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 ÉLÉMENTS THÉORIES DES

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فدوى
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فدوى


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تاريخ التسجيل : 07/12/2010
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14022016
مُساهمةÉLÉMENTS THÉORIES DES

ÉLÉMENTS THÉORIES DES
Le pluriel latin elementa désignait, le plus souvent, les « quatre éléments » : le Feu, l'Air, l'Eau et la Terre (cf. SénèqueNaturales Quaestiones, III, 12 ; CicéronAcademica, I, 26) et le singulier elementum, d'un usage bien plus rare, l'un des « quatre éléments » (cf. Pline,Naturalis Historia, X, 191). Les alchimistes grecs, s'agissant de l'ensemble des « quatre éléments », employaient un seul mot, tetrasomia, la « tétrasomie », matière des quatre « métaux », au sens hermétique de ce terme.
L'extrême diversité des phénomènes, les multiples changements des corps, les constantes mutations opérées par des forces elles-mêmes variables posaient trop d'énigmes à l'esprit humain pour qu'il pût concevoir avant une époque relativement tardive de l'histoire des civilisations une interprétation philosophique de la Nature et de l'Univers, une physique et une cosmologie. De tout temps, certes, les peuples primitifs surent utiliser pratiquement, dans les techniques de leur vie quotidienne, les puissances protectrices et les propriétés destructives du feu, les effets dissolvants et purifiants de l'eau, ainsi que ceux des fermentations et des putréfactions produites par l'air et par la terre. Mais les premières spéculations abstraites sur les fonctions universelles des éléments ne se sont pas dégagées des cosmogonies magico-religieuses, en Extrême-Orient comme en Occident, antérieurement au VIe siècle avant l'ère chrétienne, au plus tôt, qu'il s'agisse deThalès de Milet, en Grèce, ou bien des théoriciens du yin et du yang, en Chine, lesquels, selon Maspero, n'apparaissent pas avant l'époque du Xi ci, traité annexé au Yi jing, auIVe siècle avant J.-C. Il convient de rappeler à ce sujet avec M. Granet qu'« il ne nous est parvenu aucun fragment où se retrouve une préoccupation philosophique de ce genre et qui puisse être estimé sensiblement antérieur au Ve siècle ». Les témoignages les plus anciens et les plus certains de tous ceux que l'on possède sur le yin et le yang sont donnés par un recueil poétique, le Shi jing, dont la compilation ne peut être antérieure au début du Ve siècle avant J.-C. Les philosophies naturalistes de l'Inde sont encore plus tardives que celles de la Grèce et de la Chine. Quant aux théories des alchimistes d'Alexandrie sur les éléments, elles ne furent élaborées qu'après la fusion des civilisations grecque et égyptienne, à l'époque des Ptolémées, et elles atteignirent leur plus haut degré de développement vers la fin du IVe siècle et au commencement du Ve siècle après J.-C., pendant le règne de Théodose Ier et de ses successeurs.
Ces indications chronologiques montrent que le raisonnement cosmologique, fondé sur la systématisation de l'observation des phénomènes, représente une conquête relativement récente par rapport à la longue évolution protohistorique de l'humanité et que l'on doit distinguer de l'intuition cosmogonique dont témoignent les mythes primitifs et les religions de la haute antiquité. L'intérêt des théories des éléments pour l'histoire des sciences vient précisément de ce qu'elles correspondent aux premières tentatives de la raison pour expliquer l'Univers à partir de ses principes constituants, et non pas pour l'interpréter en fonction de l'existence de puissances divines et surnaturelles.
L'influence des théories cosmologiques des éléments a été profonde et durable. On en retrouve des vestiges dans l'esprit scientifique jusqu'au XVIIIe siècle, en Occident, et plus tardivement encore, en Orient. Leurs symboles ont inspiré maintes œuvres d'art et retiennent encore l'attention des psychanalystes modernes, notamment depuis les travaux de G. Bachelard. Enfin, le système des éléments a joué un rôle capital dans les disciplines ésotériques traditionnelles, dans l'alchimie, l'astrologie et la magie, ainsi que dans certains enseignements initiatiques comme, par exemple, ceux de la gnose ismaélienne.

