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 Manifestations fonctionnelles et psychosomatiques

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سوسية
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19022016
مُساهمةManifestations fonctionnelles et psychosomatiques

[size=32]Manifestations fonctionnelles et psychosomatiques[/size]
 Patrick Juignet, Psychisme, 2012.

Dans la mesure où l'on trouve des manifestations corporelles, (expressives, fonctionnelles,psychosomatiques), dans à peu près dans toutes les formes de personnalités ainsi que dans les diverses pathologies multifactorielles, nous classons ces manifestations parmi les syndromes ubiquitaires.
Notre propos concerne uniquement les manifestations qui ressemblent aux symptômes d’étiologie biologique, mais qui n’en sont pas. Nous allons tenter une catégorisation et distinguer différents types de manifestations pathologiques selon que leur origine est plutôt cognitivo-représentationnelle ou plutôt neurofonctionnelle. On peut les définir comme les effets descendants (vers l’appareil biosomatique) du fonctionnement cognitivo-représentationnel et de son sous-jacent neurofonctionnel.
Nous allons voir successivement les différent types de manifestations possibles.



PLAN DE L'ARTICLE





1/ Les manifestations corporelles expressives

Les manifestations corporelles expressives sont une expression des processus de type cognitif et représentationnel du psychisme. Elles sont identiques aux formes signifiantes et comparables à une expression dans un langage non verbal. Ne pouvant s’exprimer de manière directe claire efficace, c’est-à-dire débouchant sur un énoncé et une conduite appropriée, les processus représentationnels s’expriment de manière corporelle détournée. C’est ce qui a été décrit comme « conversion » hystérique. Nous le définirons tout simplement comme un processus représentationnel ayant un effet corporel.
Les jambes qui ne répondent plus, l’étouffement, l’envie de vomir, la surdité, etc., manifestent un sens du type : je ne marche plus, je n’en peux plus, ça me dégoutte, je ne veux plus en entendre parler, etc. La personne s’exprime de manière confuse par le corps. Ces manifestations peuvent être précises ou au contraire générales et indifférenciées au sens où tout le corps participe de manière indifférenciée. Ce sont les crises qualifiées de "crises d’hystérie", parce qu’elle sont spectaculaires. 
Ces symptômes sont des "symboles", si par ce terme on désigne un signe motivé (le signifiant n’est pas arbitraire, il est en rapport avec ce qui est signifié). Un symbole a toujours un sens, mais ce sens est souvent caché, il échappe au premier abord, car il n’est pas conventionnel. C’est le cas de ces manifestations corporelles.
Ces manifestations sont celles qui ont été appelées « conversion » par la psychanalyse et sont nommées « troubles somatoformes par le DSM-IV ». 
Ces manifestations corporelles expresssives sont nombreuses et très diverses. Ce peut être des symptômes douloureux divers touchant la tête, le dos, les articulations, les extrémités, la poitrine, le rectum, les règles, les rapports sexuels, la miction. On trouve des symptômes gastro-intestinaux tels vomissements, colite, refus alimentaires. Sont également fréquents les symptômes sexuels comme anomalie de l’érection ou de l’éjaculation, la dyspareunie, le vaginisme. On verra aussi des symptômes moteurs comme des troubles de l'équilibre, paralysie ou faiblesse musculaire localisée, perte de la sensibilité tactile ou déficit sensoriel (diplopie ou cécité), des crises et convulsions diverses. Chez l’enfant ce sera l’énurésie, les maux de ventre.
Le diagnostic se fait sur l’inadéquation de la symptomatologie avec ce que décrit la clinique somatique.  Il faut rechercher l’aspect symbolique du trouble : il a un sens dans le contexte psychologique et relationnel du patient. Faire le diagnostic, c’est reconnaître la dimension symbolique de ce qui se présente faussement comme un symptôme somatique.

