avec le même nom [13], nous fournit la clef l'immutabilité des sociétés asiatiques, immutabilité qui contraste d'une manière si étrange avec la dissolution et reconstruction incessantes des Etats asiatiques, les changements violents de leurs dynasties. La structure des éléments économiques fondamentaux de la société, reste hors des atteintes de toutes les tourmentes de la région politique. Les lois des corporations du moyen âge empêchaient méthodiquement la transformation du maître en capitaliste, en limitant par des édits rigoureux le nombre maximum des compagnons qu'il avait le droit d'employer, et encore on lui interdisait l'emploi de compagnons dans tout genre de métier autre que le sien. La corporation se gardait également avec un zèle jaloux contre tout empiétement du capital marchand, la seule forme libre du capital qui lui faisait vis-à-vis. Le marchand pouvait acheter toute sorte de marchandises, le travail excepté. Il n'était souffert qu'à titre de débitant de produits. Quand des circonstances extérieures nécessitaient une division du travail progressive, les corporations existantes se subdivisaient en sous genres, ou bien il se formait des corporations nouvelles à côté des anciennes, sans que des métiers différents fussent réunis dans un même atelier. L'organisation corporative excluait donc la division manufacturière du travail, bien qu'elle en développât les conditions d'existence en isolant et perfectionnant les métiers. En général le travailleur et ses moyens de production restaient soudés ensemble comme l'escargot et sa coquille. Ainsi la base première de la manufacture, c'est à dire la forme capital des moyens de production, faisait défaut. Tandis que la division sociale du travail, avec ou sans échange de marchandises, appartient aux formations économiques des sociétés les plus diverses, la division manufacturière est une création spéciale du mode de production capitaliste.
Notes [1] « La division du travail a pour point de départ la séparation des professions les plus diverses, et marche progressivement jusqu'à cette division dans laquelle plusieurs travailleurs se partagent la confection d'un seul et même produit, comme dans la manufacture. » (Storch., l.c., t. 1, p. 173.) « Nous rencontrons chez les peuples parvenus à un certain degré de civilisation trois genres de division d'industrie : la première que nous nommons générale, amène la distinction des producteurs en agriculteurs, manufacturiers et commerçants; elle se rapporte aux trois principales branches d'industrie nationale; la seconde, qu'on pourrait appeler spéciale, est la division de chaque genre d'industrie en espèces... la troisième division d'industrie, celle enfin qu'on devrait qualifier de division de la besogne ou de travail proprement dit, est celle qui s'établit dans les arts et les métiers séparés.... qui s'établit dans la plupart des manufactures et des ateliers. » (Skarbeck, l.c., p. 84, 86.) [2] C'est Sir James Steuart qui a le mieux traité cette question. Son ouvrage, qui a précédé de dix ans celui d'Adam Smith, est aujourd'hui encore à peine connu. La preuve en est que les admirateurs de Malthus ne savent même pas que dans la première édition de soit écrit sur la population, abstraction faite de la partie purement déclamatoire, il ne fait guère que copier James Steuart, auquel il faut ajouter Wallace et Townsend. [3] « Il faut une certaine densité de population soit pour les communications sociales, soit pour la combinaison des puissances par le moyen desquelles le produit du travail est augmenté. » (James Mill, l.c. p.50.) « A mesure que le nombre des travailleurs augmente, le pouvoir productif de la société augmente aussi en raison composée de cette augmentation multipliée par les effets de la division du travail. » (Th. Hodgskin, l.c., p.125, 126.) [4] Par suite de la demande considérable de coton depuis 1861, la production du coton dans quelques districts de l'Inde d'ailleurs très peuplés, a été développée aux dépens de la production du riz. Il en est résulté une famine dans une grande partie du pays, les moyens défectueux de communication ne permettant pas de compenser le déficit de riz dans un district par une importation assez rapide des autres districts. [5] C'est ainsi que la fabrication des navettes de tisserand formait en Hollande déjà au XVII° siècle une branche d'industrie spéciale. [6] « Les manufactures de laine d'Angleterre ne sont elles pas divisées eu branches distinctes, dont chacune a un siège spécial où se fait uniquement ou principalement la fabrication : les draps fins dans le Somersetshire, les draps communs dans le Yorkshire, les crêpes à Norwich, les brocatelles à Kendal, les couvertures à Whitney, et ainsi de suite. » (Berkeley, The Querist, 1750, p.520.) [7] A. Ferguson : History of Civil Society. Part. IV, ch. II. [8] Dans les manufactures proprement dites « la totalité des ouvriers qui y sont employés est nécessairement peu nombreuse, et ceux qui sont occupés à chaque différente branche de l'ouvrage peuvent souvent être réunis dans le même atelier, et places à la fois sous les yeux de l'observateur. Au contraire, dans ces grandes manufactures (!) destinées à fournir les objets de consommation de la masse du peuple, chaque branche de l'ouvrage emploie un si grand nombre d'ouvriers, qu'il est impossible de les réunir tous dans le même atelier. ... La division y est moins sensible, et, par cette raison, a été moins bien observée. » (A. Smit : Wealth of Nations l.1, ch. I.) Le célèbre passage dans le même chapitre qui commence par ces mots : « Observez dans un pays civilisé et florissant, ce qu'est le mobilier d'un simple journalier ou du dernier de, manœuvres », etc., et qui déroule ensuite le tableau des innombrables travaux sans l'aide et le concours desquels « le plus petit particulier, dans un pays civilisé, ne pourrait être vêtu et meublé » : ce passage est presque littéralement copié des Remarques ajoutées par B. de Mandeville à son ouvrage : The Fable of the Bees, or Private Vices, Publick Benefits. I° édition sans remarques, 1706; édition avec des remarques, 1714. [9] « Il n'y a plus rien que l'on puisse nommer la récompense naturelle du travail individuel. Chaque travailleur ne produit plus qu'une partie d'un tout, et chaque partie n'ayant ni valeur ni utilité par elle-même, il n'y a rien que le travailleur puisse s'attribuer, rien dont il puisse dire : ceci est mon produit, je veux le garder pour moi-même. » ( Labour defended against the claims of Capital. Lond., 1825, p.25.) L'auteur de cet écrit remarquable est Ch. Hodgskin, déjà cité. [10] C'est ce qui a été démontré d'une manière singulière aux Yankees. Parmi les nombreux et nouveaux impôts imaginés à Washington pendant la guerre civile, figurait une accise de six pour cent sur les produits industriels. Or, qu'est ce qu'un produit industriel ? A cette question posée par les circonstances la sagesse législative répondit : « Une chose devient produit quand elle est faite (when it is made), et elle est faite dès qu'elle est bonne pour la vente. » Citons maintenant un exemple entre mille. Dans les manufactures de parapluies et de parasols, à New York et à Philadelphie, ces articles étaient d'abord fabriqués en entier, bien qu'en réalité ils soient des mixta composita de choses complètement hétérogènes. Plus tard les différentes parties qui les constituent devinrent l'objet d'autant de fabrications spéciales disséminées en divers lieux, c'est à dire que la division du travail, de manufacturière qu'elle était, devint sociale. Les produits des divers travaux partiels forment donc maintenant autant de marchandises qui entrent dans la manufacture de parapluies et de parasols pour y être tout simplement réunis en un tout. Les Yankees ont baptisé ces produits du nom d'articles assemblés (assembled articles), nom qu'ils méritent d'ailleurs à cause des impôts qui s'y trouvent réunis. Le parapluie paye ainsi six pour cent d'accise sur le prix de chacun de ses éléments qui entre comme une marchandise dans sa manufacture et de plus six pour cent sur son propre prix total. [11] « On peut... établir en règle générale que moins l'autorité présidé à la division du travail dans l'intérieur de la société, plus la division du travail se développe dans l'intérieur de l'atelier, et plus elle y est soumise à l'autorité d'un seul. Ainsi l'autorité dans l'atelier et celle dans la société, par rapport à la division du travail, sont en raison inverse l'une de l'autre. » (Karl Marx, Misère de la Philosophie, p.130, 131.) [12] Lieut. Col. Mark Wilks : Historical Sketches of the South of India., Lond., 1810 17, v.1, p.118, 120.) On trouve une bonne exposition des différentes formes de la communauté indienne dans l'ouvrage de George Campbell : Modern India. Lond., 1852. [13] « Sous cette simple forme... les habitants du pays ont vécu depuis un temps immémorial. Les limites des villages ont été rarement modifiées, et quoique les villages eux-mêmes aient eu souvent à souffrir de la guerre, de la famine et des maladies, ils n'en ont pas moins gardé d'âge en âge les mêmes noms, les mêmes limites, les mêmes intérêts et jusqu'aux mêmes familles. Les habitants ne s'inquiètent jamais des révolutions et des divisions des royaumes. Pourvu que le village reste entier, peu leur importe à qui passe le pouvoir; leur économie intérieure n'en éprouve le moindre changement. » (Th. Stamford Raffles, late Lieut. Gov. of Java : The History of Java. Lond. 1817, v.11, p.285, 286.) | |
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