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 II. Une autre sortie hors du logique : le grammatical. Granger et Wittgenstein 2

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04122010
مُساهمةII. Une autre sortie hors du logique : le grammatical. Granger et Wittgenstein 2

À ce point on s’acheminerait davantage vers un Transcendantal d’une autre nature, si l’on y tient absolument, un Transcendantal de la réflexion permettant de fixer un lieu abstrait pour les conditions de possibilité d’une méthode, en l’absence d’objets (G. Lebrun). En effet, dans Pour la connaissance philosophique 28, la nécessité d’abandonner la subjectivité transcendantale ne barre pas la voie à tout transcendantal. Puisqu’on ne peut miser sur la détermination d’une relation spéculaire d’un égo-source à ses produits, il faut considérer les produits de la science, et partir d’eux pour questionner ce qui est questionnable à savoir les « œuvres d’art » du symbolisme.

  • 28 . P. 241.

36Comme je l’ai suggéré plus haut, ce qui se trouve dès abandonné est toute référence à une subjectivité constituante comme « conscience de surplomb » TS, mais pas la justification subjective des travaux de la rationalité en termes de conditions TJ. 1. Aporie d’une topique de la condition


37Pour comprendre ce déplacement du transcendantal, j’ai signalé l’importance de la critique par Cavaillès d’une philosophie de la conscience. mais il y a, du côté des philosophes, une autre influence marquante : la critique wittgensteinienne dans le Tractatus logico-philosophicus du sujet métaphysique en place de référentiel originaire. De source machienne, cette critique du sujet des philosophes que Wittgenstein formule à l’aide d’une comparaison avec l’œil, est fondamentale, et je dirais même définitive. On la trouve en 5.6331. De plus cette critique prépare la transition à la philosophie des jeux de langage. Cela se fait en deux pas :
38L’argument est le suivant : « vous ne pouvez véritablement « voir l’œil » écrit Wittgenstein en 5. 633.

  • 29 . Il serait légitime de rappeler ce que Wittgenstein qui ne le nomme pourtant pas doit ici à Ernst M(...)
  • 30 . Les Individus, ch. 3, § 103, p. 115, Seuil, 1973, tr. fse.

39– 1er pas : Exclusion d’un Transcendantal au sens S : On peut s’interroger sur le sens de « pouvoir » impossible. Cet « impossible » tient à l’incompatibilité entre deux positions simultanées : l’œil en effet ne peut à la fois être ce à partir de quoi serait inféré quelque chose de visible dans le champ visuel et en même temps être une partie de ce champ. Aucune partie de notre expérience ne peut être en effet en même temps a priori, c’est-à-dire simplement indépendante de l’expérience, antérieure à elle 29. Rappelons à ce propos la critique que feront en 1929, un entretien chez Schlick intitulé « Anti-Husserl » Schlick et Wittgenstein du phénoménal a priori phénoménologique à propos des énoncés d’incompatibilité des couleurs. Cet argument prend ici la forme dune disjonction exclusive entre deux positions en quelque sorte spatiales : être une partie, ou être un référentiel originaire. La sorte d’impossibilité dont il est ici question ici se pose à un niveau plus fondamental que l’incompatibilité des couleurs vert et rouge au même endroit où rouge et vert sont sur le même plan. Comme l’a noté justement P. Strawson : « c’est finalement de cette entité d’une unité purement formelle d’un « je pense » accompagnant toutes mes perceptions (Kant) et qui pourrait aussi bien n’en accompagner aucune (Hume), que Wittgenstein parlait lorsqu’il disait du sujet d’abord qu’une telle chose qui n’existe pas puisqu’elle ne fait pas partie du monde, mais qu’elle en est la limite » 30.

