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 Nietzsche et l’avenir de la religion 1

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سميح القاسم
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سميح القاسم


التوقيع : تخطفني الغاب، هذه امنيتي الحارقة حملتها قافلتي من : الجرح الرجيم ! أعبر من ازقة موتي الكامن لاكتوي بلهب الصبح.. والصبح حرية .

عدد الرسائل : 3158

تعاليق : شخصيا أختلف مع من يدعي أن البشر على عقل واحد وقدرة واحدة ..
أعتقد أن هناك تمايز أوجدته الطبيعة ، وكرسه الفعل البشري اليومي , والا ما معنى أن يكون الواحد منا متفوقا لدرجة الخيال في حين أن الآخر يكافح لينجو ..
هناك تمايز لابد من اقراره أحببنا ذلك أم كرهنا ، وبفضل هذا التمايز وصلنا الى ما وصلنا اليه والا لكنا كباقي الحيونات لازلنا نعتمد الصيد والالتقاط ونحفر كهوف ومغارات للاختباء
تاريخ التسجيل : 05/10/2009
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07122010
مُساهمةNietzsche et l’avenir de la religion 1



Paul Valadier sj
Résumé | Plan | Texte | Notes | Citation | Auteur
Résumé

Français

Nietzsche, qui définit l’homme comme « fabricateur de dieux » est, avant tout, un critique de l’idolâtrie qui peut prendre bien d’autres formes que celle de la religion. Le christianisme est, selon lui, à l’origine de sa propre « euthanasie » qui résulte d’une contradiction entre sa morale de probité et le dogme. La sortie du christianisme n’est donc pas en tant que telle une bonne nouvelle, ni une nouvelle rassurante. Cependant, la leçon de Nietzsche est que l’avenir reste fondamentalement ouvert, y compris à une problématique « reviviscence du divin ».
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Euthanasie du christianisme
Sombre avenir
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1Nietzsche, qui définit l’homme comme « fabricateur de dieux » est, avant tout, un critique de l’idolâtrie qui peut prendre bien d’autres formes que celle de la religion. Le christianisme est, selon lui, à l’origine de sa propre « euthanasie » qui résulte d’une contradiction entre sa morale de probité et le dogme. La sortie du christianisme n’est donc pas en tant que telle une bonne nouvelle, ni une nouvelle rassurante. Cependant, la leçon de Nietzsche est que l’avenir reste fondamentalement ouvert, y compris à une problématique « reviviscence du divin ».
2La pensée de Nietzsche peut-elle être de quelque intérêt pour qui s’interroge sur l’avenir de la religion en ce début de troisième millénaire ? Si Nietzsche se réduisait à la vulgate avec laquelle on confond sa philosophie religieuse, à savoir la mort de Dieu et (la conjonction semble aller de soi) le triomphe d’un homme enfin libéré et autonome, délié qu’il serait de croyances infantiles et paralysantes, nous n’aurions guère à nous arrêter à sa pensée. Nous voyons trop bien perdurer les religions, même sous des formes inquiétantes et menaçantes, nous savons trop bien aussi à quel point le mythe d’un homme enfin libéré des illusions et adulte a volé en éclat pour que nous nous arrêtions longtemps à ces fausses prophéties. Mais justement si Nietzsche peut nous intéresser, c’est-à-dire en philosophe nous aider à penser à notre tour la situation religieuse originale qui est la nôtre, c’est que sa pensée ne s’identifie pas à ces lieux communs, même si des lectures rapides ou intéressées l’ont réduit à ces pauvretés, y compris du côté de théologiens chrétiens.
3Il faut préciser immédiatement que Nietzsche s’interroge peu sur l’avenir de la religion en tant que telle, si l’on veut entendre par là qu’il parlerait de religion en général, ou mettrait en cause un soi-disant sentiment religieux pour en montrer la vanité, ou, projet encore plus improbable, qu’en philosophe des religions qu’il n’était pas, il prophétiserait sur le destin du religieux en soi. On doit d’ailleurs noter tout de suite qu’il doute si peu de la vivacité et de la permanence du sentiment religieux en l’homme qu’il définit l’homme comme « fabricateur de dieux », comme créateur fécond et inépuisable d’idoles, au point même, lit-on dans l’Avant-propos du Crépuscule des idoles qu’« il y a dans le monde plus d’idoles que de réalités ». Formule bien remarquable qui atteste à quel point l’idolâtrie en tant que fabrication d’idoles est sans doute une caractéristique de l’homme. Formule remarquable encore en ce qu’elle nous avertit d’emblée : quand bien même les religions seraient mortes ou affaiblies, et notamment le christianisme, rien n’indique pour autant que l’homme cessera d’être animé par « la volonté de croyance », c’est-à-dire par le besoin de se donner des idoles, des certitudes inébranlables, des points d’appui fermes pour porter et supporter l’existence. Et il est clair pour Nietzsche que le monde moderne grouille de pareilles idoles qui ont nom « progrès », « scientisme », « avènement du bonheur pour tous », « socialisme » ou « droits de l’homme », voire « athéisme » qui, si l’on en croit La Généalogie de la morale (III, § 27), ne serait que l’interprétation la plus subtile et la plus voilée de la volonté de vérité à tout prix, donc de la volonté de croyance... Ainsi la religion peut-elle parfaitement survivre au déclin de son emprise institutionnelle, dogmatique ou morale sur les esprits, sous la forme de l’idolâtrie moderne qui a fondamentalement selon Nietzsche les mêmes caractéristiques que les anciennes religions, avec en plus l’illusion de s’être libérée de la religion. Une religion sans religion, une croyance sans le masque du religieux, voilà de quoi enfermer le « tard venu » moderne ou « l’homme supérieur » qui se croit plus malin que les hommes du passé, dans des pièges qu’il aura bien du mal à éviter.
4Ainsi convient-il de s’arrêter un peu sur le sort de la religion dans le monde moderne, et notamment sur le destin du christianisme. Nietzsche a trop souvent insisté sur le fait qu’il parlait à partir de lui-même et de l’expérience vive et douloureuse de sa propre éducation, de sa maladie, de son destin individuel, pour ne pas admettre qu’en fait de religion, il parle essentiellement du christianisme, du christianisme historique certes qui a marqué l’Europe, mais très précisément du piétisme luthérien qui l’a façonné pour le meilleur et pour le pire. Parlant de religion, c’est donc de christianisme pour l’essentiel que Nietzsche parle. Or, et telles sont les thèses que je vais avancer dans cette intervention, nous sommes « au lit de mort du christianisme » selon le titre de l’aphorisme 92 d’Aurore ; mais cette « euthanasie » n’annonce rien de bon, elle laisse présager d’innombrables bouleversements qui peuvent précipiter la perte même de l’humanité ; car dans la mort du christianisme se joue le destin du nihilisme, donc nullement l’assurance d’un règne de la vérité, de la liberté, de l’homme enfin advenu à lui-même ; du coup nous devrons nous interroger, quelle sera la ou les figures de la religion dans l’avenir ? Euthanasie du christianisme


