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 Une crise sans fin, comme au Japon ?

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17102010
مُساهمةUne crise sans fin, comme au Japon ?

Une crise sans fin, comme au Japon ?


L’économie du Japon s’effondre : au premier trimestre 2009, le PIB (Produit Intérieur Brut) a baissé de 15,2 % en rythme annuel, selon les chiffres publiés mercredi par le gouvernement. Moins 15 % en rythme annuel ! C’est une catastrophe. Du jamais vu ! A deux semaines des élections européennes, alors que Jean-Claude Trichet affirme que la crise est bientôt finie et que, au contraire, Barack Obama prévient que la crise va être plus longue que prévue, cette information devrait être au cœur des débats sur les politiques qu’il convient de suivre (ou non) au niveau européen. Pourquoi parler du Japon dans un blog consacré à l’Europe ? Parce que, sauf changement radical de nos politiques, l’Europe et l’ensemble des pays occidentaux risquent fort de connaître un scénario à la japonaise.
Une crise sans fin, comme au Japon ? Timbeau-japon.1243174916
“Le pronostic le plus favorable est un scénario à la japonaise” expliquait Xavier Timbeau, directeur des études à l’OFCE, l’institut d’économie de Sciences-Po, dans Le Monde du 7 avril 2009 quand on lui demandait s’il pensait que nous étions bientôt sortis de la crise.

Un scénario à la japonaise, qu’est-ce à dire ?
Au Japon, une énorme bulle financière s’est développée à la fin des années 1980. Le taux de croissance du Japon faisait des jaloux dans tous les pays occidentaux. Le Japon était présenté comme Le Modèle à Suivre. Tous ou presque affirmaient que le Japon allait dominer l’économie du XXIème siècle. Mais la croissance d’une bulle a toujours ses limites et l’économie japonaise qui connaissait 4,5 % de croissance en moyenne dans les années de bulle, connaît depuis la mi-1991 une croissance moyenne de 0,95 %. Même pas 1 % en moyenne !

Alors que le Japon est le pays qui investit le plus dans la recherche ( 3 % du PIB chaque année), alors que la politique monétaire est très accommodante (les taux d’intérêt sont à 0 % : on ne peut pas faire plus !), alors que le gouvernement ne cesse de multiplier les plans de relance et de mettre du béton partout où c’est possible (avec un déficit public de 6 % en moyenne pour financer ces plans de relance), la croissance reste inférieure à 1 % en moyenne.

Certes, il y a eu quelques périodes de rémission : pendant un an ou deux, la croissance remontait à 1 ou 2 % mais elle retombait ensuite à 0 ou moins 0,5 %. Si l’on fait le bilan des 18 années écoulées depuis l’éclatement de la bulle, ce pays qui devait “dominer l’économie du XXIème siècle”, a accumulé une dette publique absolument colossale (200 % du PIB) à cause des plans de relance, et n’a connu que 0,95 % de croissance moyenne.
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La dette publique du Japon depuis 1968

La précarité explose…
Ces 18 années de stagnation économique, ces 18 années passés à « améliorer la compétitivité » et à attendre le retour de la croissance, ont eu évidemment des conséquences sociales très lourdes : au Japon, « 33 % de la population active travaille à temps partiel contre 20 % en 1995, écrivait déjà le correspondant du Monde le 31 mai 2007. Certains économistes considèrent aujourd’hui que le chômage réel pourrait être le double des chiffres officiels. Chez les travailleurs à temps partiel, le salaire annuel moyen ne dépasse pas 6.733 euros par an.». Au pays du soleil levant, avant même qu’éclate la crise des subprimes, un tiers des salariés vivait avec 560 euros par mois !

Crise sociale et crise politique
Et la crise sociale, quand elle dure trop longtemps, débouche sur une crise politique : le Japon, longtemps réputé pour la stabilité de ses gouvernements, vient de connaître deux crises majeures en un an : le 1er septembre 2008, on apprenait la démission du Premier Ministre, Yasuo Fukuda, un an après la démission de son prédécesseur, Shinzo Abe. Et, en mai 2009, huit mois à peine après son arrivée au pouvoir, on commence à parler de la démission du nouveau Premier Ministre, Taro Aso…

En ce printemps 2009, après 18 années passées à attendre le retour de la croissance en misant tout sur le développement de ses exportations, le Japon semble hélas plus proche de l’effondrement que de la reprise : depuis neuf mois, le PIB s’effondre. Comment des millions de salariés qui gagnent moins de 600 euros par mois pourraient-ils soutenir l’économie quand les exportations diminuent ?