40Cette impossibilité commande de choisir entre l’un ou l’autre. Elle pointe vers la structure d’une topique de la condition. On ne peut pas penser la condition et le conditionné comme appartenant au même espace. Il y a en effet entre la condition valant pour tout objet susceptible d’être rencontré dans l’expérience possible et le conditionné qu’est ce cas-ci de rencontre, une incommensurabilité aussi grande que celle qui sépare à tout jamais l’universalité d’une détermination possible d’une instantiation particulière forcément contingente. Désormais la condition et le conditionné n’appartiennent plus au même espace. Cet écart qui se creuse rend impossible l’idée même d’engendrement des produits de la rationalité à partir d’elle, comme la remontée de ces produits à une condition d’engendrement aussi désubjectivisée qu’elle soit.
41– 2e pas : Cette impossibilité signe la fin de l’argument même de la justification. C’est en ce sens que Wittgenstein finit par nous éloigner de toute tentation justificatrice au profit de la seule description. La description de ce que l’on voit s’ordonne au cas visible sans démesure. La description ne justifie rien en termes de condition de descriptibilité, pas plus qu’elle n’annonce quoique ce soit en termes de possibilité future et n’est donc en rien explicative ou prédictive. Certes, cet écart est aussi écart à la science avec laquelle le rapport de la philosophie se distend de plus en plus jusqu’à casser. On a donc pu dire avec raison que Wittgenstein s’éloignait de plus en plus d’une philosophie de la science, que la philosophie avec lui perdait de plus en plus les attaches avec la science qu’elle avait d’abord revendiquées. Coupée d’une pensée de la condition, la philosophie n’a plus les moyens de justifier son interprétation des modèles abstraits construits par le scientifique à distance du vécu, pour y mesurer ce qu’elle ressaisit ainsi de la « référence au vécu ». La grammaire n’est pas au service de l’épistémologie car, du fait même de se constituer comme grammaire du langage, ce qu’elle renie est l’idée d’une « théorie de la connaissance ». Granger ne peut suivre une telle ligne.
42Pour Granger : il s’agit bien de pouvoir penser ensemble le grammatical et le Transcendantal. Il est vrai que dans le Tractatus, Wittgenstein ne passe pas tout de suite de la mise hors jeu du sujet métaphysique à la grammaire. Du transcendantal refusé, sort un autre transcendantal réaménagé qui va être affirmé en 6.13, puis 6.421 à propos de la logique, en tant que Spiegelbild du monde, puis de l’éthique. On dirait que Granger a retenu le transcendantal du Spiegelbild qu’est la logique par rapport au monde dont la science s’occupe.
43Une distinction est à faire entre image et miroir qui soutiennent évidemment à mon sens deux conceptions du Transcendantal. Le motif du miroir ne commande plus la relation d’un Bild ou « modèle » à un modélisé comme dans la théorie de l’image logique, mais conduit à « regarder les travaux de notre langage » comme dira Wittgenstein dans une remarque ultérieure, et ainsi à mettre un terme à toute théorisation, voir et non plus expliquer (Recherches philosophiques, § 109). Chez Wittgenstein, la position transcendantale/Jeu n’est donc pas tenable longtemps.
44Plutôt que de transcendantaliser la grammaire (comme j’ai été d’abord tentée de le faire dans un premier temps, il convient d’introduire une nuance entre deux sens de Jeu qui maintenant se dédouble donc en :
45TJ1 – le Transcendantal au sens d’un jeu dans le Tractatus, et
46J2 dé-transcendantalisé : l’idée dé-transcendantalisée ou « désublimisée » d’un jeu de l’imagination – ou de supposition débarrassée de présupposition – dans les Recherches philosophiques.
47L’abandon du point de vue sublimisé de la logique est déclaré avec netteté au § 97 des Recherches philosophiques en référence critique et explicite au Tractatus 5.5563. Il signifie le parti de tourner résolument le dos et une bonne fois, à l’idée d’un ordre a priori de possibilités qui serait commun au monde et à la pensée (§ 97, cf. § 90 où l’idée de « pénétration » d’un ordre des phénomènes est clairement réfutée), ou encore à l’idée d’un « doit » idéal comme si on pouvait le trouver dans la réalité (§ 100 et § 101).
48L’introduction de l’investigation grammaticale est présentée comme l’alternative à retenir, une fois définitivement tournée la page de la « Forme commune » au monde et au langage (voir la transition du 1er § au second, § 90). Beaucoup d’interprètes qui négligent cette nuance entre TJ1 et J2 transcendantalisent trop vite le second Wittgenstein ; à mon avis, c’est le cas pour des raisons différentes de Strawson, Cavell, J. Lear... Sans ranger Granger parmi ces derniers, on peut tout de même considérer que l’épistémologie grangérienne parce qu’elle doit demeurer justement une « épistémologie », a retenu le Transcendantal au sens TJ1 du Jeu dans sa conception esthético-formelle des « œuvres d’art » du formalisme (c’est-à-dire le sens 2 du Transcendantal du Tractatus tel qu’il est présenté en 6.13 et 6.421). 2. Un tournant esthético-symbolique : le contenu formel


