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 Le mouvement des modèles en histoire et philosophie des neurosciences

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04122010
مُساهمةLe mouvement des modèles en histoire et philosophie des neurosciences

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  • 1 . B. Russell, Mysticism and Logic, Pelican A. Harmondsworth, 1952, p. 109.

« Cette possibilité d’approximations successives à la vérité est plus que tout, la source des triomphes de la science et si l’on pouvait la transférer à la philosophie, on assurerait un progrès méthodologique dont il est impossible d’exagérer l’importance » 1.



  • 2 . Marc Perelman, Les Intellectuels et le Football. Montée de tous les maux et recul de la pensée, Pa(...)

1Le succès des débats entre intellectuels sur le sens de la citoyenneté, sur les finalités de l’éducation ou encore sur la mondialisation n’est que l’arbre qui cache la forêt. Les philosophes patentés et reconnus par les médias ne sont plus ceux qui écriraient une œuvre esthétique, phénoménologique, politique ou moraliste. Tout occupés au football ou à la gestion de leur postérité 2, les philosophes ont délaissé, à part d’heureuses exceptions, les débats qui les occupaient encore dans les années 70 : la nature humaine, l’animal, la race, l’inné et l’acquis, l’intelligence, le langage, la perception, les émotions, la sexualité... sont devenus des objets à part entière des neuroscientifiques. Certains neuroscientifiques sont devenus par cette naturalisation des objets traditionnels de la philosophie et de la psychologie, des neuroscientistes.

2Pour lutter contre cette naturalisation de la philosophie par les neuroscientistes :
31) Reconstitution de l’histoire des neurosciences
42) Analyses des réécritures des neurosciences
53) Établissement des rapports Neurosciences-Sciences humaines
6Par un lent travail, tant historique que philosophique, l’épistémologue doit réaliser, afin de distinguer le bon grain de l’ivraie neuroscientistes :
71) Une histoire des modèles neuroscientifiques utilisés par les sciences humaines : l’étude du cerveau a produit des modélisations contradictoires entre les neurosciences cognitives, le cognitivisme et le connexionisme au point que chaque science humaine utilise ses connaissances afin de démontrer une thèse. Il s’agit de délimiter chaque thèse au sein de chaque science humaine à propos d’objets particuliers comme la folie, la représentation, le langage, l’apprentissage.
82) Une critique de l’unification des sciences par le naturalisme cérébral. Le naturalisme cérébral produit des positions réductionnistes et seront étudiés notamment les dérives naturalistes concernant le comportement, les pathologies mentales, les opérations mentales.
93) Une histoire des réductions en neurosciences et génétiques : l’apparition d’une nouvelle discipline, la neurogénétique, produit une synthèse entre la neurobiologie du développement et la biologie moléculaire. Il s’agit ici d’étudier la recomposition de ce champ.
104) Une philosophie du corps vivant. Face à cette réduction, il convient au philosophe des sciences de proposer une alternative qui restaure les conditions d’un dialogue entre la phénoménologie, les sciences cognitives et la biologie.
11Ces différents programmes de recherches en cours sont ici présentés afin d’illustrer, il est vrai par le seul exemple de l’histoire du cerveau, ce que pourrait être plus généralement une étude des mouvements des modèles en histoire et philosophie des sciences. 1. Écrire l’histoire du cerveau selon quel point de vue ?


12L’histoire des neurosciences devient peu à peu une discipline à part entière, en France du moins, car dans le monde anglo-saxon la philosophie de l’esprit et l’expansion des sciences de la cognition ont toujours été accompagnés d’une formation et d’une production en histoire des neurosciences, au point que des collections de revues et de livres y sont consacrés. Mais derrière cette tradition critique et épistémologique, se cachent différents types d’écriture de l’histoire des neurosciences :

  • 3 . The History of Neuroscience Autobiography, Ed. Larry R. Squire, tome I, 1996, p. IX.

13– L’autobiographie neuroscientifique propose moins une légitimation d’une découverte neuroscientifique par son auteur, qu’une mise en continuité du parcours d’un chercheur. The History of Neuroscience in Autobiography, édité par Larry R. Squire pour le compte de la Society for Neurosciences, a pour but de rassembler ceux qui seraient « in fact pionners of neurosciences » 3. Mais à la différence de l’ouvrage de 1975, dirigé par F. Worden, J. Swazey et G. Adelman qui organisait les 30 contributions des leaders de leur discipline en les mettant en regard avec les travaux engagés dans le passé, l’écriture strictement autobiographique décrit les conditions de la formation et de l’orientation professionnelle des neuroscientifiques. L’influence des écoles européennes sur la formation, puis les modes d’insertion dans les laboratoires américains, le rôle des maîtres, les déplacements de disciplines afin de créer de nouveaux domaines de recherche... autant d’informations qui ne remplacent sans doute pas une sociologie les neurosciences mais qui nous invitent à relier la production scientifique avec ses conditions de possibilité.

