Paul Smolensky et l'unification esprit/cerveau
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Paul Smolensky est professeur de sciences cognitives à l'université Johns-Hopkins.Il a proposé une théorie unificatrice de l'esprit et du cerveau en considérant que la théorie connexionniste et la théorie symbolique pouvaient être les niveaux de descriptions concernant respectivement le micro-niveau et le macro-niveaux de la même chose : l'esprit/cerveau.
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Le projet de Smolensky
Cet auteur a lancé un programme de recherche dans lequel la théorie connexionniste et la théorie symbolique pourraient collaborer pour former une approche multi-niveau de l'esprit / cerveau. Son originalité est de l'avoir fait à un moment où le connexionnisme et la théorie symbolique étaient en opposition. Il a ainsi défini un nouveau domaine de recherche, celui de "the Integrated Connectionist/Symbolic Cognitive Architecture", traduisible par l'Architecture Cognitive intégrant symbolique et connexionnisme.
Dans l'architecture ICS, le substrat connectionniste ne permet pas une simple implémentation du symbolique, il fournit le traitement "subsymbolique" dont il dépendent les aspect élevés de la cognition et du langage. Selon Smolensky, il y a un traitement connexionniste du calcul symbolique, et sans l'un il n'y a pas l'autre. C'est là le point d'identité. Ensuite, la théorie connexionniste micro-niveau peut être décrite par une théorie macro-niveau symbolique. L'approche connexionniste fournit l'interface.
En 1986 , Smolensky a montré que l'analyse mathématique des propriétés de haut niveau du système connexionniste permettait de faire des liens avec la théorie symbolique : en utilisant le calcul vectoriel, le modèle d'activation de neurones peut être identifié a certains aspects du niveau de description symbolique. On peut établir un isomorphisme entre les propriétés formelles de haut niveau de certains réseaux connexionnistes distribués et le calcul symbolique.
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Les problèmes
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Smolensky part sur une bonne voie pour affronter le dualisme et tentant une jonction entre le connexionnisme en le calcul symbolique, puis en l'étendant à d'autre aspects comme la linguistique. Les problèmes ressurgissent l'orsqu'il s'agit d'appliquer cette tactique issue des artefacts (systèmes connectionnistes, intelligence artificielle) à l'homme et de résoudre le dilemme esprit/corps ou esprit/cerveau.
L'approche connexionniste fournit l'interface pour penser l'interaction entre le neural et le mental. Cette hypothèse intéressante offre plusieurs difficultés. Pour les décrire, on peut partir du fait que nous sommes, là encore, dans l'analogie homme-machine qui hante les recherches depuis Leibniz, prend corps avec Boole, et imprègne le cognitivisme. Certes, Smolensky en donne une version améliorée par rapport au computationnisme, mais elle reste problématique. Les connaissances connexionnistes concernent des artefact. Appliquer à l'homme ce qui est valable pour les machines est il possible ?
Dans la mesure où le connexionnisme fait interface, le mental fait l'objet d'une macro description, ce qui acceptable puisque le mental est un aspect phénoménal. Mais, dans cette conception, le niveau représentationnel disparaît en tant que niveau autonome. Il est en effet inutile d'en poser l'existence. Mais est-ce souhaitable de procéder ainsi ? Une discussion s'impose.
L'hypothèse de Smolensky fait appel uniquement à un niveau sub-symbolique de type connexionniste (à réviser pour l'adapter au neurologique). Son choix est probablement une question de style et d'orientation générale de la pensée. Paul Smolensky comme la plupart des cognitiviste est plutôt réductionniste et orienté vers l'étude des connaissances simples.
Voir la
conférence à ce sujet sur Youtube où Paul Smolensky expose sa tentative pour formaliser les relations entre esprit et cerveau dans le domaine grammatical. Le modèle proposé par l'auteur est l'un des plus élaboré et des plus convainquant du cognitivisme.
Dans
Philosophie science et société on trouvera développée par P. Juignet une argumentation qui met en doute la pertinence, non du procédé, mais de sa conclusion. L'argument opposé serait que le passage supposé de la micro-structure à la macro-structure symbolique s'accompagne probablement d'une autonomisation de cette dernière (voir les articles dans la rubrique
Psychologie, cognition, représentation).
Bibliographie :
Smolensky, Paul. 1986. Information processing in dynamical systems: Foundations of harmony theory. In Parallel distributed processing: Explorations in the microstructure of cognition. Vol. 1, Foundations, David E. Rumelhart, James L. McClelland and the PDP Research Group, 194-281. MIT Press.
Smolensky, Paul, and Géraldine Legendre. 2005. The harmonic mind: From neural computation to Optimality-Theoretic grammar. Vol 1: Cognitive architecture. Vol 2: Linguistic and philosophical implications. MIT Press.
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