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 Philosophie et croyances:

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فدوى
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فدوى


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26022016
مُساهمةPhilosophie et croyances:

A-t-on le droit de croire n’importe quoi ?
Introduction:
Croire c'est non seulement adhérer  à une idée, mais se fier à elle pour agir. Les motifs de cette adhésion peuvent être plus ou moins rationnels (connaissance et technique) ou raisonnables (action éthique et politique), mais ils ne sont jamais tels que nous pouvons les considérer sans examen préalable comme objectivement vrais ; la question de savoir si le Vrai et le Bien en soi peuvent être pensés ne change rien à la définition de la croyance: s'ils ne sont que des idéaux inaccessibles, alors le domaine de la croyance s'étend à toutes les idées possibles, y compris les domaines de la philosophie et des sciences. Ce qui ne nous autorise pas à considérer a priori que toutes les croyances se valent
Car si toutes nos idées sont des croyances, cela signifie-t-il, en effet,  que toutes se valent et doivent être autorisées, et si non, faut-il interdire celles qui paraissent en contradiction avec les idées que l’on se fait du vrai ou le bien (opinion), afin de faire échec à l'illusion et au mal? Dans le premier cas, on risque de ne plus distinguer entre les croyances dangereuses pour les personnes et les biens (ex: la croyance raciste) et les croyances bénéfiques (ex: la croyance à la liberté universelle) et de permettre aux premières de se développer aux dépens des secondes; dans le second on risque de récuser au nom du bien et du vrai la liberté de pensée et la libre discussion des idées qui sont les conditions de possibilité de la justice démocratique (fondée sur l'expression du libre choix des citoyens quant à la définition de la loi commune), ainsi que du progrès des sciences dans la production de la vérité.
Si l'on admet que certaines croyances menacent l'ordre public et la paix civile, ainsi que le progrès des sciences (ex: certaines positions religieuses "intégristes"), ne conviendrait-il pas de les combattre jusqu'à ne pas tolérer qu'elles puissent s'exprimer publiquement? Le principe démocratique de la tolérance est-il absolu (inconditionnel et sans limites) ou relatif (dans le cadre du droit)? C'est à la philosophie du droit d'examiner cette question.
Or elle distingue le droit moral et le droit juridique; 
- le premier relève de l'obligation que chacun s'impose librement de suivre des règles de conduite dans le souci d'une nécessaire solidarité et du respect de soi et des autres; en cela il oblige chacun à résister à ses impulsions violentes ou purement égoïstes et à combattre, d'abord en lui même, les croyances irrationnelles qu'elles produisent et qui les expriment; 
- le droit juridique permet à l'état de contraindre et d'imposer, par la menace, le respect des interdits indispensables à la préservation de l'ordre public et de la justice dans les relations entre les individus. 
Dans ces conditions, les limites de la tolérance, si elle apparaissent nécessaires, sont-elles de la compétence de l'état et du droit juridique ou relèvent-elles strictement de la conscience individuelle? Faut-il s'interdire, soi-même, de croire n'importe quoi, ou faut-il accorder à l'état le droit de légiférer dans un domaine ou la liberté individuelle de pensée est en cause?

Pour répondre à la question de savoir si les hommes doivent avoir ou non le droit, et lequel, de croire n'importe quoi, laquelle a pour enjeu la pratique de la tolérance, il convient, d'abord, d'analyser la croyance, ses différents types et leurs motivations, et de nous poser ensuite la question de l'existence et de la valeur des critères d'évaluation des croyances. 
 