[size=22]1.  Les écoles de Milet et d'Éphèse

  Les Ioniens

Vers 600 avant J.-C., Thalès de Milet, le fondateur de l'école ionienne, semble avoir été le premier philosophe qui ait tenté de dégager une théorie cosmologique préscientifique des systèmes magico-religieux babyloniens et égyptiens. En effet, la conception centrale de la cosmologie de Thalès, selon laquelle l'Eau était l'élément primordial de l'Univers, ne doit pas être interprétée littéralement. « On prétend avec beaucoup de raison, dit Bayle, que Thalès ne fut pas l'inventeur de cette doctrine et qu'il l'avait empruntée ou des Égyptiens ou des anciens poètes de la Grèce. Quelques auteurs disent que le Chaos d'Hésiode est, au fond, le même principe que Thalès appelait Eau. »
Il s'agit, en effet, de l'Océan cosmique, éternellement fécond, origine éthérée des êtres et des choses, au sens des anciens dogmes orientaux, plutôt que de l'élément aqueux proprement dit. Thalès enseignait que tout fut engendré par cette puissance, répandue dans la substance éternelle et par la succession nécessaire des phénomènes.
Les flots de l'éther ou « les eaux éternelles », selon l'enseignement des mystères, formaient les astres et les alimentaient par leurs forces perpétuelles. « L'étendue éthérée, disait un chant sacré orphique, et sa révélation lumineuse : la Mer, l'Océan, l'abîme du Tartare, tout ce qui est né, tout ce qui doit naître, tout est renfermé dans le sein de l'Être un qui existe par lui-même et duquel tous les corps sont nés. »
Thalès, l'un des Sept Sages de la Grèce, comparait, selon Sénèque, le globe terrestre à un navire abandonné à lui-même et flottant dans un océan immense dont il suivait toutes les irrégularités. Aristote ne semble plus avoir compris ce souvenir d'une science perdue : « Les Anciens, écrit-il dans sa Métaphysique, disaient que la Terre est entourée d'eau, qu'elle est une île, et qu'elle penche, tantôt d'un côté, tantôt d'un autre. »
Anaximandre, selon Diogène Laërce, enseignait que le principe de toutes choses était un élément toujours identique à lui-même, infini et immuable, sans que l'on puisse le comparer au feu, à l'air ou à l'eau, car ses parties seules étaient changeantes. Il n'existait aucune différence réelle à l'intérieur du Tout que ne pouvaient altérer les actions ni les pensées des êtres dans le temps ni dans l'espace. Anaximandre, selon Moréri, était capable de prévoir les tremblements de terre : « Il en avertit les Lacédémoniens, et l'événement vérifia sa prédiction. » Ce philosophe assurait que la Terre, dont la forme est sphérique, flotte au sein de l'infini.
Anaxagore, né à Clazomènes vers 500 avant J.-C., fut condamné pour impiété parce qu'il avait soutenu une astronomie mécaniste. Il enseignait, au grand scandale des dévots, que les astres n'avaient point d'âme. Les éclipses provenaient de l'interposition de corps obscurs. L'Univers, dans lequel tout participe à tout, où toutes choses sont en chaque chose, où le végétal contient des semences qualitatives capables d'être transformées en matière animale (germes auxquels Aristote donna le nom d'« homéoméries »), le Cosmos est animé par un principe, le Noûs (ou Esprit). Ce principe ordonnateur ne se mêle à rien, bien qu'il soit présent à tout ce qu'il anime et gouverne. En se séparant de l'inertie primordiale, le Noûs a déterminé la rotation d'un tourbillon centrifuge qui sépare le sec de l'humide, le chaud du froid, l'éther de l'eau. Formés par condensation, les aérolithes sont des pierres qu'enflamme leur arrachement à ce tourbillon. Selon Anaxagore, il n'y a point d'élément insécable ni de limite à la petitesse. Les êtres sont constitués par des ensembles de qualités ; les unes, apparentes et manifestées, les autres, cachées et manifestables, de nature spermatique, dont le développement dépend de l'apport de germes semblables, en nombre suffisant. Cette dernière théorie d'Anaxagore, opposée à l'atomisme « quantitatif », exerça ultérieurement une profonde influence sur les recherches des alchimistes grecs.
Anaximène, disciple d'Anaxagore, exagéra les tendances de son maître et attribua l'origine de l'Univers à un fluide invisible, substance éternellement active dont l'air était le symbole. Tout résultait de la condensation ou de la raréfaction de ce fluide aérien, infini dans son essence primordiale, fini temporairement dans les phénomènes de sa manifestation. Loin que les dieux en fussent les auteurs, Anaximène enseignait au contraire qu'ils en étaient sortis.
Diogène d'Apollonie reconnaissait aussi pour principe cosmologique l'infini aérien et prétendait qu'existe une infinité de mondes dispersés dans l'espace. Il enseignait que rien ne se fait de rien et que rien ne se résout en rien. Archélaüs, fils d'Apollodore, attribuait à l'air infini l'origine de toutes choses et il en faisait naître le feu et l'eau. Œnopide de Chio appelait ce fluide la « Vierge Aphrodite », « comme si jamais, observe Julius Firmicus, la virginité pouvait plaire à Vénus ».
Lorsque la tradition ésotérique initiale se perdit, on crut que tous ces philosophes avaient attribué à l'élément matériel aérien, au gaz élémentaire, l'engendrement de l'Univers. Leur doctrine était bien différente. Le Chaos d'Hésiode, les « flots cosmiques » de Thalès, l'« élément infini » d'Anaximandre, le Noûs d'Anaxagore, l'Air d'Anaximène étaient des expressions symboliques des deux polarités de la cause substantielle. L'unité de la substance, encore comprise par Thalès, reflétait l'enseignement des mystères sur l'Océan cosmique, père et mère de tous les êtres, sur l'« Âme du monde », éternellement féconde par soi-même et dont les modes de manifestation, venus de l'infini, retournent à l'infini sans perte ni changement. À partir d'Anaximandre commencent des spéculations philosophiques différentes et qui, peu à peu, séparent de la substance unique ses attributs pour les constituer en entités indépendantes. Cette différence avec les théories cosmologiques des Ioniens est confirmée par saint Augustin : « Les premiers Ioniens, dit-il, croyaient que la matière avait d'elle-même la puissance de s'organiser. Ils lui attribuaient un mouvement perpétuel qui, selon l'occasion, engendrait toutes les formes, et ils lui reconnaissaient une énergie, une âme répandue partout qui, étant le principe de toute action, ne diminuait en rien l'infinité de son essence. Ils ajoutaient que les formes ont une existence si fugitive qu'on ne peut assurer qu'elles soient réellement, car elles changent sans cesse, et que l'existence réelle ne réside que dans l'absolu. »