49Le tournant que je proposerais de qualifier d’« esthético-formel » de Granger est une version de ce qui reste à faire avec le transcendantal au sens J1. Pensée formelle et sciences de l’homme l’annonçait dans ses dernières lignes : sous l’éclairage qu’apporterait la catégorie de « style » appliquée à la science en acte, se révèlerait « le travail de création formelle d’une pensée » se voulant « l’instrument d’une objectivation des faits humains ». Cependant, la proposition porte encore en ce temps-là la marque auto-réflexive d’un rapport à soi de l’homme avec ses produits dans une dialectique un peu simple d’« aliénation » dans ses produits et de « libération » dans le rapport spéculaire de la conscience à elle-même 31. C’est que Granger a encore besoin d’une structure de justification transcendantale du formel que la logique est incapable de fournir.

  • 31 . Op. cit., p. 219.



  • 32 . Paru dans un n° spécial de la Revue SUD consacré à Wittgenstein (1986, p. 128-129).

50Mais les « œuvres d’art » du formalisme comme il les appelle n’ont évidemment rien à voir avec l’art à proprement parler, et en revanche beaucoup plus à voir avec l’art compositionnel de la fabrication de jeux de langage chez le 2e Wittgenstein qui suppose aussi un déploiement constructif de signes conceptuels et de leurs combinaisons possibles même fictives. C’est ce que montre à l’évidence le fameux article de Granger « Bild et Gleichnis... ». Remarques sur le style philosophique de Wittgenstein » 32 où se dessine, sous couvert d’une analogie avec la musique, une interprétation transcendantale de la grammaire.


  • 33 . Voir note 8.

51C’est sous l’aspect du jeu imaginatif que va s’effectuer l’introduction conjointe du contenu formel avec le transcendantal : « Pour Granger, écrit Hourya Sinaceur 33, il n’y a rien à attendre du schématisme transcendantal kantien ». Il reste cependant à saisir les conditions d’un jeu qui n’exigent pas de remonter à la position d’une subjectivité constituante. C’est la catégorie de « contenu formel » qui, dit-elle, va se charger de chasser le Sujet des préoccupations grangériennes ultérieures.

52Qu’est-ce que le « contenu formel » ? L’introduction de la thématique du « contenu formel » vient d’abord d’un constat d’échec. Il n’y a pas moyen de ressaisir ultimement les particuliers les plus élémentaires à l’aide de concepts. Ce constat oppose une fin de non-recevoir à la phénoménologie husserlienne.

  • 34 . Parce que « l’analyse est reconstruction et non pénétration » (op. cit., p. 259), on ne fera pas d(...)

53Le point de départ est carnapien. La réduction tentée par Carnap est partie du principe qu’il fallait d’abord neutraliser les particuliers « Je », « ceci » pour en parler dans un langage un tantinet rigoureux, parce que « symboliser l’expérience » jusque dans ses minima sensibles en croyant capturer ces derniers « en personne » comme dit Husserl, est un leurre. Pour le dire dans les termes de Vuillemin, il n’y a pas de « logique du sensible » mais il y a « la logique et le monde sensible », d’où son titre (Flammarion, 1971) 34. On ne peut pas « dire voir » directement. Ce qu’on ne peut pas voir, il faut le construire à commencer par les vécus directement inconnaissables. Le formalisme tire de cette impossibilité sa justification.


  • 35 . Ch. A § 5, « concept et objet », p. 10. D’abord « à tout concept n’appartient qu’un seul objet » e(...)

54La deuxième raison qui éclaire la notion de « contenu formel » s’ensuit. Parce que l’objet n’est plus qu’un concept construit, un construct logique sous une forme symbolique, il devient interchangeable avec le concept. La dissymétrie kantienne objet/concept disparaît. Cette disparition signe la fin du modèle classique de la subsomption classique de l’objet sous le concept ou de ce que Carnap appelle « la théorie générale du concept ». Carnap est clair concernant la nécessité d’un tel abandon dans son LogischerAufbau der Welt 35. On travaille désormais avec des « formes d’objets » construites à l’aide de règles opératoires selon un étagement de leur complexité. Que le signe soit le signe d’un concept ou d’un objet ne fait dès lors plus aucune différence logique. On fonctionnalise donc le concept. Ce que n’a pas compris Deleuze.


  • 36 . Notons le caractère structuraliste de la logique ici (G. Bergmann).
  • 37 . P. 59.