14– Les monographies neuroscientifiques écrites par le neuroscientifique lui-même ont connu, depuis le succès de L’Homme neuronal,une inflation éditoriale mais dont l’intérêt aura permis de faire émerger, non seulement une vulgarisation neuroscientifique, mais des modélisations de domaines entiers de l’histoire des neurosciences. Ainsi les monographies neuroscientifiques obligent le praticien à élaborer l’histoire du domaine dont il est issu, double formation de l’historien des neurosciences à la fois chercheur fondamental et historien. Cette histoire est-elle pour autant objective ? Ne risque-t-on pas de légitimer ses propres découvertes en reconstruisant une histoire modélocentriste comme la survalorisation de telle technique sur telle autre. mais qui pourrait assurer l’histoire exacte d’un domaine par la seule écriture monographique neuroscientifique ou le croisement de ces écritures. Sans compter sur les différents niveaux d’écriture monographique : revues neuroscientifiques, ouvrages spécialisés, ouvrages et articles de vulgarisation.
15– L’histoire clinique du cerveau, à la suite des travaux de H. Hecaen, G. Lanteri-Laura, Gladys Swain, J. L. Signoret, J. Gasser, Marcel Gauchet, H. Hoppenheim-Gluckman..., produit une écriture sur la genèse des pathologies cérébrales qui aboutit à une réflexion épistémologique sur la délimitations des champs. Le rôle des revues de psychiatrie est à souligner : elles publient des modélisations de la clinique selon une psychopathologie cognitive. L’histoire clinique du cerveau bouleverse aujourd’hui la définition des frontières traditionnelles en repensant les pathologies mentales, soit selon un modèle déficitaire naturaliste, soit selon un modèle opératoire cognitiviste, soit en modélisant une théorie de l’esprit à partir des protocoles conversationnels et interactionnels avec les autistes ou encore les schizophrènes. Les cérébraux-lésés ou les split-brain... sont dans l’histoire du cerveau la clinique de l’épistémologie à l’occasion de l’élaboration des modèles pathologiques.
16– L’histoire des concepts neuroscientifiques, à l’instar de la célèbre collection d’Oxford University Press, trouve dans des travaux comme ceux de J.-C. Dupont..., une méthodologie distincte d’une simple histoire des techniques. Ces techniques (cliniques, électrophysiologique...) produisent de nouveaux concepts au fur et à mesure de la modélisation de ce qui a été découvert par ces nouvelles techniques. Au-delà de ce rapport technique-conceptualisation, l’intérêt de l’histoire des concepts neuroscientifiques est à la fois la genèse du concept et les déplacements de son sens d’origine à son sens actuel, de son domaine d’origine à un nouveau domaine de synthèse. Plutôt qu’une évolution des concepts neuroscientifiques, les travaux montrent l’historicité du concret, sa délimitation de période, son intensité épistémologique.
17– Histoire des modèles philosophiques, tant en neurosciences que dans les sciences de la cognition (J. N. Missa, J. M. Roy), aura renouvelé le débat sur les rapports entre esprit et cerveau en produisant des théories de l’esprit mais surtout des intersections fécondes entre phénoménologie et sciences de la cognition, biologie et psychologie cognitive... Intersection qui prend en compte le cerveau, un mouvement la mise en action de l’esprit, l’état mental dans sa dimension vécue et dans sa matérialité cognitive. L’émergence de nouveaux modèles philosophiques, tant selon une réduction (la neurophilosophie) que selon un refondation (comme la phénoménologie biologique).

  • 4 . C. Debru, Neurophilosophie du rêve, Paris, Hermann, 1990.