  La cosmologie d'Héraclite

La philosophie d'Héraclite constitua, semble-t-il, une tentative analogue à celle de Thalès, dans la mesure où l'une et l'autre de ces doctrines furent inspirées par l'enseignement ésotérique des mystères. Les meilleurs spécialistes modernes de la cosmologie héraclitéenne ont mis en évidence les « couples contrariés » d'éléments sur lesquels s'articule ce système. Des échanges compensés aboutissent à un équilibre entre le Feu, l'Être primordial, la Mer, la Terre et le « Praester », atmosphère chargée de vapeurs sèches ou humides. Au rythme des jours et des nuits, de la grande année et de ses saisons, l'ordre et la durée d'un Cosmos qui ne cesse de vivre et de mourir dépendent de la juste proportion du Logos, mesure équitable des rapports universels de puissance entre toutes les parties opposées, soit dans la nature, soit chez l'homme et jusqu'au sein de la Cité.
L'art de maintenir à mi-chemin les forces couplées du Cosmos et de l'Anthropos porte le nom de Dikè, la « Justice ». Car « toutes les lois humaines tirent leur nourriture de la loi unique et divine ». Au sens héraclitéen, la « Justice » évoque singulièrement le constant réajustement des rivalités et des échanges d'attributs que l'on observe aussi, à une époque très voisine, dans la cosmologie et dans l'anthropologie chinoises. Les problèmes posés par l'interprétation des « tablettes » héraclitéennes, notamment par le découpage des phrases des textes selon la ponctuation, sont curieusement analogues à ceux que tentent de résoudre, dans le déchiffrement du Daode jing, de Laozi, les lettrés chinois et les sinologues occidentaux. Ces messages, condensant le maximum de sens avec le minimum de mots, sont caractérisés, d'ailleurs, par une égale obscurité comme par un style « oraculaire » ou volontiers sibyllin, plus proche de celui des devins que de la langue des philosophes. De toute évidence, les textes héraclitéens appelaient des commentaires oraux, de même que ceux de Laozi, un enseignement direct de maître à disciple. Dans ces conditions, la critique moderne en est réduite à proposer des hypothèses au sujet de ces théories cosmologiques, car elle ne saurait prétendre imposer des explications.
On sait, par exemple, que le Feu héraclitéen n'est pas seulement l'élément igné, présent dans les phénomènes naturels. Une âme peut s'y substituer et il apparaît aussi comme un « Feu pensant ». Dans ces conditions, la cosmologie rejoint, chez Héraclite, la mystique et l'ascèse, comme elle fonde l'épistémologie. Notre logique dualiste moderne, qui oppose l'esprit à la matière, l'étendue à la pensée, le Moi au non-Moi, éprouve de constantes difficultés à comprendre, par exemple, comment une « âme » peut se maintenir « sèche et disponible à l'incandescence ». Cependant, de telles notions n'étaient pas considérées métaphoriquement, que ce fût par les alchimistes, par les gnostiques ou par les mystiques, d'Extrême-Orient ou d'Occident. Les éléments opéraient intérieurement et extérieurement dans le Cosmos et dans l'Anthropos des métamorphoses analogues et non passemblables, en ce sens qu'une même puissance, le Logos, déterminait leurs justes proportions et les aspects harmoniques de leurs puissances, c'est-à-dire leur dynamique complémentaire, mais non pas des similitudes expérimentales rationnellement descriptibles. Le Logos héraclitéen n'est pas plus réductible que le Dao de Laozi à la seulemesure finie des êtres et des choses ni à leur raison limitée, car il n'a pas lui-même d'autre mesure que l'infini et l'éternité, comme tout ce qui participe directement de sa nature primordiale.