55Les « contenus formels » selon Granger peuvent désigner notamment les « quasi-constituents » de l’Aufbau mais rebaptisés et dé-logicisés (libérés de la naïveté logiciste). On y voit sur pièce l’objet et l’opératoire élaborés conjointement tandis que le « contenu » non formalisé, déclaré indicible, est éjecté de la construction neutre. En même temps, il est entendu qu’il est désormais vain d’attendre de ces formes structurales une augmentation de connaissance objective 36. Seraient donc formels de tels contenus qui, dans l’échelle de l’ascension des formes, peuvent devenir arguments d’expressions plus complexes. Il leur correspond donc toujours des descriptions structurales. Notons que dans un passage du chapitre 3 de Formes, opérations, objets, Granger rapproche son expression de « contenu formel » de la notion linguistique de « forme de contenu » employée par Hjelmslev 37.


  • 38 . CF. § 11 et § 14 de l’Aufbau, où ce qui importe est un réseau de connexions, à l’image d’un réseau(...)
  • 39 . Pour la connaissance philosophique, op. cit.,p. 55.

56Ce structuralisme fait écran à leur nature d’objets au sens d’individus. Il n’y a là à vrai dire rien de très bouleversant pour des philosophes ayant traversé le structuralisme français. On n’avait simplement pas pensé dans les années 60 à étendre le paradigme de la structure à la logique, parce qu’à l’époque on baignait dans une logique marquée du sceau de l’hégélianisme 38. Mais si l’on ne peut en attendre un gain de connaissance, celui-ci étant réservé au savoir positif de la science, le formalisme ne serait-il pas une « démarche suicidaire » ? demande alors Granger 39.


  • 40 . Ibid., p. 60.

57L’objet devenu cet « état de choses qu’est l’énonciation d’un signe (Zeichen) » et non plus le référent d’un signe – dit encore Granger à partir d’une analyse d’une proposition du Tractatus (5.552) – nous éloigne définitivement d’une référence du signe à l’objet-chose saisissable dans une expérience hors langage. Mais il reste entendu que « l’origine subjective de toute connaissance réside dans les contenus d’expériences » (Carnap, § 2, Aufbau). D’où Granger conclut que « ce qui donne sens et vie au signe » est « transcendantal » et non quelque part dans l’empirie 40. Une fois de plus, le transcendantal est rapporté au moment d’une référence au vécu dans le commentaire des signes.

58C’est à l’occasion de ces développements de Granger sur le caractère complexe d’un rapport impossible du formalisme à l’empirisme, fait de « profondeur » et de « refoulement » (p. 59), de lucidité face à l’illusion d’un « sujet dans le langage », mais en même temps de « résistance » devant le fait que la logique ne nous fait rien connaître, comme nous l’apprennent d’ailleurs Wittgenstein et sa critique de Russell, que Granger introduit son concept de « contenu formel » avec le « transcendantal ».

  • 41 . Cavaillès, op. cit., p. 29-30.
  • 42 . À la première correspond la métonymie, à la seconde la métaphore.

59La source cavaillésienne : le « contenu formel » combine le paradigme et le thème développés dans Logique et théorie de la science 41, passages commentés dans la Philosophie du style (p. 66), pour interpréter le « style arguésien » par contraste avec le « style cartésien », et rapportés, par commodité d’exposition d’un certain « régime de structuration », à l’opposition linguistique entre liaison syntagmatique (pour le paradigme selon Cavaillès), et liaison paradigmatique (pour le thèmatique selon Cavaillès) 42.

60Seule la notion de « structure » – à la différence du formel de caractère purement syntaxique – retient en elle la relation actualisée dans une production de termes dissociés entre lesquels elle passe. La liaison comme acte donne la liaison actualisée de l’intérieur qui sortira de l’acte comme donné mais seulement dans une « synthèse » et jamais antérieurement à elle. L’actualisé est ce qui est décroché de l’acte comme « moment de la variable » quand, en ce point nodal, se détache « sens posé » d’un « sens posant » sur l’axe longitudinal du paradigme (axe de la pensée comme mobilisation de liaisons-actes). Tout sens posant devient sens posé d’un autre acte. De ce point de vue opératoire qui prend toujours le sens dans le procès endogène d’une synthèse « coextensive au synthétisé », la distinction entre forme et contenu est factice.
61Le meilleur exemple de cette « création dans le paradigme », est le concept projectif des coniques chez Desargues dont l’efficacité est de reproduire ce double mouvement de procès enchevêtrés. Ce qui se trouve « créé » ici ce sont les « conditions et modes d’un rapport forme/contenu », relatif et toujours reproductible par substitution dans un prochain schéma. En logique ce rapport est à son degré zéro.
62La formule met le doigt sur le « vide du formalisme » carnapien, incapable de « constituer » ce mouvement de la science en une théorie de la démonstration dont elle ne fait en réalité que « clarifier » les inférences, dans la mesure où Carnap est encore trop obnubilé par « la polarité de l’objet », c’est-à-dire en somme trop préoccupé par « l’application au réel » du système catégoriel des formes opératoires de la construction. Cavaillès souligne ainsi la faillite de la « constitution » à laquelle aspirait Carnap. Cette faillite s’explique par le fait que, braquée sur le réel empirique, la logique qui s’applique mobilise des formes qui, comme la tradition l’a toujours pensé, sont censées « chasser le contenu » au lieu de le « possibiliser ». La philosophie comme « logique appliquée au réel » veut illusoirement tout garder, la réalité empirique et les contenus formels.