5Si le christianisme est frappé de mort, il faut bien voir qu’aux yeux de Nietzsche la cause n’est pas à chercher à l’extérieur du christianisme lui-même. Très différent en cela du rationalisme dominant en son siècle, et même de la philosophie des Lumières qu’il admira pourtant à l’époque de Humain trop humain, il ne pense pas que la religion reculerait devant les poussées d’une raison davantage maîtresse d’elle-même, ou sous les « avancées » des sciences. Il affirme même dans l’aphorisme 300 du Gai Savoir que ce sont les religions qui ont donné une impulsion décisive à la soif de connaissance d’où sont nés les sciences, car elles ont ouvert l’homme à un univers plus vaste que l’univers familier du monde sensible, et elles ont suscité en celui-ci « la faim et la soif de soi-même et à trouver en soi rassasiement et plénitude » ; et de manière hautement significative le texte cite ensuite Prométhée comme caractéristique de cette illusion typiquement religieuse « d’avoir dérobé la lumière », avant de découvrir que ce désir de lumière était « l’œuvre de ses mains ». Mais il n’en reste pas moins que l’impulsion à connaître est venue de la religion. De manière plus générale, s’il n’y a aucune « vérité » dans les religions, selon l’aphorisme 110 de Humain trop humain, la religion est utile, même nécessaire à l’homme en ce qu’elle lui donne la force de vivre 1 ; elle n’est donc pas à mettre du côté des illusions en tous points néfastes, pas non plus du côté de ces erreurs dont on pourrait se passer facilement. Si la religion donne à l’homme la force de vivre et si la religion s’efface, où trouver cette force de vivre ? Est-il sûr même que l’homme moderne la trouvera facilement ?

  • 1 . Cf. aussi Le Gai Savoir § 110.