2.  La philosophie chinoise du « Hong fan »

  Opérations cosmiques et comportements humains

Le Hong fan, inséré à titre de chapitre dans le Shu jing, est un petit traité qui passe communément pour le plus ancien essai de la philosophie chinoise. La tradition des lettrés prétend y voir un ouvrage du IIe millénaire avant J.-C. Les critiques modernes le font remonter, les uns au VIIIe siècle, les autres au IIIe siècle avant l'ère chrétienne. On peut, avec la majorité des sinologues, considérer que sa rédaction n'est pas antérieure auVIe siècle avant J.-C. On y trouve, dans un dialogue qui sert d'exorde au traité, les indications suivantes :
[/size]
اقتباس :
« Ah ! c'est de façon mystérieuse que le Ciel fixe aux hommes d'ici-bas les domaines où les uns et les autres vivront en harmonie ! Et moi, je ne sais rien de l'ordre qui régit les rapports réguliers (des êtres).
– Jadis, Gun fit obstacle aux Grandes Eaux et jeta le trouble dans les cinq éléments ; le souverain, frémissant de colère, ne lui ayant pas délivré les neuf sections du Hong fan, les rapports réguliers (des êtres) se pervertirent. Mais Gun périt, exécuté dans les Marches du Monde, et Yu accéda au pouvoir. Le Ciel, alors, délivra à Yu les neuf sections du Hong fan et les rapports réguliers des êtres retrouvèrent leur ordre. »
[size]
Il s'agit ici d'un dialogue entre le fondateur de la dynastie Zhou et le frère du tyran Shuxin, dont les mœurs décadentes provoquèrent la ruine de la dynastie Yin : entretien correspondant à la naissance d'un ordre nouveau, après la transmission, d'une famille à une autre, des principes sacrés ou des palladia emblématiques du pouvoir. Le sujet duHong fan, d'ailleurs, est l'ensemble des procédés de gouvernement grâce auquel le souverain peut recueillir et répandre sur l'ensemble de ses sujets la totalité des « Cinq Bonheurs ». Aussi lit-on, dans la cinquième section du Hong fan, cette déclaration d'avènement :
[/size]
اقتباس :
 Rien qui penche ! Rien qui oblique !
 Suivez le Yi royal !
 Nulle affection particulière !
 Suivez le Dao royal !
 Nulle haine particulière !
 Suivez le Lu royal !
 Rien qui penche ! Rien de factieux !
 Le Dao royal, qu'il est large !
 Rien de factieux ! Rien qui penche !
 Le Dao royal, qu'il est uni !
 Rien qui se tourne vers l'arrière !
 Rien qui s'incline de côté !
 Le Dao royal est tout droit !
 Unissez-vous à celui qui possède le Ji !
 Accourez près de qui possède le Ji !
(trad. Chavannes, S.M.T., IV)
[size]
En méditant sur la structure de l'Univers, le sage, selon la philosophie chinoise traditionnelle, peut découvrir les principes qui commandent toute politique, privilège que lui accorde aussi, en Grèce, à une époque voisine de celle des premiers « pères du taoïsme », la philosophie d'Héraclite. L'aménagement du Cosmos, d'un temps et d'un espace finis, où l'ordre ontologique et l'ordre logique se traduisent en harmonies rythmiques et en symboles géométriques, implique une répartition des êtres et des choses, une classification en rubriques tout aussi bien qu'une distribution en cinq éléments. Ainsi, la première section du Hong fan enseigne : « Cinq éléments : 1. Eau ; 2. Feu ; 3. Bois ; 4. Métal ; 5. Terre. L'Eau humecte et descend ; le Feu flambe et tend vers le haut ; le Bois se courbe et se redresse ; le Métal obéit et change de forme ; la Terre se sème et se moissonne. »
Tel est l'ordre véritable et premier des éléments. À la différence d'un autre système de classification, celui du Yue ling, calendrier dont l'histoire peut être suivie seulement à partir du IIIe siècle avant notre ère et qui a été conservé par le Li ji (« Livre des rites »), on trouve dans le Hong fan une révélation de la constitution de l'Univers grâce à une progression decatégories et non pas un enseignement de la fonction des nombres dans l'aménagement du cycle de l'année. En d'autres termes, l'ordre des éléments, dans le Hong fan, est celui d'un dispositif cosmologique spatial, alors que celui du Yue ling a pour but une classification temporelle. Ainsi, dans la première section du Hong fan, l'Eau est-elle la première nommée parce qu'elle a pour domaine spatial le nord et, avec lui, tous les sites ainsi orientés et parce qu'elle répond à l'extrémité inférieure de la branche verticale d'une croix dont elle occupe le bas. Au contraire, le Feu répond à l'extrémité supérieure du haut et du sud, tandis que de la gauche, du Bois et de l'est, la branche horizontale s'étend vers ladroite, le Métal et l'ouest. Ainsi, la Terre occupe-t-elle le point central du dispositif spatial duHong fan qui définit et détermine par la croisée cosmologique des orients et des sites la place du Palais central où, dans sa capitale, réside, à l'intérieur du cœur royal, « la plus haute perfection du Souverain » et, avec elle, toute la Fortune de l'Empire.
Ce tracé invisible d'un templum, suggéré par le Hong fan, fait apparaître visiblement des « couples contrariés » analogues à ceux de la cosmologie héraclitéenne, et il y aurait lieu, de ce point de vue, de rapprocher le Logos héraclitéen du Dao, tel que l'évoque le Hong fan. C'est un fait que la catégorie de couple implique une conception cosmologique d'oppositions et de communions sexualisées, des emblèmes et des symboles (et non pas des genres ni des espèces), que domine une totalité indivisible d'assemblées qui doivent recréer sans cesse leur unité par les échanges alternés de leurs attributs et de leurs pouvoirs.
Entre les opérations de la Nature et les comportements humains, les mêmes signaux anthropo-cosmologiques peuvent évoquer indifféremment en de tels systèmes ou bien la femme qu'émeut la fécondation ou bien la Terre qu'ébranle le Tonnerre, quand « les femelles des dix mille espèces viennent de concevoir ». En ce sens, la transposition de ces signes au calendrier, du dispositif spatial aux classifications temporelles, s'effectue aisément, dans le système du Yue ling : le troisième jour après l'équinoxe, quand l'est-sud-est domine les orients, les premiers grondements du tonnerre se font entendre. Aussi, comme les hommes pour les semailles ouvrent la terre ébranlée, toute femme fécondée, de crainte que son fruit ne mûrisse point et ne lui échappe, doit vivre dans la retraite, sitôt qu'elle entend le battant de bois d'une clochette par laquelle un héraut proclame les interdits féminins saisonniers.[/size]
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ÉLÉMENTS THÉORIES DES :: تعاليق

فدوى
رد: ÉLÉMENTS THÉORIES DES
مُساهمة الأحد فبراير 14, 2016 10:43 am من طرف فدوى