1- Des différents types de croyances
 3 types de croyances peuvent être distingués: les croyances réalistes (jugements de réalité), les croyances prescriptives (valeurs éthiques) et les croyances mixtes ou ambiguës (jugements de valeur concernant la réalité, croyances religieuses et/ou philosophiques etc...).
 1-1 Les croyances "réalistes".
Les croyances réalistes prétendent rendre compte des faits, de leur déroulement, soit en les décrivant, soit en les expliquant. Ces faits relèvent de l'expérience réelle ou possible; ils peuvent être passés, actuels ou futurs, voire imaginés; mais il convient alors de le préciser en montrant qu'ils sont au moins logiquement possibles. La valeur de référence des croyances réalistes est la vérité ou la vraisemblance. Dans les deux cas, la concordance réelle ou possible entre la pensée et les faits est exigée. 
Les simples descriptions ne font que rapporter les faits particuliers dans leur contexte spatio-temporel. L'expérience sensible ou scientifique réelle ou possible est nécessairement invoquée, sinon explicitement évoquée. Cette description renvoie toujours à un certain point de vue qui peut être discuté ou critiqué selon un autre point de vue; c'est dire qu'il n'y a pas de description "neutre": chacune se réfère à des critères de choix qui, eux-mêmes, font intervenir, consciemment ou non, des hypothèses interprétatives, ne serait-ce que pour distinguer ce qui est significatif et important dans les faits ou ce qui est secondaire, et qui peut être négligé. 
Les explications tentent de relier les faits selon des lois générales de cause à effet, plus ou moins logiquement construites. Cette explication autorise la prévision, plus ou moins probable, selon le principe du déterminisme qui affirme la reproductibilité de l'enchaînement des faits dans des conditions semblables. C'est ce principe qui permet de soumettre la théorie à l'épreuve de l'expérience renouvelable Mais apparait ici un problème; la prévision dépend de la valeur de la théorie générale de référence; or cette valeur, en droit, ne peut jamais être entièrement prouvée par des expériences particulières. La contradiction entre la théorie générale et l'expérience, toujours particulière, rend donc la question de la vérité ou de la vraisemblance nécessairement problématique. 
Ainsi, description et explication ne peuvent pas, en pratique, être totalement indépendantes; les deux démarches sont indispensables et leur confrontation incessante permet seule de répondre au besoin de prévoir l'avenir qu'exige la réussite de nos actions. La vérité est une nécessité technique: de la qualité de nos théories prévisionnelles dépend la réussite ou l'échec, et dans de nombreux cas, la vie ou la mort, la santé ou la maladie, le plaisir ou la douleur.

Si la vérité concerne notre pouvoir d'action, elle ne concerne pas la détermination de la valeur des fins de nos actions: la vérité se rapporte à ce qui est et peut être et l'éthique à ce qui doit être considéré comme bon. Personne ne doit confondre ce qui est souhaitable, du point de vue du bonheur personnel et du bien vivre ensemble, et ce qui est réel ou possible: le possible ou le réel ne sont pas forcément souhaitables et le souhaitable n'est pas nécessairement réel ou possible; même s'il faut s'efforcer, pour ne pas échouer lamentablement, de définir un compromis entre le souhaitable et le réellement possible, ce compromis suppose que l'on distingue rigoureusement le vrai et le bien. La question du bien relève de la croyance prescriptive.
 1-2 Les croyances prescriptives.
Les croyances prescriptives concernent le domaines des valeurs éthiques et politiques; elles définissent les règles les devoirs les impératifs de l'action bonne et/ou juste. Une prescription.est soit égoïste soit altruiste, soit les deux; "Il faut se battre pour réussir et l'emporter sur l'adversaire!" est un impératif égocentrique; "Il faut aimer et se dévouer aux autres!" est un devoir altruiste; "Il faut aimer les autres pour être aimé et s'aimer soi-même!" est un impératif égo-altruiste. On voit par là que les valeurs sont contradictoires: la liberté et la égalité ne font pas nécessairement bon ménage; ainsi que le bonheur personnel avec la justice, et la liberté avec la sécurité etc... 
Le choix et/ou les compromis entre ces impératifs sont difficilement justifiables et deviennent l'objet de controverses infinies, comme on le voit dans la vie politique. Si l'on peut reconnaitre une contradiction dans une conception purement égoïste du bonheur et du bien, si l'extrème violence indifférenciée est un mal pour tous, la question de savoir où commence et où se termine l'égoïsme légitime, au regard des exigences de la liberté et de la solidarité, semble indécidable. Ainsi les croyances, et les convictions prescriptives sont largement arbitraires et dépendent des choix culturels et individuels, ainsi que des jeux des désirs: on ne désire pas une chose parce qu'elle est bonne, mais on la juge bonne parce qu'on la désire. 
Or une société a besoin de valeurs communes pour constituer le lien social et réguler les jeu des désirs contradictoires, d'où la tentation de fonder les croyances prescriptives sur des croyances réalistes apparentes ou révélées ou, sur le plan philosophique, de présenter les impératifs éthiques comme des vérités rationnelles et nécessaires auquelles il faudrait se soumettre librement (La liberté comme obéissance à la Raison). Il nous faut dons étudier ces croyances mixtes ou ambiguës;