2/ Les manifestations fonctionnelles transitoires

Les manifestations fonctionnelles, sont aussi une expression d’origine représentationnelle, mais elles entraînent une modification physiologique pathologique, par le relais au niveau neurobiologique puis biosomatique. Ici aussi, il est probable que ne pouvant s’exprimer de manière directe, les mouvements affectifs passent dans la physiologie de manière inappropriée. Ces manifestations sont réversibles et correspondent à un dysfonctionnement physiologique sans lésion ni séquelles
Elles peuvent être aiguës ou chroniques et toucher tous les appareils :  elles peuvent être motrices, sensorielles, digestives, respiratoires, cardiaques, urinaires, génitales, neurologiques. La différence avec les précédents symptômes est qu’il y a une inscription neurofonctionnelle avec effet biologique et donc une autonomisation possible du trouble. Dans ce cas ce qui est prédominant se passe au niveau neuroinformationnel (le traitement des signaux dans les réseaux neuronaux) avec des conséquences neurophysiologiques. De ce fait elles peuvent persister même si la cause représentationnelle est partie. Elles demandent une rééducation spécifique.
Ce sont les mêmes types de symptômes que ceux vus ci-dessus, mais avec des nuances cliniques. Les troubles se sont chronicisés, ils semblent installés, ce qui implique une modification durable.
On retrouve les divers symptômes douloureux déjà énumérés pouvant toucher tous les appareils. Les symptômes gastro-intestinaux vont plutôt être du type ballonnements, diarrhée, gastrite. Dans les symptômes sexuels on verra des anomalies de l’éjaculation, des règles irrégulières, règles excessives, le vaginisme. On trouvera des symptômes moteurs figés comme des difficultés de déglutition ou boule dans la gorge, aphonie, rétention urinaire. Il y a aussi les crises de dyspnée, tachycardie et crise d’angor ainsi que les crises de spasmophilie. Chez l’enfant, ce sont les vomissements psychogènes, le mérycisme, les coliques idiopathiques.
Comme précédemment on notera une inadéquation avec ce que décrit la clinique strictement somatique. La différence avec les troubles corporels expressifs (conversions) vus avant, c’est l’inscription neurofonctionnelle du trouble et son autonomisation relative. Dans bon nombre de cas l’aspect représentationnel est parfois ancien et ne semble plus effectif, ce qui signe l'autonomisation du trouble.
La dépression et l’angoisse, qui ne sont pas classées dans les manifestations psychosomatiques, mais s’accompagnent toujours de troubles fonctionnels, parfois intenses. La séparation n’est donc pas du tout nette. (voir l'article correspondant).

3/ Les manifestations fonctionnelles constantes et/ou générales

Il peut s’agir de la forme précédente chronicisée mais, souvent, on ne retrouve pas d’origine précise. La dysfonction semble avoir toujours été là. On peut supposer un manque d’apprentissage à la régulation et au calme pendant l’enfance et/ou un facteur constitutionnel d’origine génétique. C’est ce que l’on appelle les dystonies neurovégétatives.
Sans se prononcer sur leur caractère acquis ou inné, il est patent que chez certaines personnes, il existe une tendance anxieuse constitutionnelle. La personne se sent facilement stressée, elle a souvent des somatisations fonctionnelles (douleurs, spasmes, hypotension, sudation, etc.). Comme dans le cas précédent ce qui est prédominant se passe au niveau neurofonctionnel avec des conséquences physiologiques.
Ces personnes réagissent trop aux stimulations diverses de l’environnement concret et social. Dans ce cas seront plutôt indiquées les thérapies corporelles  relaxation massage le sport qui peuvent amener une détente, ce qui peut améliorer la maîtrise corporelle comme le yoga . 
De plus, comme signalé plus haut, il y a des interactions montantes entre le biologique le neurologique et le neurofonctionnel qui provoquent des manifestations fonctionnelles neurologiques et biosomatiques générales mal connues comme la fibromyalgie et la fatigue chronique.

4/ Les manifestations biosomatiques

Les manifestations somatiques induites sont des symptômes d’origine psychique, mais un double relais au niveau neurophysiologique, puis biosomatique, entraîne une véritable dysfonction biologique non réversible spontanément. Dans ce cas ce qui est prédominant se passe au niveau biosomatique même s’il y a une origine représentationnelle. Le dysfonctionnement aboutit à une lésion biologique véritable.

a/ Le stress

Nous placerons ici les effets du stress, car il est une réponse somatique à une sollicitation de l’environnement qui au départ peut être représentationnelle ou informationnelle au sens défini plus haut. Par voie descendante, il se produit une modification biologique. Classiquement on distingue trois phases de stress : la phase d’alerte, la phase de lutte et la phase d’épuisement. Au dernier stade il s’ensuit un épuisement des surrénales, une atrophie du thymus, des ulcères gastriques. Le diagnostic est facile devant des circonstances évocatrices : guerre, affrontement, harcèlement au travail, confit familial. 

b/ Les maladies psychosomatiques.

Ce sont des maladies au sens ordinaire du terme avec un désordre biologique. L’expression directe et claire est ici encore plus absente qu’ailleurs. La mentalisation est très pauvre d’une manière générale et pas seulement en ce qui concerne le trouble. Cette quasi-absence de pensée verbalisée chez certains patients a été anciennement repérée (Férenczi, 1924).
Ce sont les asthmes en pneumologie, les eczémas en dermatologie, les colopathies en gastroentérologie, les coronaropathies en cardiologie, les céphalées en neurologie, les coliques idiopathiques en pédiatrie. Dans ce cas le dysfonctionnement psychique est souvent déclenchant ou aggravant par rapport à une maladie préexistante ayant une détermination biologique autonome. 
Ce peut être aussi l’apparition d’une maladie classique qu’il faut traiter comme telle.

c/ Chez l’enfant 

Chez l'enfant on trouve l’anorexie mentale du nourrisson, les manifestations asthmatiques précoces, les eczémas, le nanisme psychogène qui est lié au stress permanent.
Elles sont fréquentes chez les personnalités somatisantes, qui se caractérisent par une pensée pauvre, une incapacité à ressentir les mouvements affectifs qui les habitent et qui sont tournée vers l’action.
[size=undefined]Enfin signalons qu'il existe des cas incertains, car l’absence d’étiologie organique peut-être venir de notre ignorance, ce qui conduit parfois à une psychologisation abusive.[/size]