  Circulations royales des énergies

Aux éléments, dans les deux systèmes du Yue ling et du Hong fan, répondent des « saveurs » : « (Ce qui) humecte (et) tend vers le bas (Eau : 1) produit le salé ; (ce qui) flambe (et) tend vers le haut (Feu : 2) produit l'amer ; (ce qui) se courbe (et) se redresse (Bois : 3) produit l'acide ; (ce qui) est ductile (et) multiforme (Métal : 4) produit l'âcre ; (ce qui) est ensemencé (et) moissonné (Terre : 5) produit le doux. »
Le Yue ling fait correspondre les « saveurs » aux « saisons » et aux « orients » : le salé à l'hiver et au nord, sous l'influence de l'Eau ; l'amer à l'été, au sud et au Feu ; l'acide au printemps, à l'est et au Bois ; l'âcre à l'automne, à l'ouest et au Métal ; la saveur douce au centre et à la Terre.
L'Eau produit le Bois, en lui donnant sa sève ; le Bois produit le Feu, qu'il alimente ; le Feu produit le Métal, qu'il dégage du minerai ; le Métal produit l'Eau, puisqu'il se liquéfie. Ces métaphores présentant une certaine cohérence, on peut admettre que l'ordre de production des éléments, tel qu'il fut imaginé par les premiers physiciens chinois, n'était pas absolument arbitraire. On a rapproché la théorie des éléments de celle de la gamme, sous le rapport de son expression numérique. On peut observer que ce rapport entre la physique et la musique a été considéré comme aussi fondamental en Occident qu'en Extrême-Orient. Une longue tradition symbolique, par exemple, s'est exprimée par le nom d'« art de musique », donné fort souvent à l'alchimie par ses principaux théoriciens, jusqu'auXVIe siècle de notre ère.
Dans l'expression chinoise wu xing, les « cinq éléments », il importe de noter que le sens du mot xing, que l'on a pris l'habitude de traduire par « élément », se rapporte aussi à la notion de « chemin », de « voie », et est ainsi très proche de celle du mot dao. Il semble que la conception plus générale d'une « action régulatrice » soit préférable à celle d'une réalité substantielle. C'est un fait que les « cinq éléments » sont associés constamment aux « cinq efficiences ou vertus » (wu de), théorie contemporaine de la précédente. Le système des wu de a servi de cadre aux politiciens afin de montrer comment, dans l'ordre historique, les événements sont commandés par une succession d'ordre cyclique. L'efficience épuisée, le de d'une dynastie décadente doit être remplacé par une autre vertu emblématique qui, pour définir son de, choisira l'élément opposé à celui du pouvoir vaincu. Par là seront changées les « cinq activités » (wu shi) : le Geste, la Parole, la Vue, l'Ouïe et la Volonté, puisqu'elles produisent les « vertus ». Quand Yu le Grand, après avoir mis dans un ordre parfait les cinq éléments (xing) et les céréales, distribue les domaines et les noms de famille, il s'écrie : « Qu'on prenne pour guide ma vertu (de) ; qu'on ne s'écarte pas de mes chemins (xing) ! » (S.M.T., I).
Comment mieux évoquer l'image d'une circulation royale ayant pour but de délimiter les lots de réalités, les héritages, les noms, les emblèmes, les insignes, qui devaient être répartis selon l'« action régulatrice » des cinq éléments ? En distribuant les fonctions des puissances de l'Univers et les tâches distinctes des hommes, le « fils du Ciel » devait empêcher un mélange de forces hétérogènes et un contact désordonné entre leurs attributs. Ainsi le souverain imitait-il la répartition parfaite dont la « Voie céleste » (Tian dao) donnait l'exemple universel à la « Voie royale » (Wang dao). En ce sens, les notions de daoet de xing s'expliquent conjointement à partir de l'image d'un régulateur d'alternance, comme l'indique la plus ancienne des définitions savantes du dao, celle du Xi ci : « Un yin, un yang, c'est le dao » (yi yin yi yang zhi wei dao). Ce qu'il faut entendre, à notre sens, comme l'a précisé M. Granet : « Tout yin, tout yang », car il s'agit là d'aspects totaux et qui se substituent entièrement (yi) l'un à l'autre, dans leurs productions alternantes et cycliques, où se retrouve, néanmoins, sous chacune de ses apparences, dans tous ses contrastes, le même pouvoir régulateur. Ainsi l'ordre actif peut-il se réaliser par de perpétuelles mutations dans la totalité de l'Univers.

3.  Empédocle et les pythagoriciens

Au milieu du Ve siècle avant J.-C., Empédocle d'Agrigente tenta de concilier la permanence des substances avec le changement perpétuel des apparences de l'Univers. Ce qui nous apparaît comme le commencement ou la fin d'un être n'est qu'une illusion ; en réalité, il n'y a rien que mélange, réunion et combinaisons qui s'opposent à la séparation des constituants et à leur décomposition. Les éléments dont toutes choses sont composées consistent en quatre substances différentes, incréées et impérissables : la Terre, l'Eau, l'Air et le Feu. Empédocle fut le fondateur de la doctrine classique des quatre éléments, déjà entrevue par ses prédécesseurs, mais à laquelle il a donné sa formule définitive.
Les quatre éléments répondent aux apparences et aux états de la matière. La Terre est le principe et le support de l'état solide et de la sécheresse. L'Eau, obtenue soit par fusion ignée, soit par dissolution, est le principe et le support de l'état liquide et du froid. L'Air, celui de l'état volatil et gazeux. Le Feu, plus subtil, répond à la fois à la notion de fluide éthéré, support symbolique de la lumière, de la chaleur, des affinités et à la notion phénoménale du mouvement des particules des corps. Tels étaient, pour Empédocle et ses successeurs, les éléments de l'Univers. Il importe d'observer que si leurs mélanges et leurs combinaisons produisent tous les corps naturels, les éléments, dans ce système, ne sont pas susceptibles d'être transformés : ils subsistent par eux-mêmes et ne se peuvent changer les uns en les autres.
Ces notions générales prirent chez les pythagoriciens des formes plus précises. Ils ajoutèrent à ces aperçus des conceptions mathématiques et géométriques dérivées de l'unité, envisagée comme l'éternelle génératrice des nombres. D'après Philolaüs (vers 450 av. J.-C.), la Terre est constituée par le cube, le Feu par le tétraèdre, l'Air par l'octaèdre, l'Eau par l'icosaèdre. Le cinquième élément, qui comprend les astres et leur sert de lien, correspond au dodécaèdre. On trouve des traces de ce cinquième élément chez Aristote. Il est, sans doute, l'une des origines de la notion de quintessence (littéralement, la « cinquième essence ») chez les alchimistes médiévaux.
Platon répandit toutes ces idées des pythagoriciens, particulièrement dans le Timée. Il y enseigne que la « matière première », « chose qui supporte tous les corps bien qu'elle ne sorte jamais de sa propre nature et qui est le fonds commun de toutes les matières différentes, étant dépourvue de toutes les formes qu'elle doit recevoir d'ailleurs », n'est par elle-même ni Terre, ni Air, ni Feu, ni Eau, ni quelque corps qui soit né de ces éléments. Elle reçoit les formes des quatre éléments, avec lesquels Dieu compose le monde, en opérant avec le Feu, sans lequel rien de visible ne peut exister ; avec la Terre, source de toute puissance solide et tangible ; avec l'Air et l'Eau, qui relient les deux principes précédents. Ces éléments ont eux-mêmes une forme géométrique, selon laquelle ils ne peuvent s'assembler que suivant certains rapports. Platon reproduit, sur ce point, les enseignements pythagoriciens de Philolaüs. Les corpuscules du Feu sont les plus petits, les plus légers, les plus mobiles, les plus actifs ; ceux de l'Air le sont moins ; ceux de l'Eau et de la Terre sont lents et lourds.
Toutefois, Platon s'écarte d'Empédocle car il admet un changement, par condensation, de l'Eau en pierre et en terre, de l'Air enflammé en feu, du Feu éteint en air, de l'Air en eau, etc. Les quatre éléments s'engendrent, d'ailleurs, périodiquement. Aucun des corps naturels, cependant, ne peut en refléter la véritable image.