 1-3 Les croyances mixtes.
3 types de croyances mixtes doivent être distinguées: les jugements de valeurs portant sur des choses, actions ou personnes concrètes réelles ou possibles; ex: cet homme est bon, cette action est juste, l'argent fait le bonheur etc...;les croyances religieuses; et les convictions philosophiques.
1-3-1 Les jugements de valeur. 
Les jugements de valeur "appliquent" des croyances préscriptives à des réalités réelles ou possible; ils affirment que telle chose a telle valeur, bonne ou mauvaise. Ex: tel homme est criminel parce qu'il a commis un acte interdit par la loi; il y a dans ce jugement au moins trois affirmations de nature différente: l'une qui impute l'acte concerné à la personne, l'autre qui affirme l'existence positive de la loi interdisant cet acte et enfin la valeur éthique ou morale de ladite loi; c'est elle qui, en dernier ressort, permet de statuer sur la valeur de l'acte et de justifier le jugement de valeur en question: qui, en effet, traiterait, aujourd'hui, les actes de résistance contre l'oppression nazie de criminels, bien qu'ils aient été illégaux, voire sanglants? 
Ainsi ce mélange de croyances et/ou de savoirs est subordonné à une croyance prescriptive dont le choix peut toujours apparaitre arbitraire comme nous l'avons montré plus haut. 
Or la pratique du jugement de valeur consiste bien souvent à nier cet arbitraire en spéculant sur l'opinion majoritaire, voire unanime, que la loi est évidemment légitime; ce qui est un pur et simple tour de passe-passe conceptuel: une loi peut, en effet, être considérée comme criminelle, comme on le voit à propos de la "libéralisation de l'avortement", et l'opinion, majoritaire ou unanime, est et reste contestable. Toute la ruse du jugement de valeur est donc de présenter l'homme comme objectivement criminel, et non pas de dire qu'il ne l'est que parce que nous le jugeons subjectivement tel (quelqu'en soient les motifs et les raisons). 
 Cette confusion est à son comble lorsque nous avons affaire à des croyances religieuses, comme nous allons maintenant le montrer.

1-3-2 Les croyances religieuses. 
Les croyances religieuses prétendent, sans preuves rationnelles, voire à l'encontre de la raison (révélation mystique), affirmer la valeur réelle des valeurs éthiques, au nom de l'existence réelle et de la puissance et bonté réelles et indiscutables (sacrées) du divin: Dieu ordonne le bien, les hommes, les croyants doivent s'y soumettre sans conditions, sous peine de sanctions hyper-violentes et par nature irrésistibles, ici-bas ou après la mort. En spéculant sur la faiblesse des hommes, leur angoisse de la mort et leur désir d'immortalité (le salut), la religion les persuade collectivement d'accepter volontairement de croire et d'agir aveuglément selon la loi divine, confondue avec la loi de la communauté, et, partant, présentée comme fondatrice du lien social et de la légitimité de la loi civile. Les prescriptions divines apparaissent aussi réelles que l'existence de Dieu; ce qui faisait dire à Descartes que sans religion, il n'existerait quasiment plus de morale commune. La religion apparaît bien comme un ensemble de croyances prescriptives qui, parce qu'elles sont présentées comme réellement fondées dans la réalité absolue de Dieu, interdisent toute possibilité de pensée critique à leur égard. Elle sert à confondent le bien et le vrai; et encore, pas n'importe quelle vérité: celle qui, par définition, ne se discute pas! 
Mais cette sacralisation des valeurs ne suffit pas, dans les moments de crise ou de conflit à préserver le lien social, au contraire; il n'existe pas une seule religion ni une seule interprétation possible d'une religion, et pour cause: un contenu de foi n'est pas, en tant qu'irrationnel, universalisable; les divisions éthiques humaines, dès lors qu'elles s'expriment sous la forme d'affrontements religieux deviennent insurmontables: l'absolu interdit le relatif et donc le compromis. Le fanatisme, conséquence de l'illusion délirante, c'est à dire irrationnelle, qui consiste à croire dans l'existence réelle de l'Absolu, , n'est pas une maladie de la religion; il est la religion en tant que maladie sociale et personnelle de l'esprit qui renonce à sa puissance critique et s'aliène à une transcendance imaginaire, faussement "réaliste", plus ou moins socialement contrôlée. 
C'est pourquoi la philosophie, au nom de la raison, a tenté de se substituer à la religion pour "démontrer" l'universalité indiscutable des croyances prescriptives, ou tout au moins de certaines d'entre elles.

