[size=32]3/ Les psychothérapies psychanalytiques[/size]
Cet article est consacré à la psychothérapie dynamique au sens d'une pratique permettant une mobilisation active du psychisme. Elle est dite aussi psychanalytique en référence à la psychanalyse, qui en fournit le fondement théorique. Une psychothérapie de ce type ne peut être entreprise qu'après un diagnostic de personnalité permettant d'envisager sa possibilitré et son efficacité.
PLAN
1. Les principes directeurs
Nous allons expliciter les deux principaux moyens qui sont l'utilisation de la capacité de repésentation et le tranfert .
La représentation
Penser, se représenter activement, sont les premiers piliers de la thérapeutique. Nous en distinguerons deux aspects : mentaliser les mécanismes psychiques inconscients et reconnaître ses propres conduites.
Du point de vue pratique, le concept d'inconscient renvoie à l’absence de perception de son propre fonctionnement psychique. L’un des principaux enjeux de la psychothérapie psychanalytique est d’y donner accès en favorisant la mentalisation (la pensée consciente). Il s’agit de forger des représentations conscientes verbales ou imagées, ayant un rapport direct et authentique avec le psychisme. Il ne s'agit donc pas des intellectualisations ou de rationalisations défensives. C’est le seul moyen d'avoir une connaissance et une prise sur les fonctionnements affectivo-économiques et cognitivo-représentationnels du psychisme. À terme, le sujet acquiert une capacité de mentalisation constante et définitive qu'il pourrra mettre en œuvre tout au long de sa vie.
Au-delà des souvenirs et divers contenus mémorisés liés aux circonstances et symptômes, le travail portera sur les processus eux-mêmes. Le sujet prendra ainsi conscience des mécanismes cognitifs non rationnels qui guident ses raisonnements, croyances et conduites. Une partie du travail de mentalisation porte sur les processus cognitivo-représentationnels qui traitent les informations du domaine relationnel et affectif. Ce traitement par des processus cognitifs est contraignant au sens où il produit des enchaînements fixes et stables dont les conclusions s’imposent au sujet. Les élucider et les rendre conscient en les verbalisant permet de desserrer cette contrainte.
Divers aspects de la vie courante, comme les attitudes face à la vie, des tendances relationnelles récurrentes, certains traits de caractère, bien qu'ils puissent l'être facilement, sont méconnus du sujet. Il s'agit d'en favoriser la saisie, comme dans la psychothérapie généraliste de soutien, mais ici, en plus, on y associe une déconstruction des défenses qui empêchent leur reconnaissance (déni, refoulement, dénégation). On aura un bénéfice direct, car le patient se rend compte de son caractère et de ses attitudes et peut ainsi les réguler, mais on aura aussi un bénéfice à long terme, par la mise à plat des défenses, ce qui empêchera la reformation ultérieure des illusions.
Combiné avec la mentalisation des processus psychiques, cette connaissance de soi apporte, dans un premier temps et avant même tout changement profond, une distanciation apaisante et une meilleure connaissance et maîtrise de soi. Il aboutit à se représenter d'une manière utilisable, soi et les événements de la vie relationnelle.
Le transfert
La relation est le second pilier de la thérapeutique. Elle est nommée relation transférentielle dans le cadre thérapeutique. Elle seule apporte l'énergie nécessaire pour remanier les effets négatifs de la psychogenèse.
C'est parce que la personnalité psychique se construit au cours de la vie relationnelle, qu'il est pensable de pouvoir la modifier. C'est ce qui explique que, sur le plan thérapeutique, ce soit dans une relation (transférentielle), que le psychisme peut se remanier. L'évolution, comme on l’a vu, se fait selon des phases structurantes. Ce sont précisément ces mouvements structurants qui, s’ils peuvent être rejoués, vont amener des transformations psychiques notables.
Le transfert est le second pilier de la thérapeutique. En disant cela nous nous séparons des pratiques qui méconnaissent le rôle de la dynamique transférentielle dans la restructuration psychique. Le transfert désigne la relation entre le patient et l’analyste en tant qu'elle est fortement investie et qu'elle prend une forme particulière. C'est le transfert qui instaure une dynamique qui peut être utilisée pour que les interprétations deviennent des faits pouvant avoir une efficacité. Dans le transfert se reproduisent les relations parentales et en particulier celles qui sont restées prégnantes. Le transfert est généralement inconscient : il donne des effets qui sont potentiellement perceptibles mais dont on ne s'aperçoit pas. Le maniement du transfert ne se fait pas seulement par les interventions (dans le transfert) ou les interprétations (du transfert), mais aussi par la gestion du contre-transfert et la mobilisation en soi des modalités relationnelles nécessaires au patient.