4.  Les alchimistes d'Alexandrie

Marcelin Berthelot a signalé la parenté des théories platoniciennes du Timée avec celles des alchimistes grecs, contemporains et disciples des néo-platoniciens. Cette filiation était reconnue par Synesius dans son commentaire sur Démocrite et par Stephanus d'Alexandrie (vers 630 apr. J.-C.). Ce dernier déclare : « La science peut tout ; elle voit clairement les choses que l'on ne peut apercevoir et elle est capable d'accomplir les choses que l'on juge impossibles » (Ms. 2327, fol. 63). Et il ajoute : « Dieu a fait l'Univers avec quatre éléments... L'Air, le Feu, la Terre et l'Eau, étant contraires entre eux, ne peuvent se réunir, si ce n'est par l'interposition d'un corps qui possède les qualités des deux extrêmes. Ainsi, le Feu du vif-argent se joint à l'Eau par l'intermédiaire de la Terre, c'est-à-dire de la scorie... L'Eau est jointe avec le Feu du vif-argent par l'intermédiaire de l'Air du cuivre. Le Feu, étant chaud et sec, engendre la chaleur de l'Air et la sécheresse de la Terre. L'Eau, humide et froide, engendre l'humidité de l'Air et le froid de la Terre. La Terre, froide et sèche, engendre le froid de l'Eau et la sécheresse du Feu. Réciproquement, l'Air chaud et humide engendre la chaleur du Feu et l'humidité de l'Eau. »
Ce sont là des doctrines déduites de l'enseignement platonicien du Timée : « C'est donc de Feu et de Terre que Dieu dut former l'Univers ; mais il est impossible de bien unir deux corps sans un troisième, car il faut qu'entre eux se trouve un lien qui les rapproche l'un de l'autre. » Cette notion de « médiateur plastique », interposé entre l'âme et le corps, a reparu, sous diverses formes, dans l'histoire des sciences ; c'est une application matérialisée selon une interprétation physico-chimique, d'une notion métaphysique, d'origine platonicienne.
Stephanus d'Alexandrie, dans un langage pythagoricien, prétendait révéler les relations numériques à partir desquelles il établissait des correspondances symboliques entre l'alchimie et l'astronomie. Après avoir établi que chacun des quatre éléments, ayant deux qualités, résulte de l'association de trois principes élémentaires, Stephanus enseigne : « Cela fait douze combinaisons, résultant de quatre éléments pris trois à trois : c'est pourquoi notre art est représenté par le dodécaèdre, qui répond aux douze signes du Zodiaque. »
Dans cette perspective théorique, les quatre saisons correspondent aux quatre éléments et aux quatre zones du corps humain. De même, les sept transformations de la matière, les sept couleurs du Grand Œuvre, sont mises en rapport, chacune dans son ordre terrestre, avec l'harmonie céleste des sept planètes et des sept métaux qui leur sont symboliquement associés.
Les théories des alchimistes d'Alexandrie au sujet des quatre éléments présentent peu d'originalité par rapport à celles de la philosophie grecque classique, et il importe de rappeler les observations de J. Ruska sur ce point : « Écartons tout d'abord certaines hypothèses indémontrables qui rattachent l'alchimie grecque aux pratiques du culte égyptien. Les débuts de l'alchimie grecque peuvent être datés du IIIe siècle après J.-C. ; sa décadence se place vers le VIIe ou le VIIIe siècle, tandis que les documents écrits ont été recueillis au Xe siècle. Le manuscrit grec le plus ancien est le Codex Marcianus, duXIe siècle, une des pièces les plus précieuses de la bibliothèque Saint-Marc, à Venise... Les premières traces de cette décadence sont sensibles déjà chez Zosime, le plus célèbre auteur de cette école alexandrine. L'évolution ultérieure accuse encore cette régression de l'alchimie grecque, qui tourne en pur jeu littéraire et finit par se vider de tout contenu. En fait, c'est aux musulmans que l'on doit la renaissance des doctrines et des pratiques alchimiques traditionnelles. »
فدوى
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مُساهمة الأحد فبراير 14, 2016 10:43 am من طرف فدوى

5.  La gnose cosmologique de la théosophie ismaélienne

Grâce aux recherches et aux travaux de Henri Corbin depuis la publication, en 1949, de la « Bibliothèque iranienne » et, en 1953, de l'édition princeps du Kitab-e Jāmi'al Hikmatain, le « Livre réunissant les deux sagesses », le grand dessein de mettre en harmonie la philosophie grecque et la théosophie ismaélienne, tel qu'il inspira son auteur, Nāsir-e Khosraw, s'est dégagé définitivement des interprétations sommaires des historiens antérieurs. Ceux-ci, faute de comprendre la mise en œuvre de la gnose ismaélienne et de son herméneutique fondamentale, le ta'wil, avaient réduit de façon abusive à la perspective classique de l'imitation extérieure des systèmes, ce qui fut, en réalité, une « re-création » intérieure, profondément originale, de la pensée cosmologique, anthropologique et théologique de l'Antiquité par l'ésotérisme ismaélien.
Si l'on ne peut qu'indiquer succinctement ici ces différences, il importe de préciser au moins le mouvement de cette « re-création » qui ne présente pas de rapports avec l'opération dialectique, appelée par le jeu antithétique entre le « croire » et le « savoir ». Il s'agit, en effet, d'une opération herméneutique, d'une exégèse dans laquelle le ta'wil se présente comme une progression harmonique, faisant communiquer, dans le même mouvement ascensionnel, d'une part, un mouvement de retour aux données intérieures originelles, d'autre part, un dévoilement d'horizons nouveaux et de perspectives cosmologiques qui se lèvent et s'ouvrent, à mesure que s'unissent plus intimement la lumière de la connaissance de soi-même et la lumière de la compréhension de la Nature.
En ce sens, on a pu rapprocher le ta'wil ismaélien de la notion d'anaphore, d'une élévation vers la hauteur du Sens total, appuyée sur une descente préalable vers la Source de tous les sens possibles. Loin d'être antithétiques, ces deux phases d'une même opération apparaissent comme strictement interdépendantes et complémentaires. Ce n'est point là non plus une manière dogmatique d'interpréter les symboles, en fonction d'une certaine « doctrine traditionnelle », telle que prétend l'accréditer une pseudo-philosophie orientaliste, mise à la mode depuis quelques décennies. Mieux on connaît la tradition et plus on est sensible, au contraire, à la marge considérable d'indépendance et de liberté créatrice grâce à laquelle l'opération herméneutique ne peut jamais être réduite à un apprentissage machinal d'un corpus d'interprétations symboliques antérieures. La gnose étant une entreprise de délivrance pour le gnostique lui-même n'aurait évidemment ni sens ni portée si l'authenticité de sa quête personnelle n'était pas pleinement engagée dans sa recherche de la vérité universelle.
Il s'agit, en fait, à la différence de l'expérience philosophique et de l'expérience religieuse ordinaires, d'une reconquête de la poïesis absolue, d'un retour à la pure spontanéité du « faire-être », de l'ibdā ismaélienne, notion aussi éloignée des doctrines de l'« Émanation » que de celles de la « Création », et qui renvoie aux inspirations imprévisibles d'une pensée détachée de toute déduction causale. C'est au cœur même de ce « faire-être » que l'Univers, dans sa fonction essentielle, apparaît comme inséparable de la résurrection perpétuelle de l'Unique.
La Nature elle-même, pour la théosophie ismaélienne, appartient dans son essence à la spontanéité primordiale (elle est ibdā'i) et au monde du devenir (kawni) dans sa manifestation existentielle. Selon Abū'l-Haitham, elle comprend aussi bien les « Pères », c'est-à-dire les Luminaires célestes, que les « Mères » ou éléments, et enfin les « Nativités » (mawālid), c'est-à-dire les « trois règnes naturels ». Parmi les dons de l'Intelligence, ceux qui assurent une densité matérielle se corporalisent (mafassam). Grâce à ces dons matériels, l'Âme trouve un écran qui réfléchit les effusions immatérielles et qui lui permet de prendre conscience de celles-ci, de sorte que, grâce à la Nature, l'Âme parvient à la plénitude entière de l'Intelligence d'elle-même et de son principe.
La Nature apparaît, dans cette gnose, comme un miroir de l'Âme (speculum animae), ainsi structuré, dès l'origine, que les choses que nous voyons en elle sont telles qu'elles sont spontanément en nous dans leur mouvement « poétique » total, grâce auquel une conspiration perpétuelle assemble mystérieusement le sensible et le spirituel. Cette métaphysique du « couple » de l'Homme et de la Nature est évidemment étrangère aux angoisses du péché et de l'ascèse, puisque ce qui est éternellement « originé » (mobda) aussi bien que tout ce qui est « créaturel » (makhlūq) présente une même structure : lebesoin de son autre. L'Intelligence « première-créée » ne pouvait rester seule : l'Âme lui est aussi nécessaire qu'à son tour la Nature à l'Âme et l'Âme, elle-même, à la Nature.
On voit ainsi pourquoi, les notions de Psyché et de Physis étant corrélatives, la psychologie et la physique impliquent également un « art hiératique », une « science sacrée » qui n'est ni une pure technique matérielle ni un pur symbolisme d'une réalisation intérieure, affective et mentale. Ce savoir secret, on le sait, est l'alchimie, qui étudie la projection de l'« Âme du Monde » dans la matière.

6.  Les « matrices élémentaires » de Paracelse

W. Pagel, dans son ouvrage fondamental sur Paracelse et sur la médecine philosophique de la Renaissance, a montré que le trait distinctif du système paracelsien est la cohérence qui s'institue à la lumière des correspondances micro- et macrocosmiques entre la cosmologie, la théologie, la physique et la médecine.
Si la recherche de ces harmonies analogiques a été poursuivie depuis les présocratiques et les platoniciens jusqu'à la fin du Moyen Âge, Paracelse a été le premier à rejeter la ratiocination logico-scientifique commune aux philosophes de l'Antiquité classique et aux aristotéliciens médiévaux, et à utiliser directement la méthode analogique afin de l'appliquer à la connaissance expérimentale de la Nature.
Une grande partie du travail critique de Paracelse, en effet, est dirigée contre les conceptions classiques des éléments dans la mesure où la Terre, l'Eau, l'Air et le Feu, dans ces théories nouvelles, ne sont plus considérés comme des composants ultimes et irréductibles de la matière. Ce ne sont plus des corps simples et chacun ne devient visible et tangible qu'en fonction des trois autres éléments qui se mélangent avec lui. De même, le soufre, le mercure, le sel ordinaires, tels qu'on les trouve dans la mine ou le laboratoire, ne sont que des corps composés. Ce que Paracelse appelle « Soufre », « Sel » et « Mercure » sont les trois principes « sulfureux », « salin » et « mercuriel » qui entrent dans la constitution de tous les corps. Les éléments, en fait, avaient été considérés déjà par les alchimistes comme des structures primordiales plutôt que comme des substances, et ils les comparaient aux « vaisseaux hermétiques ». Ceux-ci, loin d'être de vulgaires récipients, exercent par leur type et par leur forme une influence essentielle et spécifique sur la nature de leur contenu. W. Pagel suppose, à juste titre, que ces notions alchimiques ont inspiré à Paracelse son concept de « matrices élémentaires ». La Terre, l'Air, l'Eau et le Feu sont, dans ce système, des « matrices » où les choses sont engendrées, où elles trouvent, en quelque sorte, leur habitat et leur statut physico-chimique et, surtout, où elles reçoivent leursignature qui, en fonction de l'analogie universelle, leur assigne leur destination ultime et révèle leurs propriétés « radicales » utilisables par le médecin.
La doctrine paracelsienne contient, en outre, l'idée centrale de l'« élément prédestiné » ou Cinquième Essence (Quinta Essentia). En chaque objet, l'un des éléments constitutifs acquiert un pouvoir supérieur à celui des autres et forme, en quelque sorte, le « noyau » de sa structure et de ses « vertus ». Cet élément « privilégié » signale aussi les différences fondamentales des objets entre eux et marque leurs oppositions. Déjà, dans la médecine et dans la pharmacologie de Galien et de ses disciples médiévaux, tel Raymond Lulle, la notion de Devictio posait en principe que, dans un « mixte élémentaire », un ou plusieurs éléments possèdent la primauté. Ainsi s'expliquaient, par exemple, les propriétés des drogues en terme de degrés (« grades ») de chaleur, de froid, de sécheresse et d'humidité, d'où le nom de « médecine des grades » de ce système galénique.
Les relations entre les « éléments » et les « principes » sulfureux, mercuriel et salin ne sont pas toujours nettement distinguées dans la terminologie de Paracelse, mais il semble assez évident qu'elles ne se réduisent pas à une classification de propriétés physico-chimiques. Ce qui distingue les objets n'est pas leur apparence matérielle, mais le faisceau d'énergies « spirituelles » qui la produisent par leur interaction et par un processus permanent de cristallisation, de solidification et de condensation de ces forces, analogues à celles des cellules germinales. En ce sens, l'alchimie hellénistique et médiévale avait introduit, avant Paracelse, des concepts biologiques dans la chimie, dans la mesure où elle expliquait l'origine des métaux par leurs « semences ». Paracelse a généralisé ce principe séminal sous la forme de semina invisibles par opposition aux éléments visibles des Anciens. Ainsi ne cherche-t-il pas des unités de matière, mais des modalités du Verbe et de l'Intelligence, des logoi dans la matière. Les semina sont étroitement analogues auxarchai, agents responsables de la spécificité. Ces forces et ces archétypes sont dits « spirituels » dans la mesure où leur corporalité est extrêmement subtile. On peut aussi les rapprocher des conceptions des stoïciens, selon lesquelles la « matière première » n'était ni corporelle ni spirituelle. C'est la matière qui, en se spiritualisant, devient vivante, et c'est l'esprit qui, en se matérialisant, se revêt d'une corporalité subtile. En d'autres termes, Paracelse a recherché la véritable spécificité que, selon lui, le mélange ne peut expliquer et qui laisse deviner la présence et l'action d'une force immanente à une substance spécifiquement caractérisée, ainsi que d'un dynamisme émanant de la « substance active » des corps (Wirkstoff).

7.  Les quatre éléments dans l'iconographie chrétienne

Les quatre éléments sont figurés à la mort du Christ sur le pied de croix de Saint-Omer (XIIe s.) et sur quelques ivoires plus anciens. La Mer, la Terre, l'Air et le Feu personnifiés se lamentent sur le trépas de leur Créateur. L'hymne de la Passion explique ce symbolisme qu'il convient de rapprocher d'une purification universelle par l'eau et par le sang qui coulèrent du côté du corps du Sauveur, percé par la lance de Longin :
اقتباس :
    Unda manat et cruor,
    Terra, pontus, astra, mundus,
    Quo lavantur flumine.
Ici, les astres représentent l'Air, et le monde, le Feu, selon l'interprétation proposée par Barbier de Montault.
Dans les thèmes du « Triomphe du Christ », on retrouve aussi l'association des éléments, par exemple sur l'ivoire de Londres (XIIe s.), où le Christ domine la Terre et la Mer personnifiées. Sur l'ivoire de Tournai, l'Air est symbolisé par les Anges. Parfois, le Christ est figuré debout sur une éminence, d'où sortent quatre fleuves mystiques destinés à arroser et à féconder la Terre. Dans ce cas, le symbolisme des éléments complète celui du quaternaire et se relie aux quatre fleuves du Paradis terrestre, aux quatre Évangélistes, aux quatre Vertus cardinales, aux quatre docteurs de l'Église et aux quatre Saisons.
Dans la crypte de la cathédrale d'Anagni, peinte au commencement du XIIIe siècle, l'Homme, Homo, dans l'état de nudité, est assailli par les quatre Saisons, sous la forme de petites têtes nimbées, avec une inscription latine qui fait correspondre ces Saisons aux éléments : le printemps à la chaleur, l'été à la sécheresse, l'automne à l'humidité, l'hiver au froid. Ainsi rappelait-on leurs analogies avec l'Air, le Feu, l'Eau et la Terre. Sur une autre fresque de cette cathédrale, les éléments sont étudiés par Galien et par Hippocrate.
Les quatre Âges et les quatre Tempéraments correspondent iconographiquement aux Éléments et aux Saisons : la jeunesse et le tempérament sanguin à l'Air et au Printemps, la maturité et le colérique au Feu et à l'Été, la vieillesse et le flegmatique à l'Eau et à l'Automne, l'enfance et le mélancolique à la Terre et à l'Hiver. On les relie, dans le même ordre, aux points cardinaux (est, sud, ouest et nord). D'autres correspondances ont été proposées, mais celles-ci ont été généralement suivies dans l'iconographie chrétienne médiévale. On doit rappeler qu'à la Renaissance un changement du système traditionnel des analogies cosmologiques apparaît dans les œuvres de l'art sacré comme dans celles de l'art profane, au moment où l'antique théorie des éléments est contestée dans ses principes philosophiques et se voit, peu à peu, préférer les premiers systèmes scientifiques des temps modernes.
René ALLEAU
 

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