1-3-3 Les croyances philosophiques. 
La philosophie n'est ni une science expérimentale, ni une science formelle; elle ne peut donc prétendre produire un savoir positif ou purement logique: elle relève donc bien, dans ses présupposés comme dans ses objets; de la croyance. Elle se distingue toutefois des autres formes de la croyance par sa démarche: elle se veut critique et rationnelle, et à ce titre prétend définir les fondements rationnels et les conditions authentiques de possibilité du Vrai, du Bien, voire du Beau. Cette visée des valeurs fondamentales de l'existence humaine fait donc de la philosophie un mode de production de croyances prédictives; Philosopher ce n'est rien d'autre que se mettre à la recherche d'un sens rationnel universellement compréhensible de la vie et des conditions du Bien-Vivre. Mais parce que ces croyances rationnelles, ou mieux rationalisées, ne peuvent échapper, dans leur objet même, à la subjectivité qui seule, an bout du compte, est susceptible de décider du mieux vivre, les philosophies sont nécessairement plurielles. En philosophie la pluralité contradictoire des positions subjectives s'exprime sous la forme d'axiomatiques logiquement possibles, mais plus ou moins exclusives, de la subjectivité, et produit leur universalisation intellectuelle; et partant, celle-ci rend possible, voire nécessaire, un dialogue susceptible de déboucher, non sur un accord unanime, mais sur la prise de conscience des raisons et de la légitimité des désaccords: des compromis entre les désirs et les intérêts reconnus comme légitimement contradictoires,, s'ils sont possibles et voulus, peuvent alors être négociés. 
Or, beaucoup, sinon la plupart, des philosophies particulières, se réclame de l'idée de vérité unique, voire absolue; elles prétendent, chacune, définir le vrai sens de la vie, le vrai bien, la vérité vraie etc...Elles se veulent des croyances réalistes et non pas seulement prescriptives. Elles tentent pour cela d'assimiler toutes les valeurs à la valeur de Vérité; les distinction entre elles, fondées rationnellement et universellement, ne seraient que l'expression plurielle, diversifiée, d'une même croyance fondamentale: la croyance dans la Raison en tant que Vérité auto-fondée et auto-fondatrice d'elle-même . Ce substitut philosophique au divin conduit les philosophes à construire des propositions cognitives, éthiques, politiques et esthétiques qui prétendent trouver leur fondement: 
- soit dans l'Être rationnel, tel qu'il est vraiment: le cosmos, les lois de la nature en général et/ou de la nature humaine en particulier; être dont la tâche de la philosophie est de déployer la logique essentielle (idéaliste ou matérialiste, fixiste ou dialectique et évolutive, etc...); 
- soit dans un pur formalisme abstrait imposant des impératifs catégoriques à la volonté purement raisonnable, au même titre que la logique pure à la connaissance, sur la seule considération du principe de la non-contradiction. 
Dans les deux cas, la philosophie tente de soustraire l'éthique à l'arbitraire du désir et de la subjectivité; mais, ce faisant, elle propose, soit une conception du bonheur sans désirs sensibles et égocentriques, dans l'ataraxie et la sérénité de l'universel raisonnable, soit elle exclue la question du bonheur hors du champs de la philosophie, réduisant celle-ci à n'être qu'une propédeutique auto-castatrice du pur devoir, de la négation du corps et de la sensibilité soi-disant séparés de l'âme raisonnable et du sacrifice de soi; tout cela confondu avec la "vraie" liberté.