6L’originalité de la critique nietzschéenne du christianisme vient de ce que Nietzsche considère le christianisme comme une religion essentiellement réactive, c’est-à-dire foncièrement instable et contradictoire. Il est bâti sur des contradictions qui ne peuvent pas ne pas s’effondrer à plus ou moins long terme, et ce terme est désormais arrivé. Si l’on suit les analyses de l’aphorisme 357 du Gai Savoir (et l’on pourrait s’appuyer sur d’autres textes qui conduiraient à des approches sensiblement différentes, mais cohérentes pour l’essentiel avec ce passage), on dira que le christianisme meurt de la contradiction entre sa morale et le dogme. Le croyant est en effet éduqué à l’examen de conscience, à la rigueur d’analyse de ses actes, à la minutie dans l’appréciation des mouvements de son âme par rapport à la volonté de Dieu. De ce point de vue le christianisme apporte une insistance sur la subjectivité qu’ignoraient les Grecs antiques, insistance telle que tout retour aux Grecs est désormais impossible, puisque nous ne parvenons même plus à comprendre leur univers moral et religieux. Mais cette éducation patiemment faite au cours des siècles avive l’honnêteté intellectuelle du croyant, et de manière général de l’Européen formé par le confessionnal et la direction de conscience. Vient un jour où la probité intellectuelle se retourne sur le système de croyance ; celui-ci devient proprement incroyable (foi en une Providence menant l’histoire, en la bonté d’un Dieu qui dispose tout pour le meilleur, donc en l’idée d’une « finalité morale de l’ordre universel », en la Rédemption sacrificielle par le Christ, etc.). Ce qui s’oppose donc au christianisme, ce sont moins nos arguments que notre goût : nous ne pouvons plus, « nous bons Européens héritiers de cette selbstüberwindung la plus durable et la plus courageuse dont l’Europe ait fait preuve », entrer dans le système de croyance proposé par le christianisme. Celui-ci en tant qu’éducateur nous a aliéné à lui-même, et il s’effondre du dedans par une lente érosion dont la Réforme luthérienne, par exemple, fut un moment essentiel et typiquement réactif (Luther croyait redonner vigueur primitive à la foi, mais il contribuait en réalité à sa ruine en désacralisant et le prêtre et la Bible livrée à l’emprise de chacun).
7On pourrait dire en d’autres termes que le christianisme a survalorisé l’homme, l’a mis au centre, lui a fait croire en sa valeur infinie auprès de Dieu au point qu’il était nécessaire que Dieu acceptât le sacrifice de son propre Fils pour sa Rédemption (selon la version paulinienne du christianisme que critique particulièrement Nietzsche). Il importe au plus haut point de bien noter l’accusation centrale, généralement méconnue des interprètes, particulièrement des théologiens chrétiens : elle porte contre cet anthropocentrisme chrétien, contre cette boursouflure orgueilleuse de l’homme à qui l’on fait croire qu’il est plus important qu’il n’est en réalité, puisque, selon les principes essentiels du christianisme, Dieu se tourne vers lui et a souci de son salut. Anthropomorphisme proprement risible, puisque l’homme n’est qu’une fourmi perdue dans le vaste monde, Nietzsche n’a cessé de le répéter dans des textes fulgurants par leur implacable mise en cause de la superbe humaine trop humaine. C’est le christianisme qui, selon Nietzsche, donne une place excessive à l’homme, qui fait sortir l’existence de ses gonds et donc lui donne une importance qu’il n’a pas en réalité. Une telle « présomption » a d’ailleurs pour effet de précipiter dans une morale ascétique impitoyable, puisque le chrétien doit être à hauteur d’une vocation si haute et éliminer de sa vie toute attache passionnelle indigne de lui. Mais il a aussi pour effet à plus long terme de faire prendre conscience à l’homme de sa propre valeur unique. Par contrecoup il fait découvrir que le Dieu chrétien trop bon et trop miséricordieux n’a qu’un visage trop humain, qu’il est l’idéal tout humain sous couvert duquel l’homme s’affirmait et se valorisait ; du coup ce Dieu ne peut plus être reconnu que comme un dieu pitoyable, non comme le divin même. C’est cette logique autodestructrice qui a engendré l’athéisme moderne, c’est donc le Dieu chrétien qui meurt par inconsistance, contradiction et exténuation de soi. En ce sens l’athéisme est le fruit du christianisme lui-même, manifestant au grand jour son essence destructrice et nihiliste.
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