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 Les qualités sensibles : clé du vivant

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فدوى
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فدوى


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18022016
مُساهمةLes qualités sensibles : clé du vivant

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Les qualités sensibles : clé du vivant
 
La sensiblité est probablement une capacité opérative irréductible à toute interaction physico-chimique et en même temps compatible avec les lois physiques, contrairement à ce qu’affirme le philosophe des sciences Daniel Dennett. Elle constitue un opérateur essentiel à la dynamique des structures vivantes et des processus cognitifs.
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TROUBLÉ Michel. Les qualités sensibles, clé du vivant. 2015. Philosophie, science et société, 2015. [en ligne] http://www.philosciences.com
 

Des robots vivants ?

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Nombreux sont les chercheurs qui soutiennent que la vie artificielle est pour demain. C’est ainsi que des robots humanoïdes seraient bientôt dotés de capacités semblables à celles des êtres humains. À notre image, ces robots, autonomes, s’adapteraient aux contraintes du moment en inventant de nouvelles stratégies. Ils seraient conscients et auraient des émotions. Afin d’assurer leur pérennité, leur "vie", ces robots seraient capables de décider intelligemment des actions à entreprendre en réponse aux stimulations utiles ou nuisibles induites par l’infinie diversité des objets du monde qu’ils perçoivent. Des robots sont autonomes dans la mesure où ils ne reçoivent aucune assistance humaine en ce qui concerne le choix des solutions possibles en matière des actions qu’ils doivent effectuer pour assurer la durabilité de leur structure et des fonctionnalités qui y sont attachées. La compréhension des mécanismes de décision que doivent posséder ces robots pour être autonomes, artificiellement vivants, est donc essentielle. Les techniques de la robotique et de l’intelligence artificielle (réseau de neurones, logique floue, algorithmes génétiques,..) permettent justement d’effectuer une approche formelle de la logique de ces mécanismes, approche qui a cette propriété essentielle d’être indifférente à la nature des éléments qui constituent ces mécanismes.
Ainsi, pour que soit assurée la durabilité d’un robot artificiellement vivant, son analyse fonctionnelle montre que pour chaque objet du monde, aux propriétés infiniment variées, que celui-ci perçoit à l’aide de différents capteurs, il faut que son contrôleur (son cerveau) sache choisir adéquatement les actions à accomplir. Par exemple, un robot d’exploration terrestre sensible à toute élévation de température qui peut le détruire doit, pour être artificiellement vivant, effectuer impérativement les actions suivantes : fuir de la lave en fusion, fuir un feu de forêt, fuir une nappe de pétrole enflammée,... En d’autres termes, le contrôleur de ce robot autonome doit être capable de créer une catégorie cohérente des objets perçus, en l’occurrence la catégorie {fuir tous les objets chauds}.
La capacité de créer des catégories cohérentes des objets perçus est une définition opérationnelle de la vie artificielle et par là même celle des êtres vivants qui doivent en effet, eux aussi, essentiellement assurer leur pérennité, la continuité de leur existence, au regard des contraintes du milieu qui ne peuvent que les détruire. Du point de vue du mécanisme de décision dont le contrôleur du robot doit être muni, cela implique que les différents objets perçus par le système soient discernables les uns des autres, sinon ces décisions ne pourraient logiquement qu’être prises au hasard ce qui est antinomique de la capacité attendue de former des catégories cohérentes. 
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Le problème qui apparit est le suivant : 
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Que les objets du monde perçus par les capteurs du robot soient physiquement discernables afin que celui-ci puisse, par exemple, fuir systématiquement les objets chauds et aller au contraire vers des sources d’énergie supposées froides, semble aller naturellement de soi. Mais cela pose en réalité un problème théorique majeur.
En s’appuyant en effet sur la théorie formelle de la reconnaissance des formes qui porte sur l’identification des formes d’objets à partir de leurs paramètres caractéristiques afin de prendre des décisions dépendant des catégories attribuées à ces formes (Pattern recognition, human and mechanical - Satosi Watanabe, John Wiley & Son), on peut démontrer le trait essentiel suivant : les différentes formes des objets qui sont perçues par un système physique (ou physico-chimique) lors d’un processus de mesure, sont physiquement indiscernables par sa partie opérative ou actionneur, car ces formes partagent, également, le même nombre de propriétés ou descripteurs.
Le connexionnisme
Et pourtant, nombreux sont les chercheurs dans les domaines de la robotique et de l’intelligence artificielle, pour lesquels il est définitivement acquis qu’il existe des ‘réseaux connexionnistes’ (réseaux de neurones artificiels ou formels) à auto-apprentissage qui sont donc, par définition même du processus d’apprentissage, capables d’auto-classer dans une même catégorie les différents formes d’objets perçues par le robot. Autrement dit, de créer des catégories cohérentes telle que {fuir tous les objets chauds} qui rendraient un robot autonome. Ainsi, les réseaux de neurones de type ‘cartes auto-organisatrices’ sont très souvent évoqués par les chercheurs comme le neurobiologiste Gerald Edelman (Biologie de la conscience - Odile Jacob) pour justifier l’existence d’auto-organisations c’est-à-dire la création spontanée de catégories cohérentes. En tant que ‘cartes auto-organisatrices’, le fonctionnement des réseaux du physicien Teuvo Kohonen (Algorithme de Kohonen : classification et analyse exploratoire des données - CNRS Samos Université Paris1) sont particulièrement révélateurs en la matière. N’affirme-t-on pas en effet qu’ils sont capables, sans l'aide d'un opérateur, de regrouper spontanément dans trois zones distinctes de leur organe de sortie (un écran vidéo, par exemple) chacun des trois éléments fondateurs de phrases courtes (sujet, verbe, complément) qui sont successivement présentées à son organe d'entrée (une caméra vidéo, par exemple).
Mais en réalité, c’est un technicien, un sujet humain, et non pas un dispositif physique (mécanique, électronique), qui, en observant l’écran de sortie du réseau, déclare qu’il existe des regroupements distincts des éléments sujet, verbe et complément dans trois zones différentes de cet écran alors qu’en réalité ces éléments sont physiquement indiscernables eu égard le principe d’indiscernabilité (1). Ces trois groupes perçus comme étant distincts par l’opérateur peuvent être ensuite, si besoin est, matérialisés par celui-ci grâce à un quelconque moyen physique (mécanique, électronique) ; mais il n’empêche que ces groupes n’ont pas d’existence physique intrinsèque en tant que sources d’actions. Cette hypothèse forte, jamais discutée, que des réseaux connexionnistes peuvent s’auto-organiser autrement dit créer des catégories cohérentes en l’absence de tout opérateur est donc totalement infondée.
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Sélection évolutive