Une crise sans fin, comme au Japon ? Figaro.1243179532
« C’est la pire crise depuis la fin de la guerre. L’économie nippone est littéralement ravagée » affirmait Kaoru Yosano, ministre de l’Economie, en février dernier alors que le PIB avait baissé de 12,7 %. Trois mois plus tard, la récession s’est encore aggravée.
Une crise sans fin, comme au Japon ? Croissance-japon-1985-2009.1243174745

Crise économique, crise sociale, crise politique… Allons-nous connaître une évolution à la japonaise ? Certes, la France et l’Europe ont des atouts que n’avait pas le Japon (notre démographie et notre système de protection sociale en particulier) mais si nous ne changeons pas radicalement de politique, il est tout à fait possible que nous connaissions une crise très longue et très douloureuse.

Dans mon dernier billet, j’ai montré que, à cause du chômage et de la précarité, le Japon est un des pays où la part des salaires a le plus baissé. Depuis l’éclatement de la bulle, les dirigeants japonais n’ont eu qu’un souci : améliorer la compétitivité, améliorer l’offre des entreprises pour muscler les exportations. On voit aujourd’hui ce qu’il en coûte.

L’exemple du Japon montre grandeur nature, qu’on ne peut pas toujours remettre à plus tard la question sociale. Attendre la croissance comme on attend Godot, n’est pas la solution. Nos dirigeants seront-ils capables de le comprendre et d’agir très vite pour construire un nouveau contrat social avant que, comme au Japon, la crise n’échappe à leur contrôle ?

Le 20 juin 2007, sur le perron de l’Elysée, Jacques Delors ne cachait pas ses réserves sur les projets européens de Nicolas Sarkozy :

Jacques Delors dit ses réserves sur le traité de l’UE
Reuters 20 juin 2007

Jacques Delors, figure historique de la construction européenne, a redit à Nicolas Sarkozy ses préventions vis-à-vis du Traité constitutionnel.
“J’ai rappelé les points qui avaient déjà appelé de moi des réserves pour le projet de Constitution, même si je l’ai soutenu”, a déclaré l’ancien président de la Commission européenne après un entretien avec le président français.
“Tout d’abord, il faut un protocole social afin de bien montrer qu’on concilie l’efficacité économique, la puissance européenne et la justice sociale vers le haut”, a dit Jacques Delors. “Deuxièmement - je plaide pour ça depuis dix ans - il faut un rééquilibrage entre l’économie et la monnaie à l’intérieur de l’Union économique et monétaire. Ce sont deux points essentiels. “
En 2007, Nicolas Sarkozy a voulu conclure très vite la négociation sur le nouveau Traité sans écouter ceux qui, comme Delors, Merkel, Geremek ou Prodi (Cf mon premier billet) voulaient que l’Europe se donne une ambition plus forte en matière sociale. Deux ans plus tard, c’est devenu un sujet absolument crucial : si nous ne voulons pas connaître une crise sans fin comme le Japon, il n’est pas possible de continuer à compter sur des plans de relance et sur une vague « politique de l’offre ». Il faut prendre le taureau par les cornes et construire très vite un nouveau contrat social, au niveau national comme au niveau européen.

Dans un précédent billet, je montrais que, contrairement au Japon, il y a un pays qui a su concilier la compétitivité économique et le bien-être social. C’est le Danemark. C’est au Danemark que la précarité est la plus faible et que la part des salaires a le moins diminué.

Comment s’appelle le principal artisan du nouveau contrat social danois ? Poul Rasmussen. C’est lui qui a su convaincre le patronat et les syndicats danois de construire un New Deal efficace aussi bien économiquement que socialement.

Poul Rasmussen, un nom à retenir : dans quelques semaines, Poul Rasmussen sera le nouveau président de la Commission européenne si les socialistes gagnent l’élection du 7 juin.

Pierre LARROUTUROU est économiste.
Il vient de publier Crise, la solution interdite. if (GetCookie('wordpressuser') == 'crise-europe') { document.write('
24 mai 2009 Publié Non classé | Lien permanent | Modifier'); } else { document.write('
24 mai 2009 Publié Non classé | Lien permanent | Alerter'); }
24 mai 2009 Publié Non classé | Lien permanent | Alerter

Commentaires


  1. Quel ets le rapport entre un nouveau plan de relance et un nouveau plan social, par exemple pour etre concret, en Fance aujourd’hui en quoi cela se traduirait.
    J e vis aux USA et Obama propose une ouverture a partir d’un renouveau economique ou les US deviendait le fer de lance des technologies liees a la meilleure exploitation des ressources, economie des energies, developpement des energies renouvelable, des vehicules propres, cela est du concret et semble pouvoir creer des emplois et une nouvelle richesse nationale. Le plan social ici veut dire quelque chose du fait de sa faiblesse congenitale, l’education aussi et les grands travaux de meme, routes ,voies ferrees.
    Quoi de concret derriere ” Un nouveau deal social ” , je ne vois pas ce que cela peut vouloir dire pour la France ou bien l’Europe.
    Sur votre analyse d’une crise a la japonaise, j’en suis malheureusement convaincu car nous avons fragilise les fondement meme d’une economie qui devient globale sans les outils pour contre balancer ses exces.Merci pour votre reflexion.
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