  • 43 . Il est vrai, comme le fait remarquer J. Petitot que la référence au Cercle de Vienne peut avoir gê(...)

63Sans doute le point de vue de la philosophie de la physique contribue-t-il à masquer la fécondité que trouvent les contenus formels en particulier dans les opérations du mathématicien 43.
IV. le transcendantal ou le grammatical : conclusions


64Un trait commun à Husserl et Wittgenstein est, toutes proportions gardées, l’impossibilité d’avoir ensemble une conception grammaticale du langage et une conception transcendantale. Ces conceptions historiquement se succèdent plutôt. Mais chez l’un à l’inverse de l’autre. Wittgenstein passe du transcendantal au grammatical. Husserl lui est passé du grammatical au transcendantal. On a des Kehren inversées. Je ne veux pas examiner ces « tournants » à la loupe mais simplement faire comprendre pour des raisons intrinsèques, qu’on ne peut avoir les deux. Je l’ai montré avec l’analogie de l’œil pour Wittgenstein. J. Benoist a fait le travail sur Husserl et l’on peut s’y référer. La raison est le problème des catégories c’est-à-dire d’une structure de traits invariants de généralité caractérisant nos schèmes conceptuels, et déterminants aussi bien pour la science que pour l’activité du langage.
65Pour leur reconnaître une structure de présupposition commune à la science et au langage, il faut une solide théorie de la référence des concepts aux particuliers que la philosophie selon Granger ne peut offrir, sauf au travers des modèles abstraits de la science qui eux, ne la trouvent pas, mais la construisent. Telle est sans doute la logique de la présupposition que Strawson réaménage à partir du kantisme et qui ne réussit à maintenir en effet un grammatical de caractère transcendantal qu’en vertu de ce qu’il appelle la bonne circularité d’un principe de dépendance.

  • 44 . N° 33 de Philosophie, sur la philosophie de l’esprit, 1992, p. 38.
  • 45 . Cf. p. 272 de Bounds of Sense, et sa réévaluation d’un kantisme débarrassé de la thèse de l’idéali(...)

66On peut lire à ce sujet J. Dokic pour une reformulation assez ramassée de ce principe pour nous dispenser de plus amples explications, dans son article « De l’objectivité à l’espace... » 44. L’interdépendance assure à l’expérience un fondement permettant qu’un élément de cette expérience soit identifié en tant qu’il reflète un distinction déjà présente dans nos schèmes conceptuels. D’où la légitimité de la structure générale de ceux-ci préalablement à l’usage de nos concepts. La référence à ces schèmes garde du kantisme la nécessité d’une référence à des conditions. Mais parce que Strawson a le souci d’une identification de particuliers dans notre expérience et non dans toute expérience possible au nom d’une objectivité abstraite qui nous dépasse, il prend ces conditions comme ayant des traits de généralité et non d’universalité 45. Inversement, ces traits doivent pouvoir être exemplifiés quand nous nommons une expérience qui se présente à nous. Ainsi la thèse kantienne selon laquelle la légitimité objective des catégories se déduit du fait qu’on a la preuve que par leur moyen et avec elles seules (par leur présupposition implicite) un objet est effectivement pensé, est sauve.