Pour qu’un remaniement se fasse il faut éviter la répétition. Les notions de reproduction et de répétition sont deux autres concepts majeurs pour la thérapeutique. Les scénarios relationnels se rejouent dans le transfert engendrant des mouvements émotionnels nombreux et divers. Pour qu'un changement s'opère, il faut une reproduction qui contienne l’amorce d’un changement et évite la pure et simple de répétition. Cette dernière fige un peu plus la modalité répétée, ce qui est contraire à l'enjeu thérapeutique. En particulier, il y a reproduction de mouvements pulsionnels que la règle permet de canaliser et de faire évoluer. Il s’y ajoute les procédés thérapeutiques de réparation. Certaines phases structurantes ratées peuvent être rejouées et une construction thérapeutique s'effectue (parfois avec une création directe d'éléments structurants totalement absents). De nouveaux schèmes psychiques relationnels se mettent en place. En effet, nous considérons que dans la plupart des cas, il n’y a pas de reconstruction spontanée après la déconstruction analytique et qu’il donc faut nécessairement procéder à une construction active de nouveaux schèmes.
2. Le cadre
Par le terme de cadre, on désigne les conditions permettant une mobilisation du psychisme en toute sécurité. Ce dispositif instaure un lieu où le fonctionnement psychique apparaît et peut être mobilisé. L'existence d'un cadre et son respect conditionnent la possibilité de la pratique psychanalytique. Abstinence, neutralité, pérennité, confidentialité, sont les mots-clés de la définition du cadre.
La règle d'abstinence consiste dans l'interdiction de toute relation agie sexuelle, amoureuse ou agressive entre le thérapeute et son patient. L'abstinence reproduit la loi fondamentale (interdit de l'inceste et du meurtre) qui est fondatrice pour la structuration psychique. Cette règle permet le déroulement pratique en endiguant les passages à l’acte qui le rendraient impossible. La raison de l’abstinence est très simple : la satisfaction pulsionnelle en s’inscrivant dans la répétition bloquerait l’évolution thérapeutique cherchée. L’interdit canalise les poussées pulsionnelles et permet leur élaboration et leur transformation. Il ne porte pas sur la poussée pulsionnelle, bien au contraire, puisqu’elle doit se produire, mais sur sa satisfaction agie. Une telle action bloquerait d’autant plus l’évolution qu’elle serait une transgression et ferait perdre le rôle structurant pour le psychisme de l’ordonnancement légal.
La neutralité implique l'absence d'intervention directe dans la vie du patient de la part du psychanalyste. La neutralité impose une attitude réservée de la part de l'analyste, mais contrairement à ce que l'on imagine parfois, elle n'entraîne ni hauteur, ni froideur. En effet, elle doit permettre de ne pas être pris dans le fonctionnement psychique du patient, de façon à permettre une dynamique évolutive. Elle nécessite, pour être maintenue, une attitude appropriée qui est active et non abstentionniste. Par la neutralité, la psychanalyse diffère des autres techniques. Il n’y a pas de conseils ou d’intervention directe sur la meilleure manière de diriger sa vie. Elle respecte la liberté de choix et s’oppose en cela à toutes les techniques de manipulation du comportement qu’elles soient ré éducatives, comportementalistes ou systémiques.
La confidentialité est également indispensable pour permettre une libre expression. Elle fait partie de la neutralité. Le secret médical est garanti par la loi. Le secret organise la relation en mettant à l’abri des normes sociales moralisantes et il permet de se situer dans un espace différent du champ social habituel. Il indique aussi que l’analyste est astreint à la loi et doit donc être absolu. En cela la pratique s’inscrit fermement dans le symbolique mais absolument pas dans le normatif. Cette rupture avec le normatif est importante car on sait qu’une partie de la pathologie provient précisément d’un détournement abusif des règles d’origine familiale ou sociale.
La pérennité, c'est le fait de maintenir le cadre constant. Il s'agit d'offrir au patient tant sur le plan du lieu que de l'accueil quelque chose de durable stable et solide. C’est la condition d’une alliance thérapeutique qui s’installe dans la sécurité et la liberté. Une sécurité de fond est nécessaire à un travail analytique, elle correspond à la sécurité intérieure de base qui autorise un développement psychique heureux. C’est elle qui permet au transfert de base de se maintenir et d’évoluer vers sa forme finale libérée de toute influence parentale.
Note : Les pratiques qui ne respectent pas ce cadre, ne peuvent être des psychothérapies, car les relations concrètes arrêtent la dynamique de la cure et induise une répétition. La maîtrise du transfert et son orientation thérapeutique rendent indispensable un cadre strict. Rappelons que le psychisme en tant qu’il est pulsionnel, peut entraîner des manifestations violentes ce qui exige des précautions. Le cadre découle directement de la constitution du psychime au sens où il permet une modification prudente et raisonnée de celui-ci.
الجمعة فبراير 19, 2016 10:09 am من طرف جنون