5/ Les manifestations somatiques provoquées

Nous sommes à la limite de ce qui peut entrer dans notre étude, car, dans ce cas, il n’y a pas de transmission descendante d’un niveau à l’autre. Les manifestations somatiques provoquées, sont des désordres somatiques obtenus par des actes volontaires qui ont une motivation purement cognitivo-représentationnelle. 
Les aspects représentationnels génèrent des actions qui ont pour but de provoquer un dysfonctionnement biologique. Exemple dans l’anorexie la privation de nourriture, qui est un acte volontaire, aboutit à un amaigrissement et à une modification métabolique. Ce cas peut se complexifier, car il y a rétroaction sur le fonctionnement neurofonctionnel et métabolique qui provoque une autonomisation. L’amaigrissement et la déviation métabolique sont bien des faits biologiques. Seul leur origine représentationnelle les distingue du même amaigrissement lors d’une maladie générale. 
À un degré de plus on trouve le syndrome parfois nommé de Munchausen, dans lequel des actions volontaires et intelligentes provoquent des troubles somatiques (autoprélèvements sanguins, infections et réinfections volontaires).
On pourrait y relier les addictions, car dans ce cas il y a une modification métabolique et neurofonctionnelle qui donne une autonomie biologique au trouble (avec accoutumance et dépendance), même s’il est déclanché par des actes volontaires. Les addictions à la nourriture, le tabac, l’alcool et aux divers toxiques ne rentrent pas classiquement dans cette catégorie, mais elles comportent un dysfonctionnement biologique déclanché et entretenu par une action volontaire.
L’anorexie peut être considérée comme une manifestation somatique provoquée. Les conduites anorexiques sont variables. Elles vont de l'anorexie transitoire jusqu’à l’anorexie grave et persistante.  L’anorexie grave et persistante dite "essentielle" est liée  à une organisation de la personnalité particulière qui, à un moment donné, privilégie l’anorexie comme forme symptomatique prévalente. L’anorexie essentielle se manifeste par un amaigrissement important provoqué par une série d'actes volontaires (privation de nourriture, activité sportive, vomissements, etc.) .

6/ Le diagnostic positif et différentiel

Dans la mesure où le médecin ne sait pas à l’avance si les manifestations cliniques qu’il rencontre ont une origine biosomatique ou psychique, il se trouve devant une énigme. Les causes étiologiques sont très différentes mais assez difficiles à diagnostiquer pour trois raisons :
1/ Les manifestations corporelles ont presque la même forme clinique.  2/ L’origine psychique suspectée est souvent niée par le patient. 3/ Le symptôme lui-même est présenté de manière déformée (parfois nié, comme l’amaigrissement chez l’anorexique, ou au contraire majoré, comme les précordialgies, les dyspnées ou les douleurs). 
Tout cela constitue un difficulté diagnostique, renforcée par le fait que le médecin, qu’il soit généraliste ou psychiatre, a l’obligation de ne pas passer à côté d’une pathologie purement somatique qui peut être grave. Dans la mesure où empiriquement les manifestations sont identiques ou très ressemblantes, pour les distinguer, il faut remonter à ce qui les cause, c’est-à-dire arriver à désigner le déterminisme mis en jeu. La démarche est la suivante.
Il faut commencer par des examens cliniques et paracliniques classiques, afin de recherche une détermination biologique. Si la démarche aboutit à éliminer une étiologie biologique, ou à constater qu’elle n’est pas exclusive, ou incriminera une détermination psychique. Cette investigation, pour être efficace, va demander du temps et de nombreuses consultations. Elle n’intéresse pas toujours le somaticien. Cette longue investigation peut lui donner l’impression de perdre un temps qui est souvent compté dans les conditions actuelles d’exercice. Dans ce cas il est préférable qu’il oriente alors le patient vers un psychiatre.
Le principe général de diagnostic est toujours le même, il s’agit de se demander quel est le niveau d’origine du trouble et quel chemin est emprunté pour aboutir à former un symptôme. On oriente l’investigation à l’aide de la clinique psychopathologique en approfondissant la recherche de ce côté : mode de vie du patient, évènements récents stressants ou traumatisants, histoire individuelle et familiale, personnalité, etc.
Les troubles fonctionnels et psychosomatiques s'expliquent par les interactions pathogènes, allant par voie descendante du cognitivo-représentationnel vers le biosomatique. Pour ces troubles, l'intervention thérapeutique est mixte il faut à la fois traiter le dysfonctionnement somatique et son origine psychique.
Lorsque les manifestations psychosopatique sont constantes et s'accompagnent de défenses aboutissant à une pensée opératoire (absence d'imagination, pensée uniquement concrète) on parle de personnalité somatisante ou personnalité psychosomatique.  La question de savoir si cette forme de personnalité est individualisable reste controversée. 
Bibiographie
« Troubles psychosomatiques de l’adulte » in Widlöcher D, Braconnier A., Psychanalyse et psychothérapie, Flammarion, Paris,1996.
Médecine psychosomatique, Haymal A. Pasini W., Paris Masson, 1984.
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