67Le grammatical pris au sérieux comme il l’est chez le second Wittgenstein, c’est-à-dire détaché de la tradition de l’argument transcendantal d’un référentiel originaire en est un qui a dû faire son deuil d’une forme ou une autre de « déduction transcendantale ». Il a fallu à Wittgenstein cette rupture pour penser la création formelle des jeux de langage. Une vision purement grammaticale des jeux de langage les détache de tout système catégorial. C’est ce que l’on reproche d’ailleurs au Wittgenstein 2 : l’évanouissement de toute structure de catégorialité bien que certains travaillent à montrer que les jeux de langage proposent une forme inédite de catégorialité. Mais Granger qui s’inspire de cette création, préfère – pour plus de sûreté dirons-nous – en replacer le déploiement au sein des travaux de la rationalité scientifique en y ordonnant la tâche interprétative du philosophe. Le « faire avec des concepts » est certes plus fiable chez les scientifiques. On ne saurait trop à quoi en renvoyer l’efficience chez Wittgenstein.
68Or les « contenus formels » ou formes de symbolisation (et non d’intuitions sensibles), que Granger place à la source d’une connaissance de l’empirie, sont, dit-il, une « formulation moderne » (p. 67) de la déduction transcendantale. On voit donc en quoi avec les contenus formels, le grammatical garde ses attaches avec le transcendantal kantien chez Granger indépendamment d’une théorie de la référence des concepts à des objets dont le philosophe aurait la clef.
69Pour se passer d’une référence au conditions, il faudrait que la catégorialité soit intégralement récupérée dans la grammaire. Mais Granger renonce difficilement à l’idée d’origine aristotélicienne de catégories de formes de pensée qui serviraient aussi de conditions « déterminant, dans le champ des sciences, le domaine hors duquel des concepts d’objets perdent leur sens » (p. 56).
70Il n’en reste pas moins que les catégories telles qu’il les comprend, se posent indépendamment de toute référence au réel dans un domaine du connaissable, d’où le problème d’articuler ici formes de la pensée symbolique et catégories en jeu dans le travail de modélisation chez le scientifique, c’est-à-dire au fond les fameuses « catégories de langue » et « catégories de pensée » de Benveniste. Le rapport entre ces familles de catégories, si elles doivent être distinguées (ce que ne dit pas Benveniste qui lui s’interroge sur leur statut « de pensée » ou « de langue ») demeure encore flou. Une chose est certaine, c’est du côté des premières, de caractère logico-linguistique, que l’on doit regarder si l’on est à la recherche de quelques traits d’universalité – recherches de linguistes – mais du côté des secondes si c’est la connaissance du réel qui est recherchée. Reste que, entre ces deux directions, l’articulation entre épistémologie et philosophie du langage est problématique. Tout se passe comme si dans son rapport à la science, la philosophie pouvait se passer des premières sortes de catégories, et, comme si dans son rapport aux formes logiques du langage, la philosophie (du langage) pouvait se passer de la référence au réel qui est l’apanage de la science. Bref là où philosophie et sciences convergent, logique et connaissance divergent, tandis qu’une logique de la connaissance si elle est possible, semble se développer à l’écart de la science. D’où pour conclure, deux problèmes :

  • 46 . Voir à ce sujet « l’insuffisance » de la philosophie analytique dans l’art. de J.-M. Salanskis sur(...)

71– Premier problème ici : la dissociation entre épistémologie et philosophie du langage. Ce problème confirme la difficulté qu’a la « raison analytique » à s’inscrire dans une relation d’« organicité » avec la science (J.-M. Salanskis, à partir d’une citation de Daniel Andler) 46.

72– Deuxième problème corrélatif du premier : la dissociation entre catégories de pensée et catégories de langue.
73Chez Granger, elles semblent ne pas pouvoir se rejoindre, et donc elles se dédoublent, les unes pour la science, les autres pour le langage. Tout se passe en effet comme si dans l’optique de Granger, le philosophe du langage était dispensé de cette justification par des catégories de pensée dans la même mesure où c’est la science qui se charge d’assurer la référence à l’objet. C’est sans doute la raison pour laquelle Granger a davantage confiance dans la science que dans une pure philosophie du langage à la Wittgenstein. Si les seules « catégories » qu’il reconnaît en somme sont les métaconcepts (ou trans-concepts posés dit-il indépendamment du découpage du connaissable) du philosophe, qu’ont-elles de commun avec une structure de présupposition de la connaissance de l’empirie ?
74Novembre 2000
75Note : Ce texte s’inscrit dans une série de séminaires menés au Collège international et portant sur « le voir du philosophe ». Il a fait l’objet d’une conférence au CREA dans le cadre du séminaire de M. Bitbol et J. Petitot, que je remercie ici tant pour leur accueil le 24 novembre que pour les questions et remarques qui ont été formulées à l’issue de l’exposé.
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