S'il est donc théoriquement possible de distinguer les croyances quant à leur nature, on voit que, pratiquement, beaucoup, sinon la totalité, se présentent confusément masquées. On peut donc se demander s'il est possible de les évaluer et selon quels critères universellement fiables. Toutes les croyances se valent-elles? Si oui pourquoi, sinon comment les juger?
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2) De l'évaluation des croyances 
  
 

La position du philosophe sceptique Sextus Empiricus est à la fois juste et paradoxale:
- juste, car elle affirme qu'il n'y a pas de vérité rationnelle absolue possible; 
- paradoxale, car en prétendant qu'aucune croyance ne peut en valoir une autre, elle affirme cette position comme une croyance supérieure.

Si on ne peut vivre et penser sans croire dans la justesse, l'authenticité, la vérité de certaine idées, bref sans choisir entre les bonnes et les mauvaises croyances, est-il possible d'évaluer les croyances, en l'absence de tout critère de valeur absolu rationnellement indubitable? Le choix est-il voué à l'arbitraire de la subjectivité? Reprenons notre analyse des différents types de croyances pour nous prononcer cas par cas. 
 

 2-1 Les croyances réalistes et la vérité scientifique. 
 

Les croyances réalistes, semble-t-il, se prouvent par l'expérience et la logique; précisons que la logique seule n'est pas suffisante, mais seulement nécessaire: une théorie peut être cohérente en elle-même mais en contradiction avec les faits qu'elle prétend expliquer ou prévoir, en revanche une théorie contradictoire ne peut jamais être vérifiable ou réfutable expérimentalement: elle n'autorise, en effet, la déduction d'aucune prévision univoque testable. C'est donc l'expérience qui, en dernier ressort, peut servir de critère de la vérité. 
Mais l'expérience sensible est forcément qualitative, subjective et instable, il faut donc lui substituer l'expérience scientifique; celle-ci, en effet, est quantifiable, instrumentale et reproductible, donc universalisable et objectivable. Dans ces conditions, l'expérience scientifique est à la fois dépendante de la théorie, car elle est induite par elle dans ses conditions de possibilités et sa définition présuppose toujours une ou des hypothèses générales, et autonome, car ses résultats sont mesurés selon des procédures et des instruments distincts de la théorie et des hypothèses génératrices. La confrontation entre les deux lignes de résultats, les résultats logiquement calculés selon la théorie, et les résultats mesurés par des instruments objectifs, permet de décider de la valeur de la théorie. Quelle valeur? Non pas la vérité absolue car aucune expérience particulière ne peut valider une hypothèse générale et que d'une hypothèse fausse on peut logiquement déduire une conséquence « réalistement » vraie (en cela les sceptiques ont raison); mais de sa valeur relative, en concurrence avec d'autres théories au domaine d'application semblable. En droit plusieurs théories peuvent être explicatives d'un même ensemble de phénomènes expérimentaux. Dans ce cas, le choix est affaire de commodité dans les calculs et d'élégance logique, jusqu'au moment ou des tests nouveaux feront la différence. Mais si cette autonomie (et non pas indépendance) de l'expérience par rapport à la théorie vaut pour les sciences de la nature, elle ne semble pas être possible dans les sciences humaines pour deux raisons: 
- Il n'y a pas d'expérimentation objective des comportements humains, dans les conditions stables de laboratoire; ceux-ci font intervenir des valeurs subjectives, plus ou moins conscientes et leur sens vécu par des sujets, en droit et en fait, différents. Aucune expérience sur l'homme n'est universalisable, si ce n'est des expériences en aveugle portant sur le fonctionnement purement physiologique, si cela à un sens, de son organisme, en excluant par conséquent les comportements psychologique ou sociaux, c'est à dire les comportement spécifiquement humains. L'homme n'est et ne peut pas être un pur objet d'expérience; aucun test objectivement pertinent ne peut donc, sinon valider, du moins invalider une théorie dans les sciences humaines car elles sont, de par la nature de leurs "objets", imprédictibles; 
- les théories dans les sciences humaines modifient les comportements humains; lorsqu'elles prétendent faire des prévisions, elles réalisent, dans la conscience des hommes, les conditions de leur réalisation. Comment distinguer, sur des critères cliniques, la valeur de la croyance dans la psychanalyse par rapport à la valeur de telle ou telle interprétation religieuse? La guérison n'est-elle pas conditionnée par la croyance que les sujets leurs vouent? 
Ainsi les chiffres et les données, dans les sciences "humaines" sont toujours réinterprétables et manipulables, à volonté. 
Nous sommes donc réduits à juger les propositions des sciences humaines à leurs fruits; c'est à dire à leurs effets sur les comportements humains: sont-ils bons ou mauvais, du point de vue de quelles valeurs? Les sciences "humaines" sont donc nécessairement des savoirs éthiques: les questions qu'elles posent, les méthodes qu'elles mettent en oeuvre, les effets qu'elles produisent, se réfèrent à des valeurs implicites. En cela, elles sont des philosophies appliquées. Et quant à faire de la philosophie, mieux vaut en faire consciemment, en explicitant les présupposés et les implications éthiques auxquels elles renvoient.