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Pour d’autres chercheurs, une façon pragmatique de rendre un robot autonome ce n’est pas d’analyser la nature de tous les évènements, en nombre infini, auxquels un robot solitaire peut être confronté, mais c’est de s’inspirer du mécanisme mis en œuvre dans la ‘sélection naturelle darwinienne’ qui explique, dit-on, l’émergence et l’évolution des êtres vivants, des structures qui sont éminemment autonomes. C’est ce qu’il est convenu d’appeler la ‘robotique évolutionniste’. Rappelons que la ‘sélection évolutive darwinienne’ est basée sur la conservation, grâce à des duplications fonctionnelles successives, des actions pérennisantes acquises fortuitement par des structures vivantes au cours d’une multitude de générations successives. C’est donc le processus de reproduction ‘mère’→‘fils’ des caractères acquis fortuitement par une ‘mère’ qui fonde ce mécanisme de sélection évolutive darwinienne. Mais ce qu’aucun chercheur n’a semble-t-il vu jusqu’alors, ni même le physicien von Neumann avec sa théorie des systèmes auto-reproducteurs, c’est que le processus de reproduction fonctionnel, celui-là même qui permet la création spontanée de catégorisations cohérentes (ou fonctions du vivant), est logiquement interdit en raison du principe d’indiscernabilité. En effet, les domaines mémoires spécifiques du système cible (le ‘fils’) qui doit recevoir les informations {objets Oi perçus  actions Ai pérennisantes} acquises fortuitement par le système source (la ‘mère’) sont, eu égard le ‘principe d’indiscernabilité’, strictement indiscernables du point de vue du système source. À l’instar des différents objets chauds perçus par le robot d’exploration qui sont indiscernables par son contrôleur.
À ce titre, la recopie d’informations fonctionnelles telle que {si objet chaud Oi  fuir} entre la ‘mère’ et le ‘fils’ ne peut donc être qu’aléatoire – la fonction recopiée est indifféremment {si objet chaud Oi  fuir} ou {si objet chaud Oi  avancer}. Ce qui, par là-même, infirme le processus de sélection évolutive en tant que mécanisme permettant la création incrémentale de catégories cohérentes, de fonctions, qui fonderait l’autonomie du robot. En effet, le caractère fortuit, aléatoire, des actions fuir ou avancer qu’effectue le robot ne peut pas être alors compensé statistiquement par la création de plusieurs ‘fils’ qui seraient porteurs des mêmes actions pérennisantes (probabilité résultante : 1/2x2=1) puisque la transmission des informations fonctionnelles de la ‘mère’ vers ses ‘fils’ ne peut être qu’aléatoire. Le processus de ‘sélection évolutive (darwinienne)’ ne serait en définitive qu’un mécanisme efficient pour sélectionner des systèmes matériels déjà autonomes, auto-organisés, qui seraient les mieux adaptés pour survivre aux contraintes environnementales du milieu. À ce titre, ce mécanisme ne ferait que créer des formes nouvelles à partir de celles qui seraient déjà vivantes. 
De récentes expérimentations de robotique évolutionniste portant sur des générations successives de robots, semblent cependant montrer qu’un certain nombre de ces robots peuvent spontanément s’auto-organiser, c'est-à-dire devenir autonomes, alors que la chose est impossible pour des robots solitaires eu égard au principe d’indiscernabilité. Mais si certains robots sont effectivement devenus autonomes, sachant par exemple s’éloigner de toutes les sources de chaleur qui pourraient les détruire, c’est parce que leurs concepteurs, insuffisamment vigilants, ont, en tant qu'êtres vivants, injecté leur propre capacité en matière d’autonomie. Ils ont ainsi, inconsciemment, préparé les divers mécanismes de recopie fonctionnelle ‘mère’→‘fils’ qui sont nécessaires à la formation de catégories cohérentes (fonctions) dans le mécanisme de la robotique évolutionniste, en sélectionnant les différents domaines mémoires autrement indiscernables (en l’occurrence, il s’agit des différents ‘poids synaptiques’ des réseaux de neurones constituant le contrôleur du robot). Ce nécessaire contrôle du processus évolutionniste par un sujet est à rapprocher de celui des réseaux connexionnistes de Kohonen où nous avons montré que seul un technicien pouvait regrouper, pour actions, des images sur un écran.
En conclusion, ni le connexionnisme ni le mécanisme de sélection évolutive ne sont des réponses possibles à la question de l’autocréation de catégories cohérentes. Un robot qui serait construit à partir des seules mises en relations (mécaniques, électroniques, informatiques, chimiques,...) de composants techniques gérés par les lois physiques, ne peut donc pas être autonome, artificiellement vivant, dans un environnement protéiforme, infiniment changeant.
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(1) Note l'éditeur : si ce principe est vérifié
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