18– La Modélisation épistémologique des neurosciences (engagée par Claude Debru dans La Neurophilosophie du rêve 4, recherchée par A. Berthoz au sein du Collège de France, ou développée par Marc Jeannerod à Lyon), d’un dialogue et d’un apport réciproque entre neurosciences et philosophie. La modélisation épistémologique produit un travail commun, une communauté théorique et institutionnelle mais de là produit aussi une connexion épistémologique entre disciplines différentes, non seulement neurosciences-sciences humaines, mais entre des modèles communs comme la réflexion sur le concept de l’individuation.
2. Aller du paradigme au mouvement des modèles


19La réflexion sur le mouvement des modèles dans les sciences n’est pas nouvelle. Elle est au centre de l’épistémologie contemporaine depuis que Thomas Kuhn a introduit le terme de révolution. Par ce terme Thomas Kuhn (1922-1996) désignait en 1957 5 de quelle façon « les conditions extérieures à la science peuvent influer sur l’éventail des possibilités offertes à celui qui cherche à mettre fin à une crise en proposant telle ou telle réforme révolutionnaire » 6. La réforme révolutionnaire s’inscrivait dans l’opposition entre la méthode internaliste et la méthode externaliste.

  • 5 . T. S. Kuhn, The Copernican revolution : Planetary astronomy in the development of western thought,(...)
  • 6 . T. S. Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques [1962], Paris, G. F., 1983.



  • 7 . Sur ce point voir G. Canguilhem, Le Rôle de l’épistémologie dans l’historiographie scientifique co(...)
  • 8 . T. S. Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques…, op. cit., p. 32.

20La notion de modèle prend plusieurs sens dans l’épistémologie et l’histoire des sciences. Confondue avec celle de paradigme, la notion de modèle constitue la structure d’un savoir en science ; en effet le paradigme pour Kuhn devait, ce en quoi il devait remplacer pour son interprétation de Bachelard la notion de normalité 7, réunir deux caractéristiques : synthétique, réunir les connaissances au sein d’une conception et prospectif, organiser désormais les recherches scientifiques. En faisant des transformations successives des paradigmes le sens de toute révolution scientifique, car « le passage d’un paradigme à un autre par l’intermédiaire d’une révolution est le modèle normal du développement d’une science adulte » 8, Th. Kuhn met la priorité sur les paradigmes sans préciser la nature et l’intensité des mouvements de modèles : il décrit plutôt les modalités de la crise et sa résorption, nous laissant ainsi le champ ouvert à la qualification de ces mouvements spécifiques qui occasionnent et développent les révolutions scientifiques. Il analyse seulement les causes des révolutions scientifiques dans l’adoption de nouveaux instruments, dans la transformation de leurs visions du monde et dans l’influence des découvertes scientifiques sur leur représentation.


  • 9 . E. Fox Keller, Le Rôle des métaphores dans les progrès de la biologie [1995], Les Empêcheurs de pe(...)
  • 10 . H. Rickert, Science de la culture et science de la nature [1926], Paris, Gallimard, 1997, p. 143-1(...)
  • 11 . E. O. Wilson, [1998], 2000, p. 15-16.

21En mettant l’accent sur le destin du modèle lui-même, tant dans sa structuration interne que dans ses mouvements de sa discipline d’origine vers d’autres disciplines, il s’agit de l’étudier dans le contexte d’une histoire de l’interdisciplinarité. Comme le fait remarquer Evelyn Fox Keller, il est vrai dans le cadre d’une étude sur l’efficacité scientifique des métaphores dans les sciences naturelles 9, les risques et les potentialités de la transgression disciplinaire, la circulation interdisciplinaire et l’objet des échanges et incursions transdisciplinaires ainsi que les tentatives régulières d’annexion. Cet intérêt pour ce que Heinrich Rickert appelle « les domaines intermédiaires » 10 ouvre la perspective d’une étude des relations entre les sciences de la vie et les sciences humaines, confondues aujourd’hui, pour les neuroscientistes, dans ce qui seraient les sciences de l’homme. Le passage de la science unifiée à l’unicité du savoir, tel qu’Edward O. Wilson le souhaite à travers le concept de consilience 11 est précisément le contraire de notre recherche : conséquence d’une méthodologie inductive, la recherche de la consilience entre les sciences et les sciences humaines ne souhaite pas maintenir de frontières entres elles mais voudrait les dissoudre dans des cercles concentriques.

22À l’inverse, le mouvement des modèles admet cette séparation méthodologique entre ces deux types de scientificités afin d’observer les mouvements de modèles des unes dans les autres.

  • 12 . P. Mengal, « La constitution de la psychologie comme domaine du savoir aux xive et xviie siècles »(...)
  • 13 . B. Andrieu, La Neurophilosophie, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1998.

23L’enjeu est ici de définir les conditions d’étude de la mobilité des modèles, sorte de mobilogie épistémologique en privilégiant plus particulièrement notre objet d’étude privilégié, le cerveau : du point de vue de ses élaborations originelles dans la philosophie, la psychologie 12, la physiologie, la médecine et la psychiatrie ; puis dans les déplacements de ces disciplines originelles vers de nouvelles disciplines comme la neuropsychiatrie, la psychiatrie biologique, les neurosciences cognitives. L’effet de ce déplacement participe de la naturalisation de la personne ; mais aussi produit de nouvelle synthèse au sein d’une science unifiée comme La Neurophilosophie 13. Au déplacement des modèles correspond une nouvelle description de la personne humaine à partir de ce qui serait ses éléments naturels.

24Mais le thème de la révolution épistémologique présente aussi l’avantage de décrire à la fois la continuité et la discontinuité du modèle : continuité de la formation jusqu’au fonctionnement interne du modèle, ce que l’internalisme en histoire des sciences décrit de manière exhaustive. Les scientifiques se constituent eux-mêmes en historiens de leurs propres disciplines selon le principe qu’il faudrait être à la fois partie prise et partie prenante pour établir une histoire objective du modèle. De leur côté la double formation des philosophes leur permettrait d’établir l’histoire des modèles scientifiques au sein d’une réflexion sur les schèmes et les processus de pensée.
25Aussi l’échec de l’externalisme est patent pour les partisans de l’internalisme et réciproquement. Car la sociologie des sciences réduit le fonctionnement des sciences à une succession d’idéologies, aux enjeux mesurés par la scientométrie, l’histoire des institutions et des financements de la recherche. Pourtant l’externalisme a renouvelé l’analyse des modèles en distinguant la légitimation du modèle à l’intérieur de la production scientifique de la discipline de la légitimité du modèle à l’extérieur dans le monde scientifique.
26La révolution épistémologique, synthétisant ainsi l’internalisme et l’externalisme, a voulu renouveler la lecture cristallisée des sciences en dégageant la dynamique et le mouvement du modèle à l’intérieur même de chaque discipline. Le modèle scientifique n’est ni fixé à l’intérieur de la science qui l’a constitué, ni définitivement fixé dans l’histoire des modèles, ni sans modifications par rapport aux effets des modèles par rapport aux autres disciplines (comme la réception critique, ou encore la concurrence des modèles). La révolution épistémologique a instauré une dynamique des modèles. 3. Étudier le mouvement des modèles dans l’histoire du cerveau


27L’histoire du cerveau est un des domaines privilégiés pour étudier la manière dont un ou plusieurs modèles scientifiques ont été déplacés du champ scientifique à celui des sciences de l’homme.

  • 14 . A. F. Schmidt, L’Âge de l’épistémologie. Science, Ingénierie, Éthique, Paris, Éd. Kimé, 1998, p. 1(...)
  • 15 . P. S. Churchland, Neurophilosophie [1986], Paris, PUF, 1999.
  • 16 . B. Andrieu, La Neurophilosophie, op. cit.

28Mais si la physique, la mathématique et la logique sont présentées comme les fondements de l’épistémologie, la réflexion sur les théories ouvrait pour l’épistémologie « la possibilité de s’étendre à des domaines distincts de ceux de la physique et des mathématiques » 14. Ainsi l’extension épistémologique du concept de modèle trouve sa raison dans son usage réflexif et philosophique, car l’usage scientifique du concept de modèle est au service de la modélisation de l’expérience tant dans sa formalisation par la loi que dans la systématisation théorique. Or le modèle philosophique, à l’inverse du modèle scientifique, utilise l’épistémologie pour construire un matériau réflexif qui s’éloigne du strict donné scientifique. Les neurosciences n’évitent pas cette distinction entre modèle scientifique et modèle philosophique en produisant des épistémologies séparées comme l’attestent les travaux d’histoire des neurosciences rédigés par les neuroscientifiques eux-mêmes. Mais cette histoire des neurosciences ne correspond pas à une analyse philosophique des problèmes soulevés par les travaux neuroscientifiques. Ainsi la neurophilosophie 15, le résultat philosophique 16 d’une certaine interprétation du mouvement des modèles neuroscientifiques : celle de la réduction interthéorique, reprise à P. K. Feyrabend par Churchland, qui consiste en l’élimination des concepts traditionnels de la philosophie idéaliste et de la psychologie ordinaire.

29La neurophilosophie interprète le mouvement des modèles à partir d’une réduction qui élimine non seulement les concepts traditionnels mais l’idée d’une permanence des modèles. La philosophia perennis avait su limiter le déplacement des concepts au sein d’un système logique et circulaire : l’idéalisme légitimait le recours à des explications dernières à partir desquelles pouvait être reconstruit l’ensemble des propositions du système. La neurophilosophie procède de manière identique mais à partir d’une synthèse argumentative d’origine exclusivement matérialiste. Le projet d’unifier toutes les connaissances à partir d’un système d’interprétation unique est identique dans le principe mais aura remplacé la métaphysique par les sciences positives et plus particulièrement ici les neurosciences. Ce changement disciplinaire bouleverse la dénomination et la classification des sciences (L’Âge des savoirs, n° 1/2000, « La dénomination ») : car les neurosciences découvrent dans le cerveau matière à naturaliser plutôt qu’à idéaliser les capacités humaines, la localisation des fonctions cognitives entretient l’argument de la découverte de la cause première de la vie de l’esprit et du corps. La psychologie classique et la philosophie idéaliste apparaissent dans ce nouveau paysage comme des sciences secondes, sinon secondaires, car elles ne décriraient que les effets de causes plus profondes. Là où l’idéalisme trouvait dans la métaphysique la sciences des causes, l’utilité des découvertes en neurosciences, puis de plus en plus aujourd’hui et demain en génétique, se trouve dans la possibilité d’unifier les sciences de l’homme à partir de ce qui serait LA science de la nature.
30Cependant le progrès des sciences n’aura pas placé la même science dans cette position de discipline première et unificatrice. Le cercle de Vienne avait cru apercevoir en la physique la science absolue à partir de laquelle R. Carnap, M. Schlick, ou Herbert Feigl voulaient construire un matérialisme exhaustif qui devait aller du corps à l’esprit par une différence de degré dans l’organisation de la matière. Mais la psychophysiologie, la critique de Carnap par H. Feigl est précise sur ce point, n’a pu en rester à une version physique de la science unifiée car elle décrivait l’homme de manière par trop mécanique. Les neurosciences ont pu dès lors constituer une voie nouvelle à l’intérieur même de la psychologie, et ce dès les années 40, afin d’établir des corrélations épistémiques entre l’état physiologique et l’état psychologique de l’enfance jusqu’à l’âge adulte. Ce remplacement de la physique par les neurosciences fût limité dans un premier temps aux domaines de la médecine, de la psychiatrie et de la psychologie. Puis dans un second temps, l’essor des sciences cognitives visa à étendre les études sur le cerveau aux autres domaines.

  • 17 . Kenneth F. Schaffner, « Genes, Behaviour, and Developmental Emergentism : One Process, Indivisible(...)

31Mais, à l’inverse du temps de la physique qui décrit les processus du devenir à partir de la matière atomique, le temps neurobiologique rencontre dans son processus même les notions de développement, d’adaptation et de régulation avec l’environnement. La génétique, le darwinisme et les neurosciences forment un domaine commun pour la science unifiée du xxe siècle. Comme l’analyse Kenneth F. Schaffner la complexité de la description interdit tout réductionnisme naïf et simpliste : « Developmental causation is not just bottom up, but is also top down. Genes are not the principal actors that produce traits (including behavioural traits), but are part of a complex system, in which the cytoplasm can influence the nucleus, external sensory stimulation can influence the genes, and the hormones can be influenced by the external environment » 17. Déterminer l’influence réciproque des facteurs endogènes et des conditions exogènes vient renouveler le débat nature/nurture au sein même de la science unifiée.

32Désormais chaque modèle ne vaut plus seulement pour lui-même dans la stricte délimitation de sa discipline d’origine. À l’instar de la neurophilosophie, le déplacement d’un modèle d’une discipline dans une autre ne trouve pas sa justification dans l’éliminativisme –, ce serait ne retenir du mouvement des modèles que son résultat dans l’ordre de la dénomination et de la classification des sciences plutôt que d’étudier les raisons de cette dynamique épistémologique dans le contenu même de la science unifiée. En déplaçant le point de vue de l’effet à la cause, la neurophilosophie apparaît moins comme une version cristallisée de l’éliminativisme que comme le principe d’un mouvement épistémologique, d’une épistémologie du mouvement des modèles.
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