Si donc les sciences de la nature peuvent évaluer les croyances réalistes, elles ne peuvent prétendre au savoir absolument certain. Elles produisent des croyances plus ou moins vraisemblables; les savoirs scientifiques sont et restent des croyances rectifiables en droit; mais à la différence des croyances idéologiques elles se savent incertaines et hypothétiques; "tout se passent, pour le moment, comme si"; et non pas, "voilà définitivement ce qui est": telle est la formule qui résume le mieux la modestie de la vérité scientifique. Or seules les croyances scientifiques explicatives, concernant les phénomènes naturels, disposent d'un critère de vérité relative, objectivement fiable et universalisable; c'est dire, par conséquent, que toute vérité, en dehors des vérités factuelles, qui se présente comme absolue et extra-scientifique ne peut être qu'une illusion religieuse, philosophique et/ou idéologique; c'est à dire une croyance prescriptive déguisée en savoir réaliste, sur laquelle nous reviendrons.
Quant au sciences humaines et à l'usage des sciences de la nature leur valeur implique des croyances prescriptives ou valeurs éthiques. Mais comment évaluer les valeurs éthiques? 
 

 2-2 La valeur raisonnable des croyances prescriptives. 
 

Les croyances prescriptives prétendent définir le Bien et le Juste. Mais les phénomènes objectifs ne sont, en soi, ni l'un, ni l'autre; Les valeurs ne découlent pas de la vérité objective, ni ne sont objectivement vraies: le Bien et le Juste ne sont que les fins de nos désirs individuels et/ou collectifs. Les valeurs ne sont pas universellement désirables parce qu'elles sont bonnes, mais elles sont bonnes parce qu'elles sont, à tord ou à raison, considérées comme universellement désirables. Dans ces conditions toutes les valeurs sont au fond subjectives. Faut-il admettre alors qu'elle sont arbitraires et, qu'à ce titre, elles se valent?
On aurait raison de penser que toutes les croyances prescriptives sont nécessairement irrationnelles, s'il était définitivement impossible d'accorder les désirs des individus et des collectivités humaines; or, d'un certain côté, cela est juste: les désirs sont contradictoires: nous désirons tous la liberté et la sécurité, l'affirmation égoïste de soi-même et la solidarité, la fraternité et la compétition etc... 
De plus, le désir fonctionne sur fond de rareté et obéit nécessairement à la logique de la compétition; il oppose les hommes les uns contre les autres: chacun désire, soit l'objet du désir des autres -ce qu'il n'a pas et que les autres sont susceptibles d'avoir- soit le désir des autres, mais d'une manière exclusive (ex: